Cette polémique fait encore monter les tensions entre Washington et Moscou, à quelques semaines de l'arrivée de Donald Trump au pouvoir. La Maison-Blanche a mis en cause Vladimir Poutine dans les piratages informatiques ayant perturbé l'élection présidentielle et le président Obama lui-même a annoncé des représailles, après ces accusations rejetées comme «indécentes» par Moscou. Barack Obama, qui devait s'exprimer dans la soirée d'hier lors d'une conférence de presse, avant de partir en vacances à Hawaï, devrait être longuement interrogé sur ces cyberattaques qui ont pu avoir une influence sur le scrutin ayant opposé la démocrate Hillary Clinton au républicain Donald Trump. «Il faut soit cesser d'en parler, soit apporter enfin des preuves. Sinon, tout ça est plus qu'indécent», a lancé hier le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov aux journalistes en marge du déplacement du président Poutine à Tokyo. Une certitude, les Etats-Unis ne resteront pas sans réagir, a déjà annoncé le président Obama dans un entretien à la radio NPR qui devait être diffusé hier et dont des extraits ont été rendus publics jeudi soir: «Il est clair que si un gouvernement étranger, quel qu'il soit, tente d'entacher l'intégrité de nos élections, alors nous devons agir», a plaidé Obama. «Et nous le ferons, au moment et où nous le déciderons», a-t-il lâché, en soulignant que «certaines (de ces représailles) seront explicites et publiques, d'autres ne le seront peut-être pas». «Toute une série d'analyses sont encore en cours, au sein des différentes agences (de renseignement)», a précisé M. Obama à l'antenne de NPR: «Quand j'aurai le rapport final, alors nous serons en mesure d'avoir (...) une vraie idée des motivations qui étaient à l'oeuvre derrière tout cela». Si le président Obama n'a pas mentionné Vladimir Poutine dans cet entretien, l'un de ses proches conseillers, Ben Rhodes, l'a fait, jeudi, sur la chaîne MSNBC: «Je ne pense pas que des événements aux ramifications aussi importantes se produisent au sein du gouvernement russe sans que Vladimir Poutine ne soit au courant, (...), en dernier ressort, Vladimir Poutine est responsable des actions du gouvernement russe». De son côté M.Trump a de nouveau insinué jeudi que la Maison-Blanche avait des intentions partisanes en accusant la Russie d'être à l'origine des piratages informatiques contre sa rivale démocrate.«Si la Russie, ou toute autre entité, faisait du piratage, pourquoi la Maison-Blanche a-t-elle attendu si longtemps pour agir? Pourquoi ne se sont-ils plaints qu'après la défaite d'Hillary?», a-t-il écrit sur Twitter. «C'était un mois avant l'élection, cela n'avait rien d'un secret», a pourtant martelé il y a quelques jours Barack Obama dans une interview, en rappelant que ses services avaient publiquement pointé du doigt Moscou le 7 octobre, soit un mois avant le scrutin du 8 novembre. Donald Trump apparaît de plus en plus isolé dans son insistance à épargner Vladimir Poutine, un homme dont il a souvent loué les qualités de leader et avec qui il souhaite réchauffer les relations. Il est extraordinaire que les conclusions des ser- vices de renseignement américains, de la CIA au FBI, soient ainsi rejetées par un futur commandant en chef. Il va ainsi à l'encontre de son propre parti au sein duquel le sentiment antirusse est plus vivace que jamais. Les républicains du Congrès vont d'ailleurs lancer plusieurs enquêtes parlementaires sur le rôle de la Russie dans la campagne américaine. Pour l'ancien patron de la CIA Michael Hayden, Donald Trump est «la seule personnalité américaine à ne pas encore avoir concédé que les Russes ont lancé une grande campagne clandestine d'influence contre les Etats-Unis». Dès octobre, la direction du renseignement américain (Odni) avait estimé que «seuls de hauts responsables russes» avaient pu autoriser ces activités. Puis, après l'élection, un rapport de la CIA avait fuité dans la presse, accusant cette fois directement le pouvoir russe d'avoir délibérément tenté de faire élire Donald Trump contre Hillary Clinton. Des dizaines de milliers de messages de responsables démocrates et du président de l'équipe de campagne d'Hillary Clinton, John Podesta, ont été dérobés puis mis en ligne en 2016, notamment dans le dernier mois avant le scrutin, jetant une lumière crue sur les délibérations internes du camp Clinton et brouillant le message de la candidate. Dans l'entourage de Donald Trump, on assume vouloir un nouveau départ avec les Russes. «Si on peut travailler avec eux sur des projets importants et nécessaires, tels que vaincre le terrorisme islamique (...) ou stopper l'Etat islamique, et si la Russie peut se joindre aux Etats-Unis à cette occasion, nous les écouterons», a expliqué sur Msnbc Kellyanne Conway, conseillère de M.Trump.