Le laisser-aller des caisses d'assurances fait, bon an, mal an, un «trou» de quelque 700 milliards. Plusieurs changements sont intervenus ces derniers jours, et interviendront encore au niveau des postes dirigeants de la Cnas, annonce-t-on de source proche de la tutelle. Révocations, mutations et mises à la retraite sont autant de biais par lesquels la tutelle gère le laisser-aller accumulé dans les centres payeurs, notamment de l'Algérois. Si l'information de la mise à l'écart d'Abdelmadjid Bennacer, DG de la Cnas, a été annoncée à grands fracas, il y a lieu aussi de citer la mise à la retraite de responsables de secteurs ou de grands centres payeurs. A la source de ce remue-ménage, le constat amer fait par le ministre du Travail, M.Tayeb Louh, à propos de la gabegie et du laisser-aller qui règnent dans les centres payeurs (Alger et Boumerdès plus particulièrement) sans que les responsables sur place fassent preuve de quelque bonne intention pour y remédier. Intervenant sur les ondes de la radio, Tayeb Louh avait été très critique vis-à-vis des responsables de la Cnas qu'il était sur le point d'entamer de profonds changements au sein de la direction de la Cnas et dans ses centres névralgiques. Le départ de Bennacer, DG de la Cnas, entraînera dans sa chute beaucoup d'autres, à en croire des sources proches du ministère. Le propos tranchant, acéré, le ministre du Travail ne mâchait pas ses mots: «Un trafic latent de vignettes au sein des Cnas existe à ce jour (...) et lorsque vous êtes annuellement face à des trous de 700 milliards de centimes dus à ce trafic de vignettes justement, on ne peut pas parler uniquement de laisser-aller...». En fait, il n'y a qu'à recenser les cas disciplinaires pour fraude, trafic de vignettes, paiements non justifiés d'ordonnances et trafic de signatures ou d'influence, qui se sont succédé depuis 2.000 dans les centres payeurs de la Cnas pour se rendre compte que le mal est profond et que les réformes doivent toucher les structures en profondeur. Le nombre d'agents licenciés ou mutés est tout aussi révélateur d'une gestion désastreuse, malgré l'avancée notable en matière d'accueil des assurés (tickets par numéro, sièges disponibles, remboursement pendant la demi-journée, etc.). Mais en fait, les lacunes de fond sont demeurées les mêmes et ceux qui s'en mettaient plein les poches et se servaient à satiété n'ont pas été inquiétés pour autant. Le «coup de gueule» de Louh renseigne en fait sur les graves dérives survenues dans les caisses, dans la gestion de l'argent des cotisants et dans «l'omerta des nantis» érigée en pièce-maîtresse d'un établissement de service public qui est en voie de perdre sa crédibilité.