Quelque peu tardive, la session extraordinaire de l'Assemblée populaire de wilaya de Béjaïa convoquée hier n'a pas dérogé à la règle, donnant lieu, comme à l'accoutumée, à une large polémique entre les élus. Une polémique qui n'a de valeur que d'illustrer le déphasage réel de la classe politique avec la réalité du terrain. Comme il fallait s'y attendre, les nombreux intervenants sont tombés à bras raccourcis sur la société civile, voyant par là la volonté du pouvoir de substituer par des représentations civiles les élus. Au lieu de saluer toutes les initiatives ayant contribué à l'apaisement de la situation, les élus sont partis en guerre contre une société civile qu'ils disent pourtant représenter. A défaut de chercher des relais à même de leur permettre de peser sur les événements, les élus de l'APW de Béjaïa et à travers eux les formations politiques ont cherché plutôt des boucs émissaires en «le pouvoir et ses relais». La précampagne pour les législatives était mise en marche et les tentatives de récupérations n'ont pas manqué. La Fédération du FFS de Béjaïa a estimé que «la situation que vit la wilaya de Béjaïa est la résultante de divers facteurs tous issus d'une gestion unilatérale et chaotique des affaires du pays». Il en est ainsi du «recours de l'administration aux sages et autres notables», sélectionnés aux yeux du FFS «sur une base arbitraire et des critères connus du seul pouvoir et l'exclusion des élus». Le FFS y voit «une tentative de substitution d'une autre représentation factice, archaïque et parfois mafieuse à celle élue». Le RCD n'a pas été en reste puisque aussi bien à travers ses élus que la déclaration de son président du bureau régional, le pouvoir est pris pour cible, sous-entendant que «la session extraordinaire a été convoquée sur ordre du wali», accusant directement les majorités FFS, FLN et RND de «n'avoir pas jugé utile, nécessaire et urgent de convoquer une session pour débattre des événements». Pour le RCD, cette session «carnavalesque» pour laquelle sont également convoqués les sénateurs, les députés, les maires et la société civile «perd son caractère de session». Si le RCD aurait souhaité une session pour dénoncer les violences et appeler au calme et à la retenue, et surtout mettre à nu les tenants et les aboutissants de cette manipulation de trop», le FFS salue la population pour avoir déjoué le plan machiavélique, met en garde le pouvoir quant à d'éventuels dérapages et exige la libération des personnes injustement arrêtées. Partant, le plus vieux parti d'opposition a décidé de mettre en place un collectif d'avocats et d'intensifier les rencontres publiques pour sensibiliser. Les tentatives de récupération n'ont pas manqué lors de cette session aux relents de préparatifs des élections législatives. Dans les interventions, les sigles des partis reviennent par redondance au point de donner lieu parfois à des actions spectaculaires sous le regard perplexe du nouveau wali qui découvre une assemblée dont les élus se chamaillent perpétuellement et qui s'accusent sans retenue. L'échange acerbe entre un élu du FLN et un député du FFS illustre on ne peut mieux «la décadence de l'assemblée», mais aussi les intentions des différents partis en prévision des prochaines élections. Venue pour connaître le bilan sur tous les plans, la presse locale repartira tout juste avec un chiffre celui du nombre de policiers blessés dont deux graves, pas plus que ce que l'on sait déjà en matière d'édifices publics et privés touchés lors des émeutes. Dans sa déclaration le wali a reconnu que «Béjaïa l'emblématique, qui a une place de choix dans nos coeurs, a vécu des moments difficiles», invitant l'ensemble des présents à travailler de concert pour son développement». «Lorsque le développement va, tout va», ajoute-t-il invitant par la même occasion de «tirer les leçons et faire la comparaison avec les autres régions afin d'établir un plan de travail pour une mise à niveau qui répondra aux attentes des citoyens». Le wali rendra un vibrant hommage aux sages et à tous ceux qui ont travaillé directement ou indirectement pour sauvegarder l'intérêt de la wilaya.