Ce 28e Sommet focalise toute l'attention Ce n'est pas pour compatir à la douleur d'une Afrique engluée dans ses contradictions et ses conflits armés, que le Maroc vient taper à la porte de l'UA. Demain et après-demain, à Addis-Abeba (Ethiopie), les dirigeants des 54 pays membres de l'Union africaine (UA) auront à entériner les résultats d'une bataille diplomatique menée à fleurets mochetés dans les coulisses, depuis une semaine déjà, par les ministres des Affaires étrangères, autour de plusieurs thèmes: la succession de la Sud-Africaine Nkosazana Dlamini-Zuma à la tête de la Commission de l'UA, son principal organe et la réforme de l'institution, régulièrement accusée d'inefficacité. Mais la question cruciale au coeur de ce 28e Sommet, qui focalise toute l'attention, reste l'adhésion du Maroc à l'UA. «Le Maroc est bienvenu au sein de l'UA» dès lors qu'il se considère «égal en droits et en devoirs avec les 54 membres actuels», a déclaré vendredi le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, sur les ondes de RFI. Interrogé, par la même radio, s'il ne craignait pas que le Maroc ne parvienne à trouver une majorité d'Etats de l'UA sur sa position, M.Lamamra a eu cette réplique: «C'est l'âge de raison et nous espérons que de la même manière que le Maroc a siégé avec la Mauritanie ici, de 63 à 69, sans la reconnaître, nous souhaitons que cette fois-ci aussi la cohérence de l'histoire s'accomplira.» Après avoir quitté avec fracas son siège de l'OUA en 1984, protestant contre l'admission de la République arabe sahraouie démocratique (Rasd), le Maroc a fait sa demande d'adhésion en juillet dernier. Théoriquement, cette adhésion ne pose aucun problème, mais en filigrane, elle pose la question du conflit au Sahara occidental et voilà toutes les cartes rabattues et les rivalités ravivées. Ce n'est pas pour compatir à la douleur d'une Afrique engluée dans ses innombrables crises internes, ses contradictions et ses conflits armés encore moins pour parvenir à une Afrique plus décomplexée une fois débarrassée de sa dernière colonie, que le Maroc vient taper à la porte de l'UA. Cette adhésion n'est autre qu'un aveu d'échec de la diplomatie du royaume qui n'arrive pas à vendre son projet colonialiste. Malgré les appuis dont il bénéficie de la part de certains Occidentaux, en dépit des millions de dollars qu'il débourse pour faire son lobbying, le Maroc n'a qu'un faible impact, sa voix est inaudible, il n'a pas droit au chapitre dans les propositions régionales, de même que dans les négociations internationales. Exclu de fait dans plusieurs forums de discussions économiques, sécuritaires et politiques, il se découvre en fin de compte isolé. Après plus de 41 ans de conflit avec le Front Polisario, il n'a abouti qu'à un statu quo. Maigre moisson pour un royaume qui a dépensé des fortunes en armes et lobbying. Si officiellement Rabat n'a pas posé de condition à son retour, son objectif est évident: travailler dans l'UA depuis l'intérieur pour aboutir à l'exclusion de la Rasd. Pour l'Algérie et pour l'Afrique du Sud, anticolonialistes, il en est hors de question. Les statuts de l'organisation ne le permettent d'ailleurs pas. Il s'agit donc de faire des instances de l'UA de nouveaux théâtres d'affrontements entre Rabat et le Polisario. Nous avons déjà l'avant-goût de ce projet machiavélique par les terribles pressions marocaines voulant porter à la tête de la commission de l'UA, après Mme Dlamini-Zuma, le Sénégalais Abdoulaye Bathily proche du Makhzen. Inévitablement donc, cette adhésion, calculée, remettra au second plan des questions autrement plus intéressantes pour l'avenir du continent. Face aux crises politiques et sécuritaires en Libye, au Mali, en République démocratique du Congo, la guerre au Soudan du Sud, les participants attendent des propositions concrètes à ces graves conflits qui minent le continent. Ils attendent les résultats que doit présenter l'équipe d'experts dirigée par le président rwandais, Paul Kagamé, comment faire fonctionner mieux les instances de l'UA, comment être efficace devant les multiples crises, comment agir en bloc face à des pays occidentaux comme la Chine, et les Etats-Unis? Comment répondre d'une même voix aux questions internationales comme le climat, l'environnement et l'énergie? Comment l'UA peut-elle se financer? C'est toute cette dynamique que risque de freiner le Maroc avec ses intentions colonialistes. Sellal s'entretient avec son homologue éthiopien Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, s'est entretenu hier à Addis-Abeba, avec son homologue éthiopien, Hailemariam Dessalegn, en marge des travaux du 26ème Forum des chefs d'Etat et de gouvernement du Mécanisme africain d'évaluation par les pairs (Maep). L'audience s'est déroulée en présence du ministre d'Etat, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Ramtane Lamamra et du ministre des Affaires maghrébines, de l'Union africaine et de la Ligue arabe, Abdelkader Messahel. Le Premier ministre est arrivé à Addis Abeba pour représenter le président de la République, Abdelaziz Bouteflika aux travaux de la 28ème session ordinaire de la Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union africaine, prévue lundi et mardi dans la capitale éthiopienne.