La crise du logement touche toutes les grandes villes algériennes et n'est pas l'apanage d'une couche sociale donnée. La crise du logement en Algérie, qui ne date pas d'aujourd'hui, a toujours été une source de mécontentement populaire. La dernière décennie noire a montré combien un fléau social peut être utilisé comme revendication politique. La détérioration du climat économique et social durant les années quatre-vingt a constitué un terreau fertile au développement d'une pensée radicale qui s'est matérialisée par l'insurrection de 1992. Aujourd'hui encore, la crise du logements est omniprésente. Pour y remédier les pouvoirs publics viennent de lancer un ambitieux programme de construction d'un million de logements à réaliser au cours du second mandat présidentiel d'Abdelaziz Bouteflika. Ce projet, en tant qu'idée selon les observateurs, est très intéressant dans la mesure où il aidera à résorber le problème du logement dans notre pays. En outre, le projet a suscité un espoir chez les Algériens de moyenne couche. Cependant force est de constater que la joie n'aura duré que le temps de l'émotion. Quant à sa concrétisation, elle dépend de plusieurs facteurs dont celui de la rigueur et de la transparence. La construction d'un million de logements n'est pas une mince affaire et exige des sommes colossales et des moyens adéquats. Sur ce chapitre, les propositions du président-sortant du Collège des architectes, M.Boudaoud, sont éloquentes à plus d'un titre. Selon ce dernier, la première chose à faire est de créer un commissariat national de l'habitat dirigé par la présidence. Cet organe aura pour mission le déroulement du projet. Il doit également être muni d'un site web lequel sera alimenté par des informations fiables relatives à ce projet. «Pour que tout le monde suive l'évolution du projet» a-t-il déclaré. Autres critères exigés par les experts pour la concrétisation du «défi» d'un million de logements: la mise à niveau des entreprises et leur spécialisation dans le gros oeuvre notamment. «Ce qui manque à nos entreprises, c'est l'organisation du travail, la logistique et l'ingénierie», explique M.Boudaoud. Or la dernière sortie du premier argentier du pays a fait l'effet d'une douche froide. «Quand on sait qu'aucune entreprise nationale de bâtiment n'est capable, de construire 5000 logements de qualité, on peut dire qu'il y a beaucoup de travail à réaliser», a asséné, mardi, Abdelatif Benachenhou, ministre des Finances, aux hommes d'affaires français accompagnant la délégation du Medef. Ce qui contredit les propos d'Ahmed Ouyahia, chef du gouvernement, tenus en marge du 3e salon méditerranéen de l'immobilier ( 20 au 25 mars 2004) quand il affirmait: «La crise de logement sera réglée d'ici 2010» et a assuré que «les capacités de réalisation dans les secteur du bâtiment en Algérie sont importantes». Le chef du gouvernement avait même reconnu qu'il existe des capacités «réelles» et «avérées» dans le secteur du bâtiment qui a connu un saut qualitatif et quantitatif, notamment ces cinq dernières années où d'importants chantiers ont été réalisés grâce, entre autres, avait-il rappelé, au soutien de l'Etat et à la contribution des banques à travers l'encouragement du crédit immobilier. Ainsi à en croire les propos cartésiens de Benachenhou, une bonne partie des Algériens continuera à connaître la précarité en dépit des promesses. Apostrophé sur le foncier industriel et les procédures d'accès, le ministre des Finances, même s'il affirme qu'il n'y a pas, en réalité, de problème de disponibilité de foncier industriel en Algérie, reconnaît avec regret «une mainmise d'entreprises publiques et privées sur le foncier», tout en assurant que le gouvernement allait «dégeler» ce problème récurrent. M.Benachenhou a parlé de «déstockage progressif» des terrains industriels et «de fluidité à l'accès à ces terrains». Sur sa lancée, M.Benachenhou a qualifié d' «inacceptable» la répartition actuelle du foncier industriel en Algérie. Cependant, et pour donner du change aux patrons français, M.Benachenhou a tenu à souligner que cette question est au centre des préoccupations des autorités algériennes à un point tel, a-t-il dit, que «des directives fermes seront données aux entreprises ayant des terrains excédentaires pour qu'elles les restituent au domaine public». Afin d'étayer ses propos, le grand argentier du pays a cité en exemple certaines entreprises publiques disposant de 1380 ha inexploités près d'Alger.