Passage obligé selon la Constitution, la déclaration de politique générale sera le test décisif pour le premier responsable de l'Exécutif. Selon des sources ministérielles recoupées, nous apprenons que le chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, aurait l'intention de présenter sa «déclaration de politique générale» devant l'APN, le 16 avril prochain. Cette démarche, comme l'expliquent encore nos sources, s'inscrit en droite ligne des dispositions très strictes contenues dans la Constitution algérienne. Dans sa conférence de presse du 11 mars passé, Ahmed Ouyahia n'avait pas manqué de confirmer qu'il se présenterait bientôt devant l'APN. Loin d'être une simple formalité, la présentation de la politique générale de la part du gouvernement intervient au contraire dans une conjoncture politique toute particulière. Il est question, en effet, avec de plus en plus d'insistance, d'un imminent remaniement gouvernemental, suivant les besoins précis exprimés par le président de la République, désirant appliquer son programme électoral aussi vite que bien. La série d'audiences qu'il a accordées à la quasi-majorité de ses ministres durant les deux mois passés consistait à dresser les bilans de chaque secteur afin d'en situer les défaillances, les manquements, mais aussi les points forts. Ainsi donc, plusieurs secteurs, véritablement à la traîne au moment où ils sont censés représenter le fer de lance de l'accomplissement du programme global de relance économique et de réconciliation nationale du président, auraient été désignés du doigt, et feraient donc partie des départements dont les portefeuilles ministériels changeraient de main à la faveur de ce remaniement. C'est pour cela aussi que le bras de fer feutré qui oppose le FLN à son frère ennemi le RND a connu de nouveaux rebondissements depuis que le premier parti du pays a réussi le pari de se «redresser» et de tenir son congrès réunificateur avant de monter au créneau pour exiger une représentation plus digne de sa force sur le terrain et du nombre de ses élus à travers tout le territoire national. Ouyahia, qui ne jouera quand même pas sur du velours, a, malgré tout, de nombreux atouts à faire valoir, expliquent encore nos sources qui soulignent que la reprise du dialogue avec le mouvement des archs, au moment où plus personne ne s'y attendait, s'inscrit précisément dans la stratégie du chef du gouvernement puisque l'annonce de son parti de rappeler ses élus locaux en Kabylie a fortement déstabilisé ses alliés de la coalition gouvernementale, leur prouvant au passage, que les commandes sont toujours aux mains du RND, revenu de loin depuis sa double déconfiture de 2002, cela à la faveur de la crise qui avait secoué le FLN en prévision des présidentielles du 8 avril passé. Passé maître dans l'art de manier les mots et les lettres, le chef du gouvernement, ajoutent nos sources, a préparé un document quasi inattaquable, même s'il faut s'attendre à ce qu'il soit quand même critiqué par les députés du PT et du mouvement El Islah. L'essentiel pour Ouyahia, en somme, est de se prémunir contre les critiques de ses «alliés» du FLN, lesquels demeurent quand même majoritaires à la chambre basse du Parlement, et sont donc dotés du redoutable pouvoir de faire tomber l'Exécutif. Voilà, en effet, ce que prévoit expressément la Constitution dans son article 84: «Le gouvernement présente annuellement à l'Assemblée populaire nationale une déclaration de politique générale, qui donne lieu à débat sur l'action du gouvernement. Ce débat peut s'achever par une résolution. Il peut également donner lieu au dépôt d'une mention de censure par l'Assemblée populaire nationale, conformément aux articles 135, 136 et 137. Le chef du gouvernement peut demander à l'Assemblée populaire nationale un vote de confiance. Si la mention de confiance n'est pas votée, le chef du gouvernement présente la démission de son gouvernement». L'article, certes, ne s'arrête pas là. En effet, il est expliqué que le président, dans ce dernier cas de figure, peut recourir à l'article 129 de la Constitution pour décréter la dissolution de l'APN. De même que le chef du gouvernement peut aller présenter sa déclaration de politique générale devant le Sénat. Or, le RND est encore largement majoritaire au sein de la chambre haute du Parlement. Ce n'est, du reste, pas le seul des atouts du chef du gouvernement. Il se fait, en effet, fort d'un bilan chiffré jamais égalé, selon lui, depuis l'indépendance du pays. Ainsi, la dette a-t-elle été réduite à 21,4 milliards de dollars alors que nos réserves de change représentent le double de cette somme. Des bilans chiffrés concernant tous les domaines seront également présentés pour montrer, en quelques mots, que ce qui a été réalisé durant les cinq années du premier mandat présidentiel représente environ la moitié de ce qui a été fait depuis l'indépendance de l'Algérie jusqu'à 1999, date d'arrivée de Bouteflika à la présidence de la République. Mais ce qu'Ouyahia compte surtout démontrer, c'est la possibilité d'aller vers des réalisations autrement plus importantes durant les quatre années qui restent, notamment en construisant d'un coup 800.000 logements et en réduisant le taux de chômage au plus simple de son expression. Ainsi donc, si tous les paris sont ouverts, Ahmed Ouyahia a toutes les chances de l'emporter puisque, dans la phase actuelle, personne ne semble en mesure de le supplanter...