Et ça repart... Les élèves conscients du dilemme face auquel se trouve le ministère de l'Education nationale crient leur colère contre les instigateurs de leur malheur. Fuites des sujets au bac: le gouvernement a décidé d'organiser une session partielle pour refaire les examens touchés par la fraude. Syndicats, enseignants, hautes autorités du pays, et même partis politiques... ont tous donné leur avis sur la question sauf... les principaux concernés, à savoir les candidats. Qu'en pensent-ils? Sont-ils favorables à une deuxième session, une session partielle ou autre chose? N'ont-ils pas d'avis sur la question et acceptent-ils cette fatalité? En fait, il suffit de faire un petit tour sur leur terrain de prédilection pour connaître leurs positions qui s'apparentent plus à de la colère qu'à des commentaires! «C'est toujours nous qui payons les pots cassés. On est les dommages collatéraux. Ils veulent détruire la ministre et ils détruisent notre avenir au passage», écrit Chafik, un jeune candidat au bac, sur sa page en utilisant l'émotion en colère. Quelques secondes après son post, une déferlante de commentaires s'ensuivit de la part de ses camarades tout autant en colère. Ils sont plus «acides» que Chafik, se rapprochant même de l'insulte et l'invective. Mais cela témoigne de la détresse de ces jeunes dont beaucoup n'ont pas atteint la majorité et se retrouvent plongés dans une histoire trop «grosse» pour leurs frêles épaules qui ont déjà subi le stress d'une année scolaire des plus chargées! «Pourquoi suis-je obligé de refaire mon bac. Je n'ai pas copié, je ne veux donc pas payer pour les autres», nous répond Lyna de Tizi Ouzou rencontrée à un forum de lycéens qui est plutôt devenu un forum de la révolte. «Nous demander de refaire maintenant, c'est comme demander au Real Madrid de rejouer la finale de la Ligue des Champions. C'est impossible», affirme Aghiles rencontrée sur le même forum. «Notre esprit est en vacances. On a relâché toute la pression accumulée durant l'année. Il est quasi utopique que l'on puisse se remettre dans le bain. Ça sera la vraie catastrophe pour nous, je ne me fais pas d'illusions si cette décision de refaire partiellement le bac est maintenue je suis sûr de le rater», ajoute celui qui se présente comme un bon élève qui a cartonné lors de la session ordinaire. Toute l'Algérie est perturbée Mais la bêtise humaine risque de tout remettre en cause. «C'est de l'injustice», peste Feriel, lycéenne qui passe son temps sur les réseaux sociaux pour s'informer des nouvelles concernant cet examen qui les tient en haleine. «Si je le rate alors que dans la première session je l'ai eu sans recourir aux sujets qui ont fuité, on va me dire que c'est le Mektoub? Non, je n'accepterais jamais un tel abus», soutient-elle en envahissant toutes les pages Facebook qui parlent du sujet. D'ailleurs, le bac n'occupe pas que les discussions des réseaux sociaux. Dans la rue, dans les cafés ou dans les foyers, même ceux qui n'ont pas un enfant qui passe cet examen, on ne parle que de cela. Chose inédite dans le pays, il a même réussi à faire oublier le Ramadhan et ses préparatifs et même... la coupe d'Europe de football. Pour dire à quel point cela inquiète toute la société. On peut apercevoir les jeunes lycéens dans les cafés ou sur les abords des ruelles en train de se tenir la tête et à réfléchir sur ce qui venait de leur tomber sur la tête. De même pour leurs parents, visages défaits, ils ne savent pas comment aider leurs enfants! «Le bac en lui-même est stressant. Le passer deux fois, c'est encore plus stressant. Alors dans ces conditions c'est quasiment mortel», estime Mohamed, un père de famille désemparé. Son fils, Amine, ne veut rien savoir. «Je ne passerai pas cette deuxième session», dit-il les larmes aux yeux. Il y a aussi des heureux... Il nous affirme que les lycéens sont en train de s'organiser pour gagner la rue. Chose que nous confirmons chez d'autres lycéens et sur les réseaux sociaux. «On va sortir manifester contre cette décision unilatérale qui a été prise sans notre consentement et sans nous avoir pris en considération. Ils veulent liquider la question le plus rapidement possible quitte à nous sacrifier...», témoigne Fouad qui se dit l'un des instigateurs de cette marche dont la date n'est pas encore fixée mais qui devrait avoir lieu au courant de la semaine prochaine. Néanmoins, même si beaucoup d'élèves rencontrés sont contre cette session partielle, d'autres sont au contraire favorables, notamment ceux qui ont raté leurs examens ou qui ont été exclus pour cause de retard. Ces derniers voient même la chose comme un miracle divin qui leur permet de régler une injustice. C'est une seconde chance qui leur tombe du ciel, comme d'ailleurs ceux qui sont passés à côté de leurs examens. «Je suis heureuse qu'il y ait cette deuxième session même si j'aurais voulu qu'elle soit orale. Mais c'est une chance pour moi qui ai complètement raté mon épreuve de mathématiques», souligne Sara d'un air des plus soulagés. Madani est de son côté favorable à cette idée par dépit. «Je sais qu'on sera bel et bien obligés de repasser cet examen. Il ne sera jamais validé avec autant de sujets qui ont fuité. Alors je préfère que ce soit maintenant que plus tard dans l'espoir que le ministère soit plus clément avec nous au vu de la situation dont on n'est nullement responsable...», conclut-il en résumant parfaitement le dilemme face auquel se trouvent les élèves et le ministère de l'Education à cause de l'inconscience de quelques personnes aux motivations encore inconnues...