Un diplomate de terrain Abdelkader Messahel a été dépêché dans les capitales syrienne et libyenne pour défendre une autre solution que celle préconisée par certaines grandes puissances. Après un séjour en Libye où il a confirmé la réouverture de la représentation diplomatique algérienne à Tripoli, le ministre des Affaires maghrébines, de l'Union africaine et de la Ligue arabe s'envole aujourd'hui pour Damas, pour une visite de travail marquant l'intérêt d'Alger pour une solution négociée aux conflits dans le Monde arabe. Abdelkader Messahel qui sera le premier chef de la diplomatie de la Ligue arabe à fouler le sol syrien depuis le début de la guerre dans ce pays, a été également le premier à visiter la Libye depuis l'installation du gouvernement d'union nationale à Tripoli. Les observateurs de la scène arabe traduisent cette démarche de l'Algérie qui consiste à agir dans le sens de sa politique, sans attendre le feu vert de quelque capitale que ce soit, comme une détermination à peser sur le cours des événements en privilégiant le principe du dialogue et de la négociation pour gérer les crises. Une position qui a été exprimée par Ramtane Lamamra à New York et respectée par l'ensemble des populations actuellement soumises aux bombardements. Un autre Algérien, Lakhdar Brahimi, a également défendu cette thèse en tant qu'envoyé spécial de l'ONU pour le conflit syrien. La récente visite du ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Al-Moallem, à Alger, première destination du diplomate après la libération de la ville de Palmyre, traduit, au besoin, toute l'importance qu'accorde ce pays pour l'approche algérienne de la gestion du conflit qui mine son pays. Et plus encore, cette visite qui était intervenue dans un contexte régional tendu où l'Arabie saoudite cherchait à isoler le régime de Damas et obligeait l'ensemble des Etats arabes à s'en tenir à sa stratégie, cassait l'image d'un régime abandonné par la communauté internationale. En s'affichant comme non partisan de l'effondrement de l'Etat syrien, Alger travaille dans l'intérêt du peuple de ce pays et pour ce faire, croise le fer avec les monarchies du Golfe au sein de la Ligue arabe et devant les instances onusiennes. Cette visite montre donc une grande indépendance d'action de l'Algérie et surtout sa détermination à ne pas laisser le terrain libre aux va-t-en-guerre. Si Abdelkader Messahel a été dépêché dans les capitales syrienne et libyenne, c'est justement parce que l'Algérie croit fortement à une autre solution que celle préconisée par certaines grandes puissances. A Alger on est certes conscient de la difficulté de la tâche, mais dans le même temps, les diplomates algériens sont mus par une conviction que la sauvegarde des intérêts de l'Algérie passe par le rétablissement de la paix dans l'ensemble des pays touchés par le printemps arabe. La renaissance d'une nouvelle solidarité inter-Etats, après les drames subis par les peuples est la seule alternative face au plan américain du Grand Moyen-Orient. Le déploiement d'Alger intervient, faut-il le souligner, à un moment où un peu d'espoir renaît dans les dossiers libyen et syrien. En Libye, les Occidentaux ont compris l'intérêt d'une réelle stabilité de ce pays, au risque de se voir envahis par des vagues de migrants. Pour la Syrie, la nécessité de stopper la progression du monstre Daesh impose là aussi un changement d'attitude des pays occidentaux vis-à-vis de Damas. L'objectif est d'aboutir à une «Pax Syriana». Deux conjonctures plutôt favorables pour faire triompher le dialogue, mais aussi pour reconstruire une solidarité mise à mal par l'interventionnisme des pétro-monarchies et les stratégies occidentalo-sionistes. Diplomate de terrain, Abdelkader Messahel est en charge d'une mission très lourde et historiquement stratégique. Elle aura pour effet de distinguer l'Algérie comme le porte-flambeau d'une vision rénovée de la nation arabe, qui ne soit pas assujettie au diktat de l'impérialisme mondial. Le propos est peut-être pompeux, mais souvenons-nous que la diplomatie algérienne a réussi des actions inimaginables, lorsque des sujets avaient été mis sur la table du Conseil de sécurité. Cela dit, l'initiative algérienne, qui bénéficie d'un préjugé positif de la part des pays concernés d'abord, mais aussi de nombreuses capitales qui ne voient pas d'un mauvais oeil la fin de conflits qui, si on n'y prend pas garde, déborderont sur l'ensemble de la planète. Mais d'un autre côté, les forces qui tirent dans le sens contraire à celui de l'Algérie tenteront sans doute d'user de tous les moyens pour freiner la dynamique. L'arme du pétrole, de la dette et du dénigrement des classes dirigeantes, seront certainement utilisées, si elles ne le sont déjà, à voir la déprime du marché pétrolier et les campagnes ciblant les institutions de l'Etat algérien. 2e session du Comité de suivi algéro-syrien Le ministre des Affaires maghrébines, de l'Union africaine et de la Ligue arabe, Abdelkader Messahel, effectue à partir d'aujourd'hui une visite de travail en Syrie, où il conduira la délégation algérienne à la réunion du Comité de suivi algéro-syrien, a indiqué hier, un communiqué du ministère des Affaires étrangères. La visite sera marquée par la tenue de la 2e session du Comité de suivi qui sera coprésidée par M.Messahel et le ministre syrien de l'Economie et du Commerce extérieur, Hammam El-Jazairi, pour examiner les différents aspects de la coopération bilatérale et les moyens de la promouvoir, ajoute le communiqué. Lors de cette rencontre, M.Messahel aura des entretiens avec de hauts responsables syriens sur la situation prévalant dans la région et les développements régionaux et internationaux d'intérêt commun.