La décision de Ben Bella de rejoindre la Commission nationale de l'amnistie générale (Cnag) est hautement symbolique. Le premier président de l'Algérie post-indépendance, en cautionnant publiquement la démarche réconciliatrice du chef de l'Etat, semble vouloir dire clairement qu'il faut regarder vers l'avenir et tourner la page du passé. Emprisonné après le «redressement» de Boumediène puis exilé après sa libération, Ahmed Ben Bella, qui a un long parcours historique, semble convaincu par le projet du président Bouteflika de réconcilier les Algériens avec eux-mêmes. En acceptant d'être président d'honneur de la Cnag, une structure née le 2 décembre 2004, Ben Bella, qui jouit d'une grande estime dans plusieurs pays arabes, sera d'un grand «apport» dans la campagne de sensibilisation du projet présidentiel. L'homme est né le 25 décembre 1916 à Maghnia. Il adhère au PPA-Mtld dès 1945. en 1949, en compagnie de Hocine Aït Ahmed et Rabah Bitat, il participe en tant que responsable de l'Organisation spéciale (OS) à l'attaque de la poste d'Oran. Il sera arrêté à Alger et sera condamné à 7 ans de prison ferme. Après son évasion de prison, il rejoint Hocine Aït Ahmed et Mohamed Khider au Caire (Egypte) avec lesquels il formera plus tard la délégation extérieure du Front de libération nationale. Après avoir été gracié en 1980 par le président Chadli, il rejoint l'opposition à l'étranger. Le 29 septembre 1990, à la faveur du multipartisme, il fonde en France le Mouvement pour la démocratie en Algérie (MDA). Les récentes sorties médiatiques de Ben Bella, notamment sur la chaîne Qatarie El Jazeera, étaient plutôt en faveur de la politique prônée jusqu'ici par Bouteflika. Il réitéra plusieurs fois son soutien à l'initiative d'une amnistie générale. «Ceux qui appellent à la division représentent un danger pour le pays et ceux qui déclarent qu'il faut terroriser les terroristes ne sont pas responsables», avait clamé l'ex-président algérien, en marge d'une rencontre consacrée à la commémoration de la disparition du moudjahid Mohamed Belouizdad. Cette déclaration d'Ahmed Ben Bella résume globalement sa vision de l'initiative présidentielle. A 88 ans, malgré le poids des années, l'ancien révolutionnaire propose encore de servir et de ne pas être à l'écart de ce qui se trame au sein du pays. Il estime que l'amnistie générale est le seul moyen pour les Algériens de s'en sortir définitivement en pansant leurs blessures. Il faut noter que le bureau national de la Commission nationale de l'amnistie générale (Cnag) est composée de 25 membres. Des députés ainsi que des personnalités figurent également parmi les membres. Pour le moment, cette commission n'a pas de caractère officiel, c'est du moins ce qu'affirme son président Abderazak Smaïl. D'après des sources proches de cette organisation, plusieurs autres personnalités qui sont restées jusque-là à l'écart de la vie politique, seraient sur le point de rallier à titre «honorifique» la commission. Ces personnalités, dont les noms ont été tus pour l'instant, seraient convaincues de ce projet d'amnistie générale. Les expériences des autres pays dans ce domaine, qui ont recours à ce genre de «pardon» pour réinstaurer une paix durable, sont autant de raisons, semble-t-il qui ont convaincu beaucoup de gens qui étaient dans un passé très récent, très réticents, voire opposés à oublier aussi facilement la décennie sanglante. Ahmed Ben Bella et peut-être encore d'autres hommes de sa «trempe», en épaulant Bouteflika dans sa voie de réconciliation, apportera-t-il enfin la paix, la confiance, la vie tout simplement dans un pays plusieurs fois meurtri? Pourquoi pas...?