Un téléthon, pourquoi ? Et pour qui ? Il s'agit, après la terrible tragédie qui a frappé notre pays, et qui a fait quelque 750 morts et près de 150 disparus, de faire appel au coeur et... à la raison des Algériens. Ces derniers ont, dès les premiers instants du déluge, fait preuve de dévouement et de courage, se portant spontanément au secours des victimes, aussi bien pour dégager les corps de ceux qui avaient perdu la vie que pour venir en aide aux sinistrés, notamment ceux qui étaient sans toit et qui s'étaient retrouvés dans les centres de transit (écoles, halls des APC...). Il est bien évident que le mal qui a été causé par le déluge est énorme et que pour réparer et reconstruire tout ce qui a été détruit, il faudra beaucoup de temps et beaucoup d'argent. L'Etat a déjà mis la main à la poche en dégageant un budget conséquent, en relogeant plus de 2.200 familles sinistrées et en octroyant un capital décès de 70 millions de centimes. La solidarité internationale ne s'est pas fait attendre non plus. Du Maroc, de France, des Etats-Unis et de nombreux autres pays ou organisations dont la liste serait trop longue à énumérer, des dons multiformes ont afflué, en aide alimentaire, tentes, couvertures, médicaments, groupes électrogènes. De toutes les wilayas du pays, des initiatives ont été prises pour organiser des caravanes de solidarité. La télévision, la radio et les journaux ont servi de relais à toutes ces bonnes actions. Et les médias, à tout moment, tout en saluant l'élan de solidarité, n'ont pas manqué de tirer à boulets rouges sur les pilleurs, les charognards, ceux qui détournent les dons ou détroussent les cadavres, qu'ils soient «élus» ou simples voyous, mais en tout cas toujours mafieux. Le Téléthon, qui sera organisé à partir d'aujourd'hui, n'est certes pas le couronnement de toute cette chaîne d'efforts - parce qu'on mettra longtemps pour panser les blessures et pour tout reconstruire - mais ce sera certainement un moment important. Dix-huit jours après la tragédie, et bien que la douleur soit toujours vive, le Téléthon fera appel à l'émotion. C'est sans doute la raison pour laquelle les artistes et les sportifs ont été fortement sollicités. Parce qu'ils sont des stars et qu'ils représentent des modèles que la jeunesse admire et auxquels elle souhaite ressembler, les artistes ont répondu: «Présent!» avec beaucoup de spontanéité, avec beaucoup de force. Les médias lourds, sans lesquels le Téléthon n'aurait pas pu être envisagé, retrouvent ici leur mission de service public. En prêtant leurs caméras, leurs micros, leurs plateaux, leurs animateurs, leurs techniciens, leurs équipements et leurs émetteurs, ils vont jouer un rôle qui n'aurait jamais dû cesser d'être le leur: être des instruments au service des citoyens. L'Entv a déjà démontré sa capacité à organiser et à mener à bien ce genre de manifestations. Les téléthons de Aïn Temouchent et de Diar Er-rahma ont été des moments forts dans la vie du pays. Ça, c'est le côté technique. Il y a maintenant l'aspect moral de la chose. Beaucoup de citoyens ont reconnu au téléphone qu'il n'y a rien à dire sur les suites à donner au téléthon de Aïn Temouchent, ou si peu, mais que beaucoup d'encre a coulé sur les suites données à l'opération Diar Er-rahma. Et là, ce n'est pas la télévision qu'il faut incriminer en tant qu'institution, car ce n'est pas elle qui gère les fonds collectés. C'est un point qu'il faut préciser, car beaucoup de personnes pensent le contraire. Les organisations chargées de collecter les dons et de les affecter doivent être clairement identifiées. Que ce soient le Croissant-Rouge, le ministère de la Solidarité, ou tout autre organisation, on veut savoir qui est qui et qui fait quoi. Le citoyen veut donner de l'argent, mais il veut savoir où il va. Alger, qui a été et demeure la capitale de la douleur, doit devenir la capitale de la solidarité et de la générosité, sinon la grande messe de l'amitié et de la fraternité. Des champions comme Nouria Benida Merah, Salima Souakri, ou Soltani M'barek et de grands artistes tels Mami, Djalti, Guerrouabi ont promis d'être de la partie. Des artisans ont déjà mis en vente leurs produits au Palais de la culture. Il a été procédé à la vente de toiles. Le coureur automobile Nassim Sidi Saïd a fait don de sa prime. Et parallèlement à la télévision, l'Office Riadh El-Feth s'apprête à organiser un spectacle non-stop qui va durer deux jours, avec tournoi de jeux d'échecs et vente de pin's au profit de sinistrés. En deux mots, un programme riche et varié susceptible de réconcilier les Algériens avec eux-mêmes en ces moments difficiles.