Le débat est désormais sur la place publique Le nouveau texte de loi doit prendre en compte la pénibilité de certains secteurs d'activité (chemins de fer, mines, bâtiment, Protection civile...) et faire l'objet d'un consensus entre partenaires sociaux (syndicats, patronat) et gouvernement. Il aura fallu une déclaration du Premier ministre pour que l'opinion s'empare du sujet. Abdelmalek Sellal avait annoncé, le 5 juin dernier, un nouveau projet de loi qui modifierait l'ordonnance 97-13 autorisant le départ à la retraite sans condition d'âge. Le débat est désormais sur la place publique. Et c'est tant mieux car il aura à clarifier certaines zones d'ombre et à ouvrir un autre chantier de réformes. Celui des retraites qui couronne la fin de parcours de tout une carrière professionnelle. Une nouvelle vie qui dépendra du système de solidarité qui sera mis en place. Il doit garantir l'avenir de la Caisse nationale des retraites dont la mission essentielle qui lui est confiée est de le pérenniser. Il n'y a donc pas de raison pour que l'Algérie qui a opté pour un nouveau modèle de croissance économique de s'affranchir de sa dépendance aux hydrocarbures ne lance pas le chantier nécessaire pour la réforme de son système de retraite qui serait adapté à la conjoncture économique actuelle. Tout en faisant preuve de plus de justice sociale, une empreinte que porte l'Etat algérien depuis l'indépendance. Car si la majorité des salariés bénéficient des mêmes droits (assurance sociale, allocations familiales, congés payés...) ils ne sont par contre pas tous égaux en matière d'exercice de leur fonction. Ils ne sont pas confrontés aux mêmes conditions exigées par leur métier. Certains ont rejoint le monde du travail très jeunes, d'autres ont exercé leur profession dans des situations extrêmement éprouvantes tout en étant exposés à un certain type de maladies (la silicose, par exemple, une maladie pulmonaire provoquée par l'inhalation de poussière de silice et de charbon que contractent les travailleurs des mines). Le nouveau texte de loi doit donc prendre en compte tous ces aspects ainsi que la pénibilité qui caractérisent certains secteurs d'activité (chemins de fer, mines, bâtiment...) et faire l'objet d'un consensus entre partenaires sociaux (syndicats, patronat) et gouvernement. Il est certainement temps de dépoussiérer l'ordonnance 97-13 qui autorise le départ à la retraite sans condition d'âge. La toute puissante Fédération nationale des travailleurs retraités qui défend les intérêts de près de 2 millions de travailleurs retraités (Fntr) a déjà mis les pieds dans le plat. «La Fntr propose de prendre en compte les travailleurs des professions pénibles dans certains secteurs d'activités», a indiqué son secrétaire général, Smaïl Boukris qui a souligné la nécessité de permettre à ces catégories de travailleurs de bénéficier de leurs pensions de retraite dès l'âge de 55 ans, «en raison précisément de la pénibilité de leur carrière professionnelle». Toutes les grandes nations ont adapté leur système de retraites aux réalités économiques et démographiques d'aujourd'hui. L'espérance de vie n'est plus ce qu'elle était autrefois. Il est donc normal de travailler plus longtemps à partir du moment où l'on vit plus longtemps. Pourquoi en Algérie ferait-on exception? Des départs massifs en retraite anticipée sans qu'il ne soit mis de garde-fous à cette mesure mettraient à coup sûr la trésorerie de la CNR (Caisse nationale des retraites) en péril. Ils représentent surtout un sérieux danger pour la pérennité de ce système de solidarité intergénérationnel que symbolise la retraite. Moins de travailleurs qui y cotisent la fragiliseraient davantage. Et puis quitter le navire au moment où il est demandé plus de bras pour le mener à bon port, la nouvelle orientation économique qu'ont décidé d'imprimer les pouvoirs publics au pays pour le sortir de son addiction à l'or noir signifierait carrément son échec garanti. «L'avenir de la pérennité des caisses de retraite est lié à un nouveau modèle de croissance créant de la valeur, dont les sous-segments sont une nouvelle politique de l'emploi, de la gestion de la sécurité sociale et de la fiscalité.» souligne Abderrahmane Mebtoul, professeur des universités et expert international. Créer de la richesse c'est aussi mettre les mains dans le cambouis le temps qu'il faut. Un trait de caractère des sociétés développées...