Thomas Bach, le président du Comité international olympique Il sera sans doute difficile pour le Comité international olympique (CIO) de ne pas prendre des sanctions exemplaires contre la Russie face à l'ampleur des révélations du rapport du juriste canadien Richard McLaren avant-hier. La Russie sera-t-elle aux JO de Rio? Même la presse russe ne semblait plus y croire hier matin, à quelques heures de la décision de la commission exécutive du CIO, réunie en urgence après les révélations du rapport McLaren sur le «dopage d'Etat» russe, avec l'aide des «magiciens» des services secrets. «Le rapport de l'Agence mondiale antidopage (AMA) a rendu la disqualification de la Russie très probable», écrit le quotidien Kommersant, «La Russie a déjà perdu les Jeux», selon le site d'information Gazeta.ru., «Ce n'est qu'une question d'heures avant que le sport russe ne soit suspendu», pour Sport Express, selon lequel «le rapport McLaren est équilibré, pensé et pas malveillant». De fait, il sera sans doute difficile pour le Comité international olympique (CIO) de ne pas prendre des sanctions exemplaires contre la Russie face à l'ampleur des révélations du rapport du juriste canadien Richard McLaren avant-hier. Et les appels à une exclusion totale de la Russie se multiplient, dans le sillage de la demande initiale des agences antidopage américaine et canadienne. «Le dopage d'Etat en Russie mérite une sanction exemplaire», assure en tout cas le quotidien espagnol El Mundo, alors que le LA Times pense lui que «le CIO est sur le point de prendre une décision historique». Seul le Global Times chinois est en décalage avec cette quasi-unanimité de la presse mondiale mardi, en estimant qu' «exclure la Russie ternirait l'esprit olympique». Même le curling touché Dopage d'Etat organisé depuis 2011 et jusqu'en 2015, résultats de contrôles antidopage falsifiés, échantillons positifs des JO d'hiver de Sotchi 2014 escamotés par une «trappe à souris» avec l'aide d'un agent du FSB: le rapport McLaren a décrit par le menu la façon dont la Russie trichait depuis des années. Depuis 2011, la Russie a notamment organisé sur son sol, en plus des JO-2014 d'hiver, les Championnats du monde d'athlétisme (2013), ceux de natation (2015) et d'escrime (2014 et 2015). Et le dopage n'a pas touché que l'athlétisme, sport dans lequel la fédération russe (Araf) est d'ores et déjà suspendue des Jeux de Rio, en attendant d'ici jeudi un désormais très hypothétique repêchage de certains athlètes russes, à titre individuel, par les magistrats du Tribunal arbitral du sport (TAS) de Lausanne en Suisse. Le texte évoque ainsi 30 sports, dont l'haltérophilie, la lutte, le canoë, le cyclisme, le football, et même le curling... Alors, le CIO va-t-il exclure totalement la Russie, ce qui serait «l'option nucléaire», selon les propres termes de Dick Pound, l'ancien président de l'AMA? Réponse sans doute hier en fin d'après-midi. Une certitude: Thomas Bach, le président du mouvement olympique, n'a pas mâché ses mots lundi, après la publication du rapport McLaren, en estimant que le «système de dopage d'Etat sécurisé» mis en place par la Russie constitue «une atteinte choquante et sans précédent à l'intégrité des sports et des Jeux olympiques» et en assurant que «le CIO n'hésitera pas à prendre les sanctions les plus strictes possible». Guerre froide sportive L'AMA, qui a commandé au juriste canadien Richard McLaren ce rapport, espère que le CIO va frapper fort. «L'AMA appelle le mouvement sportif à empêcher la participation des sportifs russes aux compétitions internationales, y compris les JO de Rio, tant que (la Russie) n'aura pas réalisé un changement de culture», a-t-elle insisté lundi. Cette sanction, recommandée notamment par le Comité olympique allemand et plusieurs agences nationales de lutte contre le dopage, est également espérée par des représentants des athlètes au sein du CIO, pour qui l'instance internationale joue sa crédibilité. «J'espère que nos leaders auront la volonté et la force de prendre la décision qui doit être prise (...) C'est un moment extrêmement important pour le sport et le mouvement olympique», a prévenu la nageuse zimbabwéenne Kirsty Coventry. Les représentants des athlètes veulent même aller plus loin encore que les JO de Rio: ils voudraient que le CIO exclue également la Russie des JO 2018 de PyeongChang (Corée du Sud), puisque le rapport McLaren met en cause aussi des sports d'hiver comme le patinage, le ski de fond, le biathlon et le bobsleigh. La Russie a bien tenté de réagir lundi soir, en dénonçant «une ingérence dangereuse» de la politique dans le sport et en évoquant le scénario d'une nouvelle guerre froide, sportive cette fois. «Oui, la forme de cette ingérence a changé, mais le but est le même: faire du sport un instrument de pression géopolitique», a indiqué le Kremlin dans un communiqué. Elle a aussi tenté de prendre quelques mesures immédiates, dans l'objectif sans doute de calmer la colère du CIO. Le Kremlin a ainsi tenu compte des recommandations de l'AMA en promettant de suspendre tous «les responsables mis en cause» par le rapport McLaren. La première tête à tomber lundi dans la soirée a été celle du vice-ministre des Sports, Iouri Nagornykh, l'homme-clé du système russe, nommé à l'origine par Vladimir Poutine. C'est lui, selon le rapport McLaren, qui était la cheville ouvrière du système.