Tayeb Belaïz, l'envoyé spécial en Arabie saoudite du président Bouteflika Dans sa missive, le président Bouteflika a rappelé au souverain saoudien la position de l'Algérie de non-ingérence dans les affaires internes des autres pays: c'est un principe immuable. Quand Tayeb Belaïz, ministre d'Etat, conseiller spécial auprès du président de la République, a tendu, avant-hier, la lettre de Bouteflika au roi d'Arabie saoudite le rideau est tombé sur la première phase des relations entre Alger et Riyadh. Le roi Salmane Ben Abdelaziz Al Saoud ne peut plus se suffire de déclarations, il a maintenant la preuve écrite qui doit guider la suite des relations entre les deux pays. Sans équivoque, ni langue de bois, le président Bouteflika a rappelé au roi les positions de l'Algérie vis-à-vis de certaines questions sensibles que connaît la scène arabe. Ces positions tiennent à un principe immuable «sous-tendues par son legs historique quant à la non-ingérence dans les affaires internes d'autres pays». Le président Bouteflika a souligné que «cela ne doit pas être perçu comme une opposition à des partenaires arabes». Pour éclairer davantage la lanterne du roi, Bouteflika ajoute que «les positions de l'Algérie, émanent de ses Constitutions qui interdisent le déploiement des forces armées algériennes hors les frontières du pays». Mieux encore, le président a rappelé, par le truchement de son conseiller spécial, que l'Algérie «s'interdit toute ingérence dans les affaires internes des pays et des peuples et privilégie toujours les solutions politiques pacifiques, tout comme elle rejette la violence qui n'engendre, de son point de vue, que la violence». «L'Algérie favorise toujours le règlement des problèmes dans le cadre des canaux internationaux à l'instar de l'ONU», a encore soutenu le président Bouteflika. C'est cette constance dans la politique extérieure algérienne qui n'obéit pas à la diplomatie du chéquier qu'a expliquée de vive voix Tayeb Belaïz. Le message semble avoir été bien reçu puisque le roi saoudien a répondu favorablement à l'invitation que lui a adressée le président Bouteflika pour une visite en Algérie. Allah est grand! L'Algérie n'a pas négocié ni remis en cause ses principes de non-intervention et de non-ingérence comme rappelés dans la lettre du président Bouteflika.. En revanche, on décèle comme une volonté du Royaume d'Arabie saoudite d'apaiser les tensions avec l'Algérie. Est-ce un sentiment d'encerclement croissant qui explique ce ramollissement de la position saoudienne envers l'Algérie alors qu'il y a quelques mois à peine, le ton était au bellicisme? Avec les fissures, depuis 2013, au sein du Conseil de coopération du Golfe (CCG), les inquiétudes de l'Arabie saoudite ont augmenté. Le royaume a peur de l'effondrement des prix du baril de pétrole, il a peur d'autres révoltes arabes, il a peur d'une faillite à la suite d'une année de guerre sans résultats au Yémen, et il a peur du retour fracassant de l'Iran sur la scène internationale, son ennemi juré. Sur la carte du Moyen-Orient, l'Arabie saoudite est encerclée de partout. Et l'Iran hante ses cauchemars. Téhéran déploie une stratégie internationale active et efficace forge des alliances qui basent sur l'interêt, avec des Etats et gouvernements, qu'ils soient laïques ou libéraux. L'Iran appuie le régime syrien, au Yémen, il arme les rebelles Houthis, au Liban il tend la main au Hezbollah. Au Bahreïn, il pousse les chiites à se rebeller contre le roi, un allié fidèle. Et le royaume dans tout ce paysage incapable de mener une offensive proprement politique et diplomatique. Sa seule force dissuasive se résume à la signature des chèques. Avec les temps des vaches maigres qui s'annoncent, la peur de l'Arabie saoudite est justifiée. Car s'il faut décrypter les enjeux du moment, il est simple de conclure que le royaume des al Saoud n'est plus cette pièce indispensable au puzzle moyen-oriental. Au moindre frémissement il sera sacrifié sur l'autel de la realpolitik dont les premières prémices ont été données par le rapprochement américano- iranien.