Ils s'appellent Mohamed Aksouh, Abdelkader Guermaz, Habib Hasnaoui, Mustapha Sedjal et enfin Kamel Yahiaoui. Ils sont cinq artistes algériens ayant été choisis du 15 février au 02 avril pour représenter l'art algérien entre les deux rives, en France. Cinq artistes de différentes générations et de sensibilités diverses tous travaillés par le souci des racines pour certains et les questions de l'émigration pour d'autres, notamment en raison de leur propre histoire. L'histoire de l'art moderne algérien, quant à elle, affirme le dossier de presse qui nous est parvenu «commence à l'époque coloniale». Et d'expliquer: «Confrontés aux peintures réalistes des peintres français (venus dans le sillage de la conquête de l'Algérie en 1830), à l'opposé de la tradition aniconique de leur pays, les artistes algériens de la première génération (1910-1950 environ) réfléchissent à la question de la figuration, comme Mohamed Racim (1896-1975), considéré comme le père de l'art moderne algérien. Nourri dès l'origine de ces relations entre métropole et colonie, l'art algérien se place aujourd'hui encore entre deux rives, et une diaspora artistique algérienne existe bien en France.». Parmi la richesse et diversité de cette scène artistique, la Maison des arts a choisi d'exposer des oeuvres de cinq artistes: Abdelkader Guermaz (1919-1996), Mohamed Aksouh (1934),Habib Hasnaoui (1955), Mustapha Sedjal (1964) et Kamel Yahiaoui (1966). A.Guermaz et M.Aksouh, nous fait -on savoir, appartiennent à la deuxième génération d'artistes algériens, incarnant une rupture historique et artistique, couvrant la période des années 1950 aux années1980 environ. Leur parcours et leurs oeuvres en illustrent des particularités: la combinaison des abstractions européennes avec l'univers propre algérien, la primauté du sensible, l'installation à Paris au coeur des développements de l'art moderne. Le travail de H.Hasnaoui, M.Sedjal et K. Yahiaoui est quant à lui révélateur de la génération des artistes des années 1990 et 2000. Leurs oeuvres se caractérisent par des spécificités plastiques (usage de la photo et de la vidéo, multiplication des médiums) et conceptuelles (impact dans leurs créations de l'Histoire et de leur histoire personnelle). Ces artistes «agissent comme des révélateurs sensibles de situations éprouvantes, indicibles, ou comme agitateurs impertinents passant au crible les réalités sociales ou politiques» (Anissa Bouayed, historienne). Le dossier de presse explique enfin que «des années 1950 à nos jours, l'art algérien a donc connu des bouleversements majeurs, dont les cinq artistes présentés témoignent». Des pionniers aux nouvelles générations, de la peinture et de la recherche d'un art «authentiquement» algérien à la multiplicité des médiums et à la revendication de récits autobiographiques, leurs oeuvres révèlent un même caractère métissé et inventent des «entre-mondes». Bien que cette présentation de nos artistes d'outre-mer semble être intéressante, elle paraît bien réductrice quant à l'art algérien en général. Il semblerait aussi qu'on ait oublié les femmes qui font également des merveilles aujourd'hui et brillent par la qualité de leurs propositions artistiques dans l'art contemporain. Pour l'exposition de la Maison des arts, sise en région parisienne, Mustapha Sedjal présente, nous apprend-on, une création inédite associant trois dessins (La question! I, II, III), deux installations composées d'enveloppes de crânes (Prenez soin de vous) et de coeurs modelés (Prenez soin de nous), ainsi que deux vidéos* (Être et Temps et Cartographie de l'oubli). À l'origine de ce nouveau projet, se trouve un sujet ancien refaisant surface depuis le mois de mai 2016: la présence, dans les réserves du Musée de l'Homme à Paris, de 36 crânes de résistants algériens fusillés puis décapités par le corps expéditionnaire français à la suite de la révolte de Zaâtcha (près de Biskra, dans le nord-est du pays) en 1849, et que beaucoup souhaiteraient voir rapatriés sur leur terre d'origine. L'artiste explore ainsi à travers cette oeuvre, d'une part, la question de la restitution des artefacts anthropologiques entrés dans les collections de musées français au XIXe siècle de manière troublante et, d'autre part et plus largement, celle de la Mémoire et de l'Histoire. Notons que cet évènement comprend aussi un programme parallèle dont un atelier pratique qu'animera Mustapha Sedjal sur le thème «A l'encre de Chine» (pour les enfants de 6-12 ans), un autre par Kamel Yahiaoui sur le thème «Fragments d'histoire familiale», une conférence qu'animera Fanny Gillet, doctorante en Histoire de l'art arabe et enfin une projection du film documentaire «Algérie du possible» de Viviane Candas, suivie d'un échange avec les artistes exposés.