Quoique non prévu à l'ordre du jour du Sommet d'Alger, le sujet a accaparé l'attention de tout le monde. Le ministre algérien des Affaires étrangères, Abdelaziz Belkhadem, a animé une conférence de presse durant la nuit de mardi à mercredi dans le but de faire le point sur l'avancée des travaux du Sommet d'Alger. Il semble, au regard de l'état des lieux dressé par ce responsable, que les travaux ont progressé à tous petits pas, ce qui risque fort de retarder ou de reporter à une date ultérieure certains des 16 points inscrits à l'ordre du jour de cette rencontre de 48 heures seulement. Dans une courte déclaration, en effet, le ministre algérien a indiqué qu'à la suite de l'adoption de l'ordre du jour, sans le moindre changement, les débats ont traîné en longueur à propos du financement de la Ligue arabe. Ce sujet, extrêmement préoccupant, avait fait l'objet d'une déclaration musclée de la part du président Bouteflika dans son discours de ce mardi. Toujours est-il que beaucoup d'Etats, loin d'être les plus pauvres de cette ligue, ne s'acquittent pas de leurs redevances, et ne remplissent pas les engagements pris sur le plan financier. Cela a, entre autres, mis en panne plus de 200 projets et résolutions de la Ligue, a tenu à souligner son secrétaire général, Amr Moussa. La question reste posée si la rencontre d'Alger, qui se trouve être la seule à aborder ouvertement le sujet et à tancer les Etats membres, saura mettre un terme à ce laxisme qui risque fort de freiner les velléités de réformes initiées à Alger. Le manque de moyens, notamment financiers, peut freiner les meilleures volontés du monde. Par la suite, les «idées» du leader libyen ont été largement débattues, une fois que Mouammar Kadhafi eut réitéré son idée d'aller vers un Etat uni, dénommé «Israfil», dans lequel la «démocratie» (bien lire démocratie) permettrait la cohabitation entre les peuples palestinien et israélien. Sur ce chapitre précis, du reste, il convient de relever la «mollesse» de la position arabe par rapport aux nouvelles provocations de Sharon, en train d'autoriser des colonies en plein El Qods est, et «refusent ostensiblement la paix juste et durable que lui proposent les Arabes» pour reprendre les propres termes de notre chef de la diplomatie. Au lieu de riposter de manière diplomatique mais musclée, les Arabes préfèrent demander à l'ONU, l'Union européenne et les USA de faire pression sur Israël suivant leur propre «plan de route» en étant certains, à l'avance, que personne ne les écoutera, la politique durable des deux poids deux mesures concernant le Proche-Orient ayant été largement relevée et stigmatisée lors de ce Sommet. Cette forme de laxisme, que l'Algérie ne peut se permettre de combattre à elle seule, serait le prélude à des normalisations en cascade, attendues dès le mois d'avril prochain. Le ministre israélien des Affaires étrangères, sûr de son fait, ne s'est pas gêné d'annoncer que dix Etats arabes ont souhaité normaliser leurs relations diplomatiques avec l'Etat hébreu dans les plus brefs délais. Pour ce qui est du terrorisme, et donc le Gmous, non prévu à l'ordre du jour de ce Sommet, Belkhadem, en réponse à notre question, a confirmé que «ce sujet sera largement abordé et débattu». Il y a fort à parier, comme nous avons pu l'apprendre en coulisses, que «la question figure en bonne place dans la déclaration finale du Sommet». Celle-ci, sur demande de certains chefs d'Etat, aurait même été largement remaniée depuis son adoption, dimanche soir, par les ministres arabes des Affaires étrangères. Notre chef de la diplomatie, pour sa part, se contentera, surtout, de relever que «le plus important est de s'entendre sur la définition du terrorisme, afin qu'il n'y ait plus d'amalgames entre ce fléau transnational et les combats justes de certains peuples pour leur libération et leur indépendance». Pour ce qui est du niveau de représentation au niveau de ce sommet, Belkhadem, sans quitter les limites verbales qu'impose le discours diplomatique, a déploré l'absence d'une dizaine de souverains et chefs d'Etat pour la simple raison que la date du sommet prévu annuellement à calendrier fixe, aurait dû pousser tous les invités à ne pas prendre d'autres engagements. Il ne fait aucun doute, ce disant, que beaucoup de ces «illustres» absents ont une peur-panique des réformes démocratiques que le Sommet d'Alger et en train d'initier, et qui devraient connaître de notables avancées sous «la présidence éclairée d'Abdelaziz Bouteflika», suivant les propos de sources diplomatiques qui ont requis l'anonymat. Les réformes de l'ONU, enfin, feront l'objet de débats assez chauds, surtout que Kofi Annan, arrivé mardi soir, devait présenter ses idées hier matin à la troisième séance à huis clos des chefs d'Etat, en présence de Javier Solana, qui fait office de ministre des Affaires étrangères européen. L'Egypte, qui pèse de tout son poids en vue de décrocher un soutien arabe unanime à sa candidature, n'a quand même aucune chance d'arriver à ses fins. La raison en est toute simple. L'élargissement du Conseil de sécurité à six nouveaux membres se fera suivant des choix continentaux, donc africain, européen, asiatique et américain. La Ligue, en tant que telle, ne peut désigner de candidat puisqu'elle est à cheval entre l'Afrique et l'Asie. Cela n'empêche pas qu'elle aura son mot à dire lors du verdict final, puisque chaque candidature retenue devra recevoir l'aval du vote de l'Assemblée générale onusienne. L'affaire, dès lors, reste à suivre... Il est à relever, pour finir, comme le confirme Belkhadem lui-même, que plusieurs rencontres entre deux, trois ou quatre chefs d'Etat et souverains ont eu lieu en marge de ce sommet. Outre l'Algérie et le Maroc, ces rencontres ont surtout concerné l'Espagne, la Syrie et la Palestine.