«Cette situation entraînera un retour progressif à l'utilisation du charbon comme source d'énergie». Sombres perspectives pour l'humanité. C'est mal parti ! Chems Eddine Chitour, professeur à l'Ecole nationale polytechnique et enseignant à Toulouse (France ), prévoit un choc énergétique dans les vingt années à venir. «Le choc proviendra d'une utilisation démesurée des énergies non renouvelables et du fait du gaspillage qui s'effectue actuellement dans les pays consommateurs», a averti le professeur, dans une communication à l'occasion de la 9e journée scientifique sur l'énergie organisée hier, par le département de génie chimique de l'Ecole nationale polytechnique à l'Hôtel Hilton (Alger). «A partir de 2010, les découvertes pétrolières seront inférieures à la production ce qui signifie qu'on va consommer dans nos réserves» a ajouté le conférencier soulignant que, «cette situation entraînera un retour progressif à l'utilisation du charbon comme source d'énergie». Les conséquences du retour à l'utilisation du charbon seront alors désastreuses pour l'humanité. Les émissions de gaz carbonique auront au moins doublé avant même d'avoir réglé le problème de la pollution pour lequel des organisations et des gouvernements de la planète se disent mobilisés. «Le protocole de Kyoto est déjà dépassé avant même qu'il entre en application» a indiqué M.Chitour rappelant que depuis 50, ans plus de 242 accords pour l'environnement ont été signés «mais sans être contraignants pour les pays consommateurs». Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, une consommation immodérée du pétrole a eu lieu avec la mise en place du plan Marshall pour la reconstruction de l'Europe. Alerte, vif et plein d'entrain, le professeur a appelé la communauté internationale à «trouver un autre mode de consommation énergétique» pour stopper le danger dont «les pays développés seront les premiers responsables». Pour illustrer cette responsabilité, il étaye ses propos par des exemples qui renseignent combien les disparités sont grandes entre les pays producteurs (les pays en développement) et les pays consommateurs (les pays développés). Il cite ainsi: actuellement 80% de l'énergie mondiale est consommée par 20 % de la population de la planète, ce sont les pays de l'Ocde c'est-à-dire 25 pays; chaque Américain consomme annuellement 8 tonnes d'énergie alors que l'Africain n'en consomme que 0.3 tonnes; le revenu annuel d'un Africain est égal au revenu journalier d'un Suisse; chaque Africain qui vient au monde, né endetté, un Américain né avec des centaines de dollars d'épargne, six milliardaires dans le monde sont plus riches que 1.5 milliard de personnes ; sur les 50 plus grandes entreprises dans le monde, plus de 33 sont américaines avec un chiffre d'affaires de quelque 4 900 milliards de dollars. Des statistiques alarmantes qui prédisent des scénarios les plus catastrophiques sous l'ère d'une dynamique mondiale au rythme effréné. «Le pire des scénarios qui puisse nous arriver est d'admettre sans débat cette dynamique de mondialisation. Et le débat manque actuellement, comme si les choix de l'Etat sont indiscutables», a déclaré M.Chitour qui relève, sinon une absence totale, un manque flagrant dans la stratégie énergique en Algérie. «En la personne de M. Chakib Khelil, nous avons un des ministre de l'Energie les plus actifs et les plus ouverts au débat, cependant je ne suis pas d'accord avec lui quand il s'agit de la nouvelle loi sur les hydrocarbures»; l'un des arguments du professeur est le suivant : «Puisque la tendance est à l'épuisement des gisements pétrolifères et donc à la flambée excessive des prix, pourquoi alors une telle cadence d'ouverture aux sociétés étrangères qui de toutes façons, finiront par se bousculer à la porte pour avoir leur part de cette matière rare?» s'est-il interrogé. Rappelons enfin que plusieurs personnalités politiques nationales ont pris part à la journée d'hier. Les deux ex-chefs de gouvernement, Ahmed Benbitour et Smaïl Hamdani, le ministre de l'Habitat, Nedir Hamimid et M. Keramane, l'ancien gouverneur de la Banque d'Algérie. «Cette journée est une façon pour l'Ecole polytechnique de s'approprier le débat sur la politique du choix énergétique» a conclu le professeur Chitour.