La dépollution de cet oued exige plus de 500 millions de dollars. La concentration du chlore dans l'oued El Harrach est 30 fois supérieure aux normes admises par l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Les analyses effectuées par un groupe de chercheurs japonais ont démontré aussi que l'eau de cette rivière est très pauvre. Le degré de saleté dépasse 400 fois le niveau requis. La situation est beaucoup plus dangereuse qu'on le croyait. «Les résultats sont surprenants», a précisé hier, M.Mitsuo Yoshida, chercheur et représentant de l'Agence japonaise de coopération internationale (Jica), et ce à l'occasion d'un séminaire sur «la pollution et la protection de l'environnement en Algérie», tenu à l'hôtel Sofitel. Les autorités algériennes par le biais du ministère de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement ont reconnu qu'«(elles) ne connaissent pas la situation avec précision». Le carton rouge La recherche préliminaire entamée, il y a une année de cela, par les Japonais en collaboration avec l'Observatoire national de l'environnement et du développement durable a démontré, en substance, que la principale cause de la pollution que connaît cet oued, est due aux déchets industriels qui y sont déversés d'une manière «sauvage» sans aucun traitement préalable. IL faut savoir que jusqu'à cette recherche, les Algériens croyaient que ce sont les déchets ménagers qui sont derrière la pollution des eaux de la rivière. Eh bien, les Japonais ont prouvé le contraire. Preuves à l'appui, Mitsuo Yoshida a présenté les résultats des analyses effectuées sur des échantillons d'eau collectés dans l'oued El Harrach. Sans aucune équivoque, ces dernières ont permis d'identifier clairement la présence d'éléments toxiques et de métaux lourds, citant entre autres le zinc, le cuivre et le fer. Mais, c'est le mercure qui pose le plus grand problème, sachant qu'il dépasse les 100 ppm. Les chercheurs sont unanimes. Tous ces métaux sont déversés par les unités de production qui activent dans cette région. En effet, les premières recherches ont permis de repérer 20 unités polluantes. Les Japonais ont donné un carton rouge à deux usines, la première se trouve à El Harrach, et est spécialisée dans la production de batteries. Et la deuxième produit du mercure à Baba Ali. Le conférencier exige une prise en charge urgente et efficace de ces deux cas:«Il faut absolument trouver une solution à ces deux usines», dira-t-il. Par ailleurs un carton jaune est attribué à 9 autres entreprises, «ces dernières doivent se conformer aux normes», ajoute-t-il. D'autres pollueurs ne sont pas encore repérés, «il faut que cela se fasse dans les meilleurs délais pour pouvoir freiner la pollution». Comment éviter le drame de Minamata La première mesure qui s'impose a trait à la dotation des grands pollueurs de stations de traitement des eaux usées. Les entreprises concernées doivent en outre réviser le process de production et acquérir de nouveaux équipements. Des aspects, pour rappel, pris en charge dans le cadre de la fiscalité environnementale, laquelle loi a instauré le principe du pollueur payeur. Les entreprises algériennes ont de ce fait deux ans pour se conformer aux règles internationales. Le danger est réel. Si la pollution atteint la baie d'Alger, il faut s'attendre à une catastrophe. La contamination pourrait être transmise, à travers les poissons contaminés. La deuxième phase de la recherche menée par les Japonais concerne la dépollution de l'Oued El Harrach. Une démarche qui exige des moyens colossaux sur les deux plans financier et matériel. Les Japonais, qui ont connu une situation identique dans la ville de Minanata, dont la pollution de la rivière a causé 2000 morts, estiment que le coût de cette opération pourra atteindre les 500 millions de dollars. Mais on est encore loin de cette étape, les habitants d'El Harrach et les quartiers environnants et les Algériens en général, devront subir pour quelques années encore les odeurs nauséabondes qui se dégagent de cet oued. Le représentant du ministère de l'Environnement a mis en relief l'absence de centre d'enfouissement technique: «Il faut qu'on sache d'avance où on va déposer les déchets retirés de l'oued. Pour le moment, l'endroit est inexistant.» Il faut savoir, dans ce sens, que des actions sont engagées en vue de sélectionner un ou plusieurs sites potentiels pour implanter des centres d'enfouissement. Le choix s'est porté sur un site pilote à Bir El Ater. Par ailleurs, le plan national de gestion des déchets spéciaux prévoit plusieurs actions. L'on cite à titre d'exemple, l'élimination des produits pharmaceutiques périmés. Ils sont estimés selon les chiffres du département de Cherif Rahmani à 12.000 tonnes, l'élimination des pesticides périmés et des produits organiques persistants sont les autres volets de ce plan.