Cet emballement pour l'éducation est accompagné par une lame de fond islamiste qui s'attelle à torpiller l'élan de Benghebrit Cet engouement intervient au moment où la ministre Benghebrit est la cible d'attaques féroces venant des islamo-conservateurs. Qu'y a-t-il de si attractif dans le secteur de l'Education nationale qui observe un raz-de-marée de candidatures? Près de 4 millions de candidats vont concourir pour 28.075 postes selon la ministre Nouria Benghebrit. Fellag s'est trompé dans sa pièce de théâtre intitulée «Tous les Algériens sont des mécaniciens». L'humoriste algérien qui délirait sur les moeurs sociopolitiques de la société algérienne n'a-t-il pas senti cette mutation profonde? Tout en pratiquant la mécanique comme distraction, les Algériens veulent aussi devenir des enseignants. Noble métier. Cependant, un nombre aussi élevé de demandes ne prête pas seulement à la jubilation. Il charrie en filigrane un flot de questionnements sur nos diplômés universitaires. Le chiffre renseigne d'abord, sur le nombre de chômeurs appartenant à cette frange de la population. Au moins 2 millions d'entre eux sont de potentiels chômeurs, ce qui est déjà énorme. Ensuite, il y a lieu de s'interroger sur les vraies raisons de cet engouement. Les diplômés algériens ne sont-ils pas satisfaits dans leurs postes de travail respectifs? Les entreprises qui les emploient ne leur donnent-elles pas plus de perspectives? Ou alors est-ce que l'éducation offre des avantages plus attractifs que les autres secteurs? Il serait également intéressant de connaître des détails sur les prétendants à ce concours. Souvent, c'est la gent féminine, les filles, qui a un penchant pour le secteur de l'éducation et cela pour plusieurs raisons dont la flexibilité des emplois du temps et les vacances prolongées. Il ne faut pas perdre de vue aussi que depuis ces dix dernières années, les diplômés universitaires sont constitués à près de 60% de filles. C'est un immense champ d'études statistiques qui s'ouvre à travers ce chiffre de 4 millions. La ministre de l'Education a expliqué que les réponses aux demandes de participation à ce concours seront communiquées par Internet. Elle précise également que le retrait des convocations est fixé pour le 20 avril prochain. Quant aux résultats, ils seront rendus publics sur le Web, à partir du 30 juin prochain. Un grand challenge pour le ministère de l'Education nationale de faire inscrire une population de 4 millions de personnes sur un territoire aussi vaste que l'Algérie sans le moindre couac. Un bel exercice de répartition avant l'examen du bac qui interviendra dans deux mois, mais aussi une belle démonstration de l'utilisation et de la maîtrise de l'outil informatique dans la gestion d'un secteur dont le nombre de personnes est estimé à presque celui d'un pays comme la Tunisie! Cet emballement pour l'éducation est accompagné par une lame de fond islamiste qui s'attelle à torpiller l'élan de Benghebrit. Jamais l'Ecole algérienne n'a été au centre des tiraillements comme elle l'est actuellement. La ministre de l'Education fait face à une campagne d'une rare virulence orchestrée par les islamistes. Après l'avoir accusée d'être de descendance juive, de vouloir enseigner la «daridja» au détriment de l'arabe classique, voilà qu'on l'accuse «d'offrir l'école aux experts français»! La dernière salve contre cette Dame est venue de l'association des Oulema algériens qui a lancé un appel à la nation «menacée par les nouveaux programmes de l'Education nationale». Un large spectre composé de baâtistes, d'islamistes et de conservateurs se liguant tous contre Nouria Benghebrit qu'ils désignent à la vindicte. L'expérience nous a montré que le gouvernement a souvent reculé face à ces combats d'arrière-garde. Aussi, il ne s'agit plus d'attendre à ce qu'il mette le holà pour ces attaques saisonnières qui tirent l'école vers les chemins de la régression et de l'obscurantisme, mais de savoir quand cette «Merkel algérienne» sera-t-elle lâchée?