Les présidents Raul Castro et Barack Obama ouvrent une nouvelle ère dans les relations cubano-américaines Le président Barack Obama s'apprêtait hier à tourner une page historique en se rendant à Cuba, un des derniers bastions du communisme avec lequel il entend mettre fin à plus de cinq décennies d'antagonisme forcené. En débarquant hier vers 17h00 locale (21h00 GMT) sur le tarmac de l'aéroport Jose Marti à La Havane, M.Obama deviendra le premier dirigeant américain en exercice à venir sur l'île depuis Calvin Coolidge, en 1928. Accompagné de son épouse Michelle et de leurs deux filles Malia et Sasha, il se déplace avec un double objectif: aller à la rencontre du peuple cubain et consolider le spectaculaire rapprochement engagé fin 2014 avec le Cuba de Raul Castro. Promoteur du dialogue en matière de diplomatie, le président américain, qui ira ensuite en Argentine, veut aussi redorer l'image de son pays en Amérique latine, ternie par des années d'interventionnisme dans son ancien pré carré. Dans cette optique, le vieil ennemi cubain constitue le symbole parfait d'une nouvelle relation avec le continent, et, au moment de boucler son second mandat, M.Obama souhaite avancer le plus possible sur ce dossier afin de compliquer tout retour en arrière, quel que soit son successeur en 2017. C'est cet objectif qui a conduit la Maison Blanche à décréter ces derniers mois une série de mesures assouplissant l'embargo imposé à l'île depuis 1962, dont la levée totale dépend du Congrès. La chaîne hôtelière Starwood a annoncé samedi soir avoir obtenu le feu vert du Département du Trésor pour ouvrir deux hôtels à La Havane, devenant la première multinationale américaine à profiter des nouvelles réglementations pour s'installer à Cuba depuis la révolution castriste de 1959. A son arrivée hier, le président américain doit se rendre à l'ambassade américaine, puis rejoindre la vieille ville en longeant le Malecon, célèbre boulevard de bord de mer havanais le long duquel de nombreux cubains devraient se masser pour voir passer sa limousine blindée. Dans la soirée, il doit parcourir les rues de la vieille Havane, classées au patrimoine de l'Unesco, puis rencontrer à la cathédrale le cardinal Jaime Ortega. Le temps fort de la visite du président américain sera son discours demain dans un grand théâtre de La Havane, devant les caméras de la télévision cubaine. Désireux de donner des gages à ses concitoyens, M.Obama a aussi obtenu de pouvoir rencontrer des dissidents demain, et prévenu qu'il évoquerait «directement» les droits de l'Homme lors de ses entretiens aujourd'hui avec Raul Castro, qui a succédé à son frère Fidel voici presque 10 ans. A La Havane, si l'effervescence est palpable, beaucoup de Cubains ayant grandi pendant la guerre froide, bercés par les envolées anti-impérialistes de Fidel Castro, peinent encore à réaliser que l'impossible va se produire. «Un président des Etats-Unis à Cuba (...) probablement accueilli avec des sourires, des applaudissements et des groupes musicaux! Jamais dans nos rêves ou nos cauchemars nous n'imaginions voire quelque chose de tel de notre vivant», confie le célèbre écrivain Leonardo Padura, 60 ans, dans le blog d'informations Cafefuerte. En revanche pas de rencontre prévue entre Barack Obama et le lider Maximo, 89 ans, si l'on en croit la Maison Blanche. Si les médias cubains n'ont pour l'instant pas accordé une très large couverture à cette visite, les drapeaux américains ont fleuri ces derniers jours dans les rues de la capitale. «Bien-sûr qu'on lui souhaite la bienvenue!», clame Reinaldo Peres, serveur de 42 ans dans le centre de La Havane. «Je pense qu'il devrait emménager ici, Donnez-lui une maison!», rigole-t-il, illustrant l'important capital de sympathie dont jouit le président américain à Cuba. Toutefois, malgré l'engouement entourant cette visite longtemps impensable, l'embargo reste en place et les changements espérés par Washington pourraient tarder à se concrétiser. Jeudi, le ministre cubain des Affaires étrangères a rappelé, dans une allocution pleine de fermeté, que La Havane n'était pas disposée à «renoncer à un seul de ses principes (...) pour avancer vers la normalisation».