Pour les Algériens établis en France, Macron apporte un autre regard sur la politique française La communauté algérienne établie en France n'est pas insensible à l'élection présidentielle française. Nombre d'entre eux sont même investis dans les staffs de campagne des différents prétendants à la magistrature suprême. Mais un candidat sort du lot. Il s'agit d'Emmanuel Macron. Il n'est ni de gauche ni de droite. Il surfe allégrement sur les programmes des autres candidats et en prend ce qui lui semble «bon et juste». Son CV, aussi court soit-il, fait des jaloux! Son âge aussi. Il a l'avantage de ne pas faire partie de ce personnel politique vieux de 40, se targue-t-il devant ses ennemis. On le qualifie souvent, à tort ou à raison, d'être un pur produit de la finance. Lui il en fait sa fierté. Il occupe tous les supports de médias et fait parler de lui. Il a même osé un passage à Alger, comme pour prendre l'onction de ses partenaires du Sud. Ses déclarations sur place n'ont pas laissé indifférents, des deux côtés de la Méditerranée et toutes tendances confondues. «Courageux», diront certains. «Lâche et irresponsable», rétorqueront ses ennemis. Mais une chose est sûre: Emmanuel Macron aura été la révélation de cette campagne présidentielle française de 2017. Il a réussi à s'imposer comme cette nouvelle figure incontournable de la politique française! Nous avons tenté de recueillir les avis de la communauté algérienne établie en France et dresser l'image d'Emmanuel Macron telle que perçue par les Algériens. Il laisse «perplexe» Beaucoup notent l'aspect inattendu de la candidature d'Emmanuel Macron et surtout sa capacité à sortir du lot, tant il est difficile de s'imposer face à un personnel politique, vieux et rodé. «Concernant la candidature de Macron, elle était tellement inattendue, il y a six mois, qu'elle ne peut que me laisser perplexe. Je sais qu'en politique tout est possible; mais je me demande comment un homme sans appareil politique peut rassembler aussi rapidement toutes les faveurs d'un large public et le soutien de personnalisés politiques de courants aussi divers», s'interroge Mohamed Lehlou, professeur honoraire ayant enseigné près de 20 ans à Lyon 2. Pour les journalistes installés en France, le succès de la candidature de Macron trouve son explication dans l'intérêt manifesté, voire le soutien des cercles de la finance et des médias. Le journaliste Mrizek Sahraoui estime qu'«au lancement de son projet, Macron paraissait n'avoir aucune chance. Par conséquent, il me semble peu probable que les réseaux financiers aient pu se risquer à une candidature qui avait peu de chance d'aboutir. Les médias tous comme les réseaux financiers ont vite compris l'intérêt de soutenir Macron qui, au final, est devenu leur candidat.» Un autre journaliste, Hamid Arab, abonde dans le même sens. «A l'annonce de sa candidature, il a bénéficié d'une large couverture médiatique, qui peut s'expliquer par la puissance de son réseau et son entregent quand il était ministre», relève-t-il. Dépoussiérer la vieille famille politique Pour Wahida Belkacem, directrice d'Investissement et de management, le portrait et le parcours du candidat expliquent tout. «Macron avec son mouvement «En marche» veut épouser un modèle libéral plus proche du «New Labour» britannique qui avait fait le succès de Tony blair outre-manche. Macron, cet ancien inspecteur des finances pour le ministère de l'Economie de 2004 à 2008, avait quitté le service public pour faire carrière au sein d'une banque privée, la toute célèbre Rothschild & Cie. Ce sont là les indices d'une gauche qui épouse les concepts économiques traditionnels de la droite et qui se décomplexe dans ses rapports avec le monde de la finance», estime-t-elle. Et d'ajouter: «Les banques ne sont plus considérées comme le grand Satan commanditaire dans l'ombre? mais comme le moteur incontournable de la relance économique. Eussions-nous été peu familiers avec un pareil discours émanant de la gauche française, Macron lui, ne fléchit pas, il désire changer la donne, dépoussiérer sa vieille famille politique et imposer le libre-échange. Macron apporterait ainsi son expérience et ses connaissances des trames et des fonctionnements des banques, pour que la France renoue solidement avec la croissance. Un discours qui avait été auparavant la spécificité de la droite française.» Pour Noura Belkaïd, enseignante à Paris, Emanuel Macron est le candidat qui «ose dire sans détour». Et il en fait preuve. «Lors de son déplacement, en Algérie, Emmanuel Macron a déclaré et qualifié, avec beaucoup de regrets, le colonialisme de «crimes contre l'humanité» et de «vraie barbarie». J'avoue qu'il était le candidat le plus courageux à reconnaitre publiquement de tels crimes commis par la France. Toutefois, son discours reste un discours politique! Il est difficile de croire à une suite dans ce sens, s'il était élu président», souligne l'enseignante. Smail Berradj, opérateur économique, de son côté, trouve qu'Emmanuel Macron «a du panache de dépoussiérer les questions de mémoire qui fâchent les deux pays» et qu'il «a le mérite d'avoir abordé le sujet du colonialisme français lors de son passage à Alger, mais aussi de s'exprimer à l'aise et sans gêne sur ce sujet, contrairement aux autres qui évitent le sujet». Macron est un candidat qui ose! Aussi, Smaïl ne se gêne pas d'afficher son soutien, estimant qu'«il est le candidat le mieux indiqué en France et pour diverses raisons». Et il s'en explique: «D'abord, il apporte un autre regard sur la politique française, otage des luttes entre la gauche et la droite depuis bien des années. Il apporte aussi du sang neuf dans le corps politique français, actuellement sclérosé. Je pense que le candidat Macron a brisé les vieux clivages du personnel politique français, d'où l'engouement des Français et même des étrangers établis en France. Il a une vision pragmatique dans le travail, il est contre la bureaucratie à l'origine des stagnations économiques surtout. Je pense que le candidat Macron pourra introduire un nouveau et jeune personnel politique et sortir des vieux schémas.»