Suspectant l'Algérie de vouloir prendre la présidence de la Commission africaine, dont le renouvellement aura lieu en juillet prochain, Rabat se lance dans une opération de lobbying à grande échelle dans la capitale éthiopienne, car redoutant un plus grand soutien à la cause sahraouie. Non membre de l'Union africaine, qu'il a quittée en 1984 suite à la reconnaissance de la République arabe sahraouie démocratique par la défunte OUA, le Maroc a dépêché à Addis-Abeba sa ministre déléguée aux Affaires étrangères, M'barka Bouaïda, avec pour mission de convaincre le plus grand nombre de pays africains à s'opposer à une éventuelle candidature de l'Algérie à la présidence de la Commission africaine. Convaincue que le chef de la diplomatie algérienne, Ramtane Lamamra, postulera au poste de président de cette instance, ou présentera une candidature algérienne, la diplomatie du Makhzen est en état d'alerte, comme l'indique l'activité accrue de la numéro deux du ministère des Affaires étrangères du Maroc dans la capitale éthiopienne. Même si le départ de l'actuelle présidente de la Commission africaine, la Sud-Africaine Nkosazana Dlamini-Zuma, dont le mandat expire en juillet 2016, est une bonne chose pour le Maroc, souligne le site internet Yabiladi, repris par afrik.com, car l'Afrique du Sud soutient le droi à l'autodétermination du peuple sahraoui, son remplacement par un Algérien terrifie Rabat. Le fait qu'elle ne souhaite pas briguer un autre mandat et que Rabat croit savoir, selon cette source toujours, que "les nouvelles en provenance d'Addis-Abeba font état d'un projet algérien pour présenter la candidature de Ratmane Lamamra pour diriger la Commission africaine", d'autant que "ce dernier connaît assez bien les rouages de l'UA", pour avoir "occupé pendant cinq années (2008 à 2013), le poste de commissaire à la paix et à la sécurité au sein de l'organisation continentale", c'est le branle-bas de combat au Makhzen. Selon ce site, M'barka Bouaïda aurait offert un déjeuner dans un hôtel luxueux d'Addis-Abeba à une vingtaine de d'ambassadeurs et de ministres représentant des pays membres de l'Union africaine pour les convaincre de défendre la position marocaine au sein de cette institution. La diplomate marocaine aurait également eu des entrevues avec les ministres des Affaires étrangères de la Côte d'Ivoire, du Togo, de l'Ile Maurice, du Malawi, du Sénégal et de l'Egypte, avec pour objectif d'expliquer à ses interlocuteurs la position du royaume sur le conflit du Sahara occidental. Ainsi, "Rabat parie sur la coopération des membres de la Communauté des Etats sahélo-sahariens (CEN-SAD). Mme Bouaïda s'est d'ailleurs entretenue hier avec le secrétaire général de ce groupement régional qui réunit 28 Etats. Le royaume peut également compter sur d'autres pays africains qui défendent la position marocaine sur le Sahara", souligne la même source. Le Maroc aurait donc décidé de ne plus pratiquer la politique de la chaise vide à l'Union africaine et envisage de la réintégrer pour mieux défendre ses thèses expansionnistes. C'est l'avis du président de la commission des Affaires étrangères du Sénat marocain, Mehdi Bensaïd, qui a déclaré à Medias24, qu'il préconise "un dialogue explicatif avec de grands pays africains comme l'Afrique du Sud et le Nigeria. Mais, pour cela, il faudra que le Maroc parvienne à convaincre l'instance continentale de mettre fin à la qualité de membre de la Rasd, reconnue en tant qu'Etat, à moins qu'il n'accepte d'y siéger en même temps, chose impensable pour le Makhzen. Merzak Tigrine