Les deux qualifiés au second tour de la présidentielle française, lançaient hier leurs dernières cartouches pour convaincre les derniers indécis L'un est centriste et pro-européen, l'autre d'extrême droite, anti-euro et anti-immigration: Emmanuel Macron et Marine Le Pen, deux candidats à la présidentielle française que tout oppose, s'affrontaient hier soir lors d'un débat télévisé crucial à quatre jours du scrutin. Sommés de convaincre indécis et abstentionnistes pour remporter l'élection de dimanche, les deux finalistes promettent de se livrer un duel féroce à 19H00 GMT, devant plusieurs millions de téléspectateurs. Après dix jours d'une campagne à couteaux tirés entre les deux tours de la présidentielle, Emmanuel Macron reste en tête dans les sondages, aux alentours de 60% d'intentions de vote, mais l'écart semble se resserrer avec Mme Le Pen, très offensive. L'abstention, dont beaucoup craignent qu'elle ne profite à l'extrême droite, oscillerait entre 22 et 28% dimanche, tandis que 18% des personnes certaines ou quasi-certaines d'aller voter sont indécises, selon un sondage Elabe mardi. L'échec du héraut de la gauche antilibérale Jean-Luc Mélenchon et du conservateur François Fillon, au premier tour, a laissé un goût amer à une cohorte d'électeurs qui refusent de choisir entre «peste et choléra». «Nous sommes dans une zone de danger absolu. Ne jouons pas la démocratie à la roulette russe», a mis en garde hier la ministre socialiste de l'Education nationale Najat Vallaud-Belkacem, alors qu'une partie de la gauche envisage de s'abstenir ou de voter blanc. A droite, le parti des Républicains a prévenu que les élus qui «se rapprochent du Front national» pour la présidentielle, tout comme ceux qui «se rapprochent de Macron» avant les législatives des 11 et 18 juin, seront exclus. La candidate d'extrême droite n'a eu de cesse de courtiser les électeurs de M.Mélenchon, dont moins de 20% devraient se tourner vers elle tandis que près la moitié devrait se reporter sur Emmanuel Macron au second tour, selon plusieurs sondages. Quant à l'électorat de M.Fillon, un quart à un tiers devrait voter Marine Le Pen et moins de la moitié pour M.Macron. Pour le face-à-face d'hier, à deux jours de la fin de la campagne officielle, Emmanuel Macron, 39 ans, dont c'est la première campagne électorale, a promis un «corps à corps» avec son adversaire d'extrême droite qui «porte un projet que je considère comme dangereux». «Je veux aller au corps à corps, au combat sur le fond des idées, pour démontrer que ce sont de fausses solutions», a lancé mardi l'ancien ministre de l'Economie, nouveau venu en politique au programme social-libéral et pro-européen. Selon son entourage, face à l'argumentaire «assez simpliste» du Front national (FN), il s'agira de «mettre en avant le flou du programme, comme cette reculade totale sur la sortie de l'euro», qui ne figure plus au premier rang des priorités de la candidate, alors que la majorité des Français sont hostiles à un abandon de la monnaie unique. Marine Le Pen, elle, a attaqué dès mardi sur Twitter celui qu'elle dépeint en «adversaire du peuple» et héritier de l'impopulaire président socialiste sortant François Hollande: si M. Macron «ne se sent pas à l'aise» dans le débat, «il peut toujours demander à François Hollande de venir lui tenir la main», a ironisé la candidate FN, femme politique expérimentée rompue aux joutes verbales. Le débat télévisé de l'entre deux tours constitue un moment fort des campagnes présidentielles en France où, au-delà des projets, les personnalités apparaissent au grand jour. Près de 18 millions de téléspectateurs avaient suivi en 2012 le duel entre François Hollande et Nicolas Sarkozy, mais l'audience pourrait cette fois pâtir de la demi-finale de la Ligue des champions de football, qui opposera au même moment Monaco à la Juventus de Turin. Les deux rivaux devraient croiser le fer sur la place de la France dans l'Union européenne et la zone euro, mais aussi sur la sécurité, le marché du travail et l'éducation. Leur programme est diamétralement opposé. Le discours d'Emmanuel Macron, libéral en termes d'économie et de société, plaît surtout aux jeunes urbains, aux classes moyennes et aux milieux d'affaires. Celui de Marine Le Pen, anti-immigration, anti-Europe et anti-système, séduit les classes populaires, les ruraux, les «invisibles» et capte le ras-le-bol de Français victimes d'un chômage endémique et de ses conséquences.