Emma Lamadji a mis le feu Ils s'appellent Karim Djelassi et Nabil Mhamdi. Tout deux Tunisiens, ils représentent l'association Dell'Arte, «Culture et Socialisation». Basée à Toulouse et créée en 1997, Dell Arte porte un projet de «culture sociale». Ce dernier se décline par le développement de la culture, dans les quartiers populaires, l'insertion par la culture, par la production culturelle dans le cadre de l'I.A.E. (Insertion par l'activité économique) et par l'accompagnement des artistes émergents, la coopération internationale, les relations avec les Suds et enfin le Festival toucouleurs, Rencontres en Mouvement (depuis 2000). Ce dernier accueillera d'ici la fin du mois l'incandescente Emel Mathlouthi. Son premier album «Kelmti Horra» (Ma parole est libre) est déjà un disque emblématique de la résistance et de la liberté tunisiennes. Aussi Dell'Arte c'est aussi Le kif-kif collectif qui réunit des artistes issus de tous horizons autour d'un dénominateur commun: la World Music. «Construite de fil en aiguille au gré des rencontres, cette initiative a pour but de rassembler les énergies de ses membres, de favoriser les rencontres artistiques, la création originale par le mélange des styles et enfin, l'autoproduction. Son appellation est riche de sens: d'une part, elle met en avant l'égalité de ses membres «kif-kif» et d'autre part, leur passion commune de la musique «le kif», nous affirme-t-on. En marge des concerts qui se tiennent chaque soir au palais des Congrès dans le cadre de la quatrième édition des Journées musicales de Carthage, se tient le Salon des musiques et de l'industrie. Ce dernier, reste l'un des principaux axes des JMC, un rendez-vous que tous les acteurs artistiques et culturels attendent, tant il se veut un tremplin naturel en matière de réseautage, sur le plan des rencontres, mais aussi de l'apprentissage artistique et scientifique. En effet, en marge des spectacles du soir, des exposants venus de nombreux pays se sont installés aujourd'hui pour partager leur savoir-faire. Entre musiciens, managers, luthiers, producteurs, chercheurs, fabricant de Qanun turc et associations artistiques, les visiteurs ont pu faire de nombreuses découvertes. Comme Salah qui joue et fabrique des guembris de père en fils, venu présenter cet instrument de musique: «Cela fait deux ans que j'expose au Salon. Mon but premier n'est pas de vendre mes instruments, mais surtout de faire connaître le guembri, qui fait partie du patrimoine musical tunisien. C'est un instrument qui existe depuis des siècles en Tunisie, et sa musique se jouait avant même l'arrivée du malouf dans le pays. Dans ce salon, j'ai noué des contacts. J'ai fait la connaissance de nombreux musiciens. Là-bas en face, il y a les trompettistes. L'année dernière, ils ont acheté un guembri avant de repartir en France. Les rencontres sont pour moi le grand acquis de ce salon.». L'Association Dell' Arte entre en étroite ligne de mire de ce principe de rencontres et d'échanges. Nos deux passeurs de cultures, alias Karim et Nabil, sont donc présents tout au long du salon pour nous faire découvrir leurs nouveautés en terme musical. Parmi eux, il y a l'album Tiwiza rock berbère. Du chant amazigh fusion dont l'influence du groupe Gnawa Diffusion se ressent dans certains morceaux. Avec Sofiane Aït Belaïd, au chant, mandole et guembri ce groupe entend défendre son identité amazighe en appelant par la musique à la résistance. Un groupe qui monte doucement, mais sûrement. Populaire tout en étant enraciné dans le sol africain, Twiza qui offre un savant mélange de sonorités modernes et traditionnelles sait allier les percussions nomades du désert, mais aussi des montagnes de Kabylie aux riffs de châabi et aux blues dans un esprit festif bien rock. L'Association Dell Arte implantée à Toulouse parvient via ce groupe à souligner son credo d' «engagement militant» qui est de mettre en oeuvre des actions culturelles qui vont agir à transformer les rapports sociaux. «Les valeurs fondamentales que nous défendons sont l'émancipation, les solidarités, les coopérations et la justice. Ainsi, nos pratiques s'inscrivent dans la transmission par l'éducation populaire et par la mise en place du travail social communautaire», soutiennent encore les responsables de cette association. Aussi, Karim et Nabil nous feront part de l'album «Kanazoé Orchestra». Ce dernier figure parmi le top 10 des albums africains classés par RFI, mais encore parmi les 20 meilleurs albums dans le monde. Cette formation est emmenée par Seydou Diabate «considéré par ses pairs à travers toute l'Afrique mandingue comme le jeune génie du balafon, tant pour ses prouesses techniques, que pour sa créativité et sa musicalité! Né au Burkina Faso, dans une célèbre famille de griots, il a débuté sa formation avec son père dès l'âge de 5 ans. Multi-instrumentiste, il joue les balafons dioula, sambla et toussian (pentatoniques), le balafon diatonique («djelibalan» ou balafon guinéen) ainsi que le «kamelen n'goni», une harpe pentatonique. Quand il chante ses textes, c'est en langue dioula (il écrit sur la famille, l'amour, la société, le rôle de la musique). Après avoir collaboré avec entre autres Harouna Dembélé, Badje Tounkara et Abou Diarra, il a rassemblé autour de lui une équipe de musiciens du cru, rompus aux sons métissés pour créer «le Kanazoé Orkestra» peut-on lire sur son site Web. Enfin sur le catalogue de Dell Arte figure aussi le Mandé Bras Bans, un superprojet innovant de fanfare afro-urbaine qui sillonne les pays africains.