Pendant près de deux mois, le monde entier a vécu à l'heure chrétienne. Lors des cérémonies hollywoodiennes retransmises par les télévisions du monde, nous avons eu droit à un prosélytisme déguisé rampant et de plus très soft en ce sens que chaque scène, chaque petit événement nous est vendu d'une façon apaisée présentant chaque fois l'acte chrétien sous un jour à la fois simple et transcendant. Ainsi, les longues marches, les rassemblements de milliers, voire de centaines de milliers de pèlerins, lors des funérailles de Jean-Paul II, sont mises sous le signe de la ferveur d'une religion de l'amour. Même le nouveau pape, dans sa conférence, a mis l'accent sur le rôle des médias dans l'évangélisation. Rien à voir avec la retransmission du pèlerinage où l'on présente les milliers de pèlerins comme des combattants fanatiques potentiels. Naturellement, la caméra d'une façon innocente, nous présentera en prime quelques images de barbus hirsutes ou d'Afghanes grillagées. Il est hors de doute que ces images gravées dans l'inconscient collectif européen, et pourquoi ne pas le dire, chrétien, formatent «l'occidental» dans le sens d'un rejet de l'Islam... C'est dire si la responsabilité des médias est lourde dans la charge de signification. D'une certaine façon, le pape Jean-Paul II, grâce aux médias, a réussi son dernier voyage en envoyant un dernier message pour le prosélytisme de cette religion. Habemus papam! Une fumée blanche s'est élevée au-dessus de la chapelle Sixtine, les cloches de Saint-Pierre sonnent à toute volée: l'Eglise a désormais un nouveau pape ! Le successeur du pape, le cardinal Ratzinger est né le 16 avril 1927 à Marktl-am-Inn, village du diocèse de Passau où son père était gendarme. Entré au petit séminaire en 1939, il se voit, comme tous les jeunes Allemands au moment de la débâcle, réquisitionné dans l'infanterie en 1944 ; prisonnier de guerre début 1945, il est libéré en juin et retourne au séminaire. A partir de 1946, il étudie la philosophie et la théologie à Munich, puis à Freising, avant d'être ordonné prêtre le 29 juin 1951 - un de ses frères le sera également, qui remplira un long ministère au service de la liturgie: une dimension centrale de la vie chrétienne dont Joseph partagera le vif souci. Un pape sous surveillance Tout en débutant dans l'enseignement, il soutient deux ans plus tard une première thèse de doctorat sur l'ecclésiologie de saint Augustin (« Peuple et maison de Dieu »), qui demeurera pour lui une référence constante. Pendant près de vingt ans, il sera professeur de théologie fondamentale et dogmatique, successivement à Bonn (1959-69), Münster (1963-66, Tübingen (1966-69, aux côtés de Hans Küng... dont il sera amené à condamner la pensée.... sur l'infaillibilité du pape ! !, lui qui le sera, 36 ans plus tard... Une carrière brillante, «Prodigieux. Un splendide théologien ! C'était beau, la langue était belle. La pensée était fine. La proposition était juste. On l'appelait le Doctor mellifluus (Ndlr : dont la parole coule comme le miel), compte tenu tant de la délicatesse de son expression que de la finesse de sa pensée», se souvient l'archevêque de Strasbourg Il sera l'homme de la constitution dogmatique ‘Lumen gentium', qui définit l'Eglise comme Peuple de Dieu et sacrement, bien plus que de la constitution pastorale ‘Gaudium et spes' sur les rapports de l'Eglise avec le monde de son temps, où il craint de voir une adulation de la modernité. Cette crainte sera confortée par les évolutions des années 1968, face à la tempête contestataire qui fait rage dans l'Eglise comme dans la société, notamment au sein des universités : «Qui voulait rester progressiste devait vendre son âme», témoignera-t-il plus tard dans ses écrits. Le successeur de Jean-Paul II est connu pour avoir été le préfet de la Congrégation de la doctrine de la foi. C'est à dire le gardien du Temple. On l'a vu avec ses positions sur le célibat des prêtres ou l'ordination des femmes. De ce fait, le pape Benoît XVI, 265e pape va être dans la continuité du pape Jean-Paul II. Etant très proche de ce dernier, le pape actuel a été l'un des plus ardents défenseurs du non à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne. Cela s'expliquerait, peut-être, par le fait qu'en tant qu'Allemand, il connaît l'émigration turque de près. Les réactions et messages de félicitations à Benoît XVI affluent du monde entier. En Israël, où l'on admirait Jean-Paul II pour ses prises de position sans équivoque sur la persécution des Juifs, hommes politiques et rabbins ont salué l'élection de Joseph Ratzinger qui a grandi pendant le nazisme mais a condamné clairement lui aussi l'antisémitisme. «Nous avons de bonnes relations avec lui», a déclaré l'ambassadeur d'Israël au Vatican, Oded Ben-Hor, en notant que «le vrai test viendrait avec le temps». Voilà qui est clair. Le pape est sous surveillance. «En tant que chrétien, j'accepte et respecte la décision des cardinaux. Mais il me sera difficile d'apprécier le nouveau pape, étant donné ses positions sur l'Eglise et le monde», déclare le Brésilien Leonardo Boff, l'un des principaux idéologues de la théologie de la libération, dans la Folha de Sao Paulo. Selon cet ancien franciscain, qui a abandonné le sacerdoce en 1992, «le nouveau pape ne va pas se contenter de perpétuer l'esprit du pontificat de Jean-Paul II, mais il va aussi et surtout radicaliser la doctrine morale de l'Eglise catholique», rapporte le quotidien brésilien. «Il a ouvert de nombreuses blessures : beaucoup de chrétiens ont quitté l'Eglise, car ils ne s'y sentaient plus comme dans un foyer spirituel. Nous craignons que cet hiver ecclésial ne se poursuive. L'Eglise va désormais devoir affronter un hiver encore plus rigoureux», affirme Leonardo Boff. Sa «tâche première», a expliqué le pape, concernera la réunification des chrétiens. Pour cela, «faire montre de bons sentiments ne suffit pas, il faut des actes concrets qui pénètrent les âmes et ébranlent les consciences». C'est de ce fait, la continuation de la méthode de son prédécesseur. Le surnom de panzer cardinal trouve dans cet acte de foi toute sa signification. Avec les autres religions, Benoît XVI veut poursuivre «un dialogue ouvert et sincère» et faire tout ce qui sera en son pouvoir en faveur de l'oecuménisme. Il a également affirmé sa «détermination» à poursuivre la mise en oeuvre du concile Vatican II (1962-65) de modernisation et d'ouverture de l'Eglise, «dans le sillage de (ses) prédécesseurs, dans la fidélité et la continuité de la tradition bimillénaire de l'Eglise». Le message du nouveau chef de l'Eglise catholique romaine au milliard de fidèles et au reste du monde est clair : il marche sur les pas de Jean-Paul II, auquel il a fait référence à plusieurs reprises, affirmant même avoir l'impression «de sentir sa main forte tenir la (sienne)». «J'ai l'impression que je vois ses yeux souriants et entendre ses mots, dirigés en ce moment particulier vers moi: «N'aie pas peur», a confié Benoît XVI. Interrogé sur l'image de «grand inquisiteur» que certains prêtent au nouveau pape, Mgr Lustiger, évêque français, déclare qu'en tant que préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, «on lui demandait de préciser ce qui est conforme ou non à la fois catholique (...) Du coup, ajoute-t-il, on lui a taillé un costume, une armure (...) Il faudra réévaluer ces préjugés et découvrir qui il est réellement». Selon lui, Benoît XVI est «un intellectuel de très grande volée. Il est le dernier représentant de la génération des très grands théologiens qui ont fait le concile Vatican II (...) Sa culture, son ouverture sur la pensée contemporaine est très remarquable». S'agissant du nom retenu par le nouveau Pape Benoît XVI, l'archevêque de Paris, Mgr André Ving-Trois, a vu dans ce choix une triple allusion : une manière pour le cardinal Ratzinger, connu comme très proche collaborateur de Jean-Paul II, de dire «qu'il n'est pas Jean-Paul III»; une allusion au pape Benoît XV (pape de 1914 à 1922), grand pacificateur qui avait déployé toute son énergie dans la recherche d'une solution pacifique au moment de la Première Guerre mondiale; et une allusion à l'Europe enfin, puisque Saint Benoît est Patron de l'Europe. Pour nous musulmans, c'est avec une grande joie que nous accueillons la commémoration de la naissance du Prophète appelée communément (Al-Mawlid Annabawi), qui a eu lieu, il y a 1425 années. Les musulmans procèdent depuis des siècles à la commémoration de la naissance du Prophète Mohamed, le messager de l'Islam, dans presque tous les pays du monde. L'événement, pour eux, est de taille, c'est l'occasion précieuse, naturellement, d'évoquer la vie et le comportement merveilleux de cet heureux élu de Dieu. Lorsque Amina bint Wahb la mère du prophète accoucha de lui, Abdelmouttalib, son grand-père, fut comblé de joie. Il célébra sa naissance et le nomma Mohamed. «J'espère, dit Abdelmouttalib, qu'il sera, par ce nom, loué et comblé de gloire dans le ciel (par la grâce de Dieu) et qu'il sera de même loué et comblé de gloire ici sur terre». Sa mère n'aurait rien senti des douleurs de l'accouchement, l'enfant serait venu au monde circoncis naturellement. Les anges l'auraient lavé de toute souillure et l'auraient marqué du sceau de la prophétie sur le dos entre les épaules. A cet instant même, une lumière brillante aurait éclairé toutes les contrées environnantes, le feu sacré des Perses, allumé depuis mille ans, se serait éteint comme par enchantement. Il passa ses premières années aux côtés de sa mère Amina. Il était de coutume à la Mecque de confier les enfants en bas âge à des nourrices bédouines. Mais aucune nourrice n'avait consenti à s'en charger car il était orphelin et peu aisé. Ne voulant pas rentrer les mains vides, Halima et son mari acceptèrent de prendre le bébé. «Prends-le ! Peut-être que Dieu en fera un bienfait pour nous et que la bénédiction rentrera sous notre tente» (10) Effectivement, la prospérité ne cessait d'habiter leur tente. Ahmed Elwouazzani Site Oumma.com Jeudi 21 avril 2005 Cependant, curieux hasard du calendrier, la fête du Mouled Ennabaoui, l'équivalent du 25 décembre, la naissance du Christ, est passée de façon clandestine. La République et ses médias ont ignoré superbement la spiritualité de quelque 5 millions de musulmans de France. D'un côté, tout le faste et l'apparat pour les funérailles d'un pape aussi prestigieux soit-il, de l'autre l'anonymat le plus indifférent, le plus humiliant s'agissant du prophète de l'Islam. Laïcité à géométrie variable On l'aura compris, s'agissant de choses sérieuses, comme la mort du pape, la laïcité à la française est rangée au placard. Le substrat chrétien de la France réapparaît plus que jamais. La République, qui est censée être équidistante des religions, n'a pas gardé ses distances avec le christianisme au point de mettre ses drapeaux en berne. Par contre, elle s'est mise à des années lumières de ces autres Français qui se trouvent être musulmans. On se souvient comment une décision du gouvernement sur la nécessité de travailler le lundi de Pâques est torpillée par toutes les organisations patronales. Le peuple français, et c'est son droit, veut garder ses repères. Il faut espérer qu'il sera tolérant au point de tolérer ces nouveaux dhimmis qui, paradoxalement, ne sont pas protégés par l'Etat, comme ceux en terre d'Islam Les musulmans de France continueront à fêter cet «événement» d'une façon clandestine, ils continueront, ainsi, à subir une Laïcité à géométrie variable qui fait la part belle à la seule religion qui existait en face de la République en 1905, en y adjoignant dans la même sollicitude le regard qu'elle porte vis-à-vis du judaïsme. Il n'est que de voir comment les événements des camps de concentration continuent d'être récupérés et il ne se passe pas de semaines sans que l'on ne commémore des événements qui ne mettent en valeur que la souffrance des Juifs, à l'exclusion de tous les autres peuples ayant souffert de la barbarie hitlérienne. Pourtant il n'est pas ridicule de penser que la proposition de Nicolas Sarkozy-certainement pour des raisons électorales- de procéder à un aggiornamento du dogme de la laïcité serait peut-être le début d'un véritable état de grâce entre les différentes spiritualités, sous l'oeil bienveillant et impartial de la République. Naturellement, dans tous les pays occidentaux où vivent des communautés de musulmans, le même traitement de l'indifférence, voire du mépris a été appliqué. Par contre, pendant des semaines nous continuerons encore à écouter et regarder - â notre corps défendant devant l'indigence de l'unique - les chaînes étrangères qui continueront à ignorer superbement l'Islam pour n'en rapporter que les pages sombres. Mieux encore, depuis plusieurs années, la chaîne AOL américaine sur Internet n'arrête de blasphémer à propos de l'Islam. Que fait El Azhar, il se contente de répondre mollement sans grande conviction ni génie. C'est peut-être là le vrai problème. Nous manquons cruellement de guide.