Le Palais du gouvernement Sur le papier, le défi est à portée de main, en ce sens que la quasi-totalité des partis concernés par le gouvernement d'union nationale a une expérience gouvernementale. Indépendamment des résultats des élections, du taux de participation ou encore de la représentativité ou pas de la prochaine Assemblée populaire nationale, tous les observateurs s'accordent sur un constat, celui que le prochain gouvernement n'aura certainement pas la tâche facile. En effet, les spécialistes de la chose politique en Algérie relèvent que les conséquences de la crise financière ne seront pas moins fortes, même avec un Parlement élu à plus de 80% du taux de participation. De fait, le gouvernement qui aura à conduire les affaires du pays durant la prochaine législature affrontera la même réalité quelle que soit sa «légitimité populaire». C'est dire donc toute la difficulté de la situation à laquelle le personnel politique, dans l'Exécutif et à l'APN, aura à faire face, tant au plan social qu'économique et sécuritaire. Même si extérieurement les choses paraissent sous contrôle, il n'en demeure pas moins que sous la quiétude sociale et économique, couvent le feu de la crise que tous les observateurs attendent pour l'année prochaine. Il est donc un fait établi: l'Algérie de 2018 ne sera pas celle des années précédentes. Les défis sont plus pressants et le danger plus immédiat. Un état de fait qui impose une démarche plus unitaire de l'ensemble des acteurs politiques, transcendant les clivages idéologiques. C'est en tout cas, une explication plausible de la démarche présidentielle qui a consisté à faire une offre d'intégrer le gouvernement à l'un des partis de l'opposition le plus critique à l'endroit du pouvoir. Les «chauds» rendez-vous de l'agenda gouvernemental Le propos n'est pas de construire une majorité parlementaire, celle-ci étant déjà acquise au regard des résultats des législatives. L'objectif du président de la République est de mettre sur un pied un gouvernement d'action, mais surtout d'union nationale, dont le but évident sera de traiter de toutes les questions relatives à l'urgence du moment, sans priori idéologique, d'un côté comme de l'autre.Il est entendu, et les Algériens l'ont bien constaté durant la campagne électorale, que la classe politique nationale a ceci d'extrêmement positif, est qu'elle ne diverge pas sur les intérêts supérieurs de la nation. Les périls économiques et sécuritaires peuvent se développer dans les tout prochains mois pour constituer un danger pour la stabilité du pays. Les prix du pétrole stagnent à des niveaux très insuffisants pour assurer l'équilibre budgétaire, les actions menées dans le cadre du nouveau modèle économique ne sont pas parvenues à une maturité nécessaire pour «éponger» les déficits financiers et la demande sociale sans cesse croissante sera presque impossible à satisfaire dans les conditions actuelles. Les ingrédients d'une instabilité sociale étant réunis, la meilleure manière de la gérer consiste à mûrir toute action gouvernementale en interne et dans l'Assemblée, pour en réduire l'impact négatif et surtout lui donner un maximum de chance d'être accepté par la population. Il faut souligner, à ce propos, que l'enjeu n'est pas simplement financier et économique. Il est également législatif. D'importantes réformes, quelques-unes douloureuses, seront engagées fatalement par le prochain gouvernement. La réforme du Code du travail, la révision du système de subvention des prix et le désengagement progressif de l'Etat en tant qu'investisseur, constituent autant de rendez-vous «chauds» dans l'agenda du gouvernement. Il y aura certainement aussi quelques «victoires» dans la mise en oeuvre du nouveau plan de croissance économique, mais il est clair que l'opinion retiendra plus les «coups» que les nouveaux acquis. Bref, le nouveau gouvernement devra être le plus large possible pour ne pas perdre de temps en longs et éreintants débats parlementaires à forte connotation idéologique face à une série de défis, qui oblige des réponses rapides et efficaces. Le président de la République qui a initié cette démarche, dispose de nombreux leviers pour assurer un rassemblement politique national, qui s'inspirerait de la solidarité gouvernementale et parlementaire à même de raccourcir les délais de réaction du pays aux problèmes de l'heure. Concrètement, la nouvelle Assemblée populaire nationale est déjà acquise au programme présidentiel avec une majorité confortable. Des formations comme le Mouvement populaire algérien de Amara Benyounès, Tajamou Amal El Djazair de Amar Ghoul, l'Alliance nationale républicaine de Belkacem Sahli, ne cachent pas leur engagement auprès du chef de l'Etat et rejoindraient la coalition gouvernementale sans condition. La sécurité, un acquis précieux D'autres partis, à l'image du mouvement El Moustakbal de Abdelaziz Belaïd, créés par d'anciens militants du FLN, pourraient aussi être séduits par l'idée. C'est dire que le rassemblement est déjà là, puisque toutes ces formations politiques ont entre 5 et 19 sièges dans la prochaine APN. Ce qui fait un réservoir parlementaire conséquent à côté de celui du duo FLN-RND. L'association du Mouvement de la société pour la paix de Abderrezak Makri complèterait le tableau et donnerait donc au gouvernement l'opportunité de bénéficier du soutien de plus de 80% de l'Assemblée. Mais il faut dire que l'objectif de ce gouvernement d'union nationale n'est pas de réussir l'arithmétique parlementaire, mais garantir une sorte de consensus au sein des deux pouvoirs exécutif et législatif. Sur le papier, le défi est à portée de main, en ce sens que la quasi-totalité des partis cités a une expérience gouvernementale. Le MSP a pris part à l'alliance présidentielle de 1999 à 2012. Le président du MPA a été ministre deux fois et TAJ a vu son premier responsable occuper plusieurs postes ministériels. A travers leurs ministres toutes ses formations politiques auront le loisir de s'exprimer au sein du gouvernement et enrichir les projets de loi et infléchir, pourquoi pas, certaines décisions gouvernementales qu'ils estimeraient trop dures ou pas assez efficaces. Le propos est donc de réunir les représentants des Algériens autour d'un seul but, celui de passer la période de crise avec un minimum de casse et surtout faire oeuvre de pédagogie auprès de l'opinion nationale sur l'impératif du compter sur soi et sur la rigueur économique et sociale qu'impose la situation financière du pays. Si celle-ci a pu être maîtrisée jusqu'à ce jour et probablement jusqu'à la fin de l'année en cours, il est hors de question pour le gouvernement de poursuivre sur la même logique. C'est le message que Abdelmalek Sellal ne cesse de diffuser lors de ses sorties sur le terrain, tout en mettant en avant l'offre politique et économique du gouvernement, résumée dans le nouveau modèle de croissance. Lequel modèle a séduit la Banque mondiale qui a récemment reconnu la pertinence et propose de travailler avec le gouvernement à son déploiement sur le terrain. Un gouvernement d'union nationale efficace et réactif sera plus proche des réalités socio-politiques et sera certainement mieux écouté. Le reste est une affaire de communication qu'il va falloir bien mener. L'un des acquis précieux d'une telle démarche sera de créditer l'Exécutif d'un préjugé positif, ce qui lui laisserait le temps de mettre les premiers jalons des réformes économiques et sociales. Mais plus important encore, il permettra une visibilité à plus ou moins moyen terme, à même de donner au pays le temps de souffler et pourquoi pas d'espérer. Enfin, l'intérêt d'une équipe qui parvient à stabiliser un tant soit peu le front social, sera de donner aux forces de sécurité les moyens de se concentrer sur la sécurisation du territoire et de la société. Il ne faut pas oublier, à ce propos que le déploiement de l'armée sur le terrain n'a jamais été massif, comme ces dernières années. Le RND confirme sa participation Le secrétaire général du RND a confirmé hier que son parti n'a aucun préalable pour prendre part à la nouvelle équipe gouvernementale. «Nous n'avons pas d'inconvénients pour participer au nouveau gouvernement» a indiqué Ahmed Ouyahia dans une déclaration rapportée par la chaîne de télévision Ennahar. «Le RND n'a pas besoin d'être consulté pour faire partie du gouvernement», a-t-il insisté pour marquer sa qualité de parti au pouvoir et signifier ainsi sa volonté de partager la responsabilité avec le FLN sorti majoritaire des dernières législatives avec 164 sièges. Au sujet de la désignation des membres du gouvernement ainsi que du Premier ministre, Ahmed Ouyahia a rappelé que cette prérogative appartient exclusivement au président de la République. «Le président est seul habilité à désigner le Premier ministre», a-t-il affirmé comme pour trancher avec les lectures faites par la presse nationale à la suite de la rencontre entre le président du MSP, Abderezzak Makri et le Premier ministre Abdelmalek Sellal. Plusieurs titres de la presse nationale ont conclu que le futur Premier ministre est tout désigné, il s'agit de Abdelmalek Sellal.