Les très mauvaises prestations fournies reflètent le manque d'organisation et de professionnalisme des transporteurs. Dans la Reine des Zibans, la situation du transport collectif assuré par le privé, marqué par une anarchie apparente, décriée par les usagers et les promoteurs du secteur, n'est pas prête de connaître des améliorations, à cause de l'absence chez les acteurs de la notion du service public. En effet, les jeunes qui ont investi dans le créneau, encouragés dans le cadre de l'emploi des jeunes, ne se soucient guère de servir le public comme il est stipulé dans le cahier des charges auquel ils ont adhéré - leur seule préoccupation, la course au gain, une fin à atteindre par tous les moyens - selon un membre du syndicat des transporteurs privés, «l'anarchie» qui règne est née du souci «de régler le problème du chômage des jeunes par la mise en place de réseaux de transport par minibus». A ses yeux, le métier a été offert à «des non-professionnels qui y ont semé la pagaille», en s'adonnant notamment «à la concurrence déloyale», la multiplication des bus d'occasion injectés dans le secteur, acquis selon la formule de l'importation de véhicules de moins de trois ans, pose le problème de la sécurité des usagers, d'autant que les gérants ne respectent pas la réglementation en vigueur et remplissent leurs bus au-delà de la capacité permise - les surcharges et les rotations incessantes des véhicules contribuent à la dégradation rapide de ces derniers, faute de maintenance ponctuelle. En dépit des sanctions infligées par les agents de l'ordre public, ces gérants obnubilés par l'argent, n'hésitent pas à récidiver. Pour échapper aux contrôles, ils échangent des informations sur les éventuels barrages mobiles des gendarmes - lorsqu'ils sont pris en flagrant délit, ils n'hésitent pas à tenter de corrompre les agents pour récupérer les papiers du véhicule et poursuivre l'activité apparemment assez lucrative. «Si je ne réalise pas une recette journalière de 4000 DA par jour, je ne dis pas que j'ai bien travaillé», avoue un jeune propriétaire de minibus qui fait le chauffeur alors que son associé est le receveur. Pour amasser cette petite fortune, les deux associés qui travaillent sur une ligne assez rentable (Biskra-Sidi Okba) ont recours à une série de subterfuges: ils ne démarrent pas de la station s'ils ne remplissent pas à ras bord le véhicule et uniquement de passagers qui descendent au terminus, c'est que le prix à payer est le maximum. Ce procédé, ils l'utilisent aux heures de pointe, lorsque les stations de bus sont bondées. Ils ne sont pas les seuls à recourir à cette pratique qui pénalise les usagers et ne répondent «qu'aux critères» du patron. Conformément à la réglementation qui affecte les différentes lignes à desservir, les arrêts fixes sont obligatoires pour tous les transporteurs. Néanmoins, les transporteurs privés ne respectent cette réglementation que s'ils sont contraints par la présence d'agents de l'ordre public où s'ils flairent le gain. A propos de lignes, beaucoup de cités où habitent plus de trois mille âmes ne sont pas desservies. Les résidents sont ainsi contraints de faire de longs trajets à pied avant de rejoindre les arrêts de bus. Ces cas sont légion, surtout au Haï de Felliach, Aïn Benoui, Bab El Feteh à Biskra. Outre ces carences, très peu de transporteurs remettent des tickets de bus aux usagers. Ceux qui le font, évitent cependant d'en remettre aux passagers descendant aux arrêts. Ainsi, ils économisent des carnets de tickets entiers, même s'ils feignent de respecter la loi en ne délivrant de titres de voyage qu'aux seuls demandeurs. Certains minibus sans papiers réglementaires, circulent comme si de rien n'était. Le recours à la clandestinité par les propriétaires indélicats de ces bus et minibus, illustre la situation de «clochardisation» du secteur. Les appels des usagers pour un assainissement du transport public dans la Reine des Zibans, pris en tenaille par une faune d'affairistes sans lien avec le service public, se font de plus en plus insistants. Des appels qui semblent être entendus par les autorités qui projettent de mettre en place de nouvelles stations de transport urbain, sécurisées et réglementaires ainsi qu'un nouveau plan de la circulation pour la Reine des Zibans, définissant les lignes de transport à desservir. Un plan d'action longuement attendu mais qui reste tributaire, cependant, de la professionnalisation du métier pour être parfait et répondre aux attentes des usagers qui ne demandent qu'à être transportés dans de bonnes conditions.