Bien que revisités, les préparatifs du mois de Ramadhan à Annaba restent liés aux traditions ancestrales. Le Ramadhan, mois de partage, de tolérance et de méditation, est aussi le mois de l'effervescence qui gagne un tant soit peu, les ménages et les commerces à Annaba, comme dans toutes les villes d'Algérie. Le mois sacré est un hôte pour qui on s'attelle à tout préparer avant son arrivée. Chaque famille à sa manière et selon ses moyens veille à l'accueillir noblement. Une noblesse reconduite à travers les temps modernes et l'espace de l'esprit traditionnel. Depuis le grand nettoyage et le relookage des maisons, jusqu' au renouvellement de la vaisselle, en passant par le pilonnage des épices auquel s' adonnent les ménagères ainsi que la préparation d'une variété de pâtes traditionnelles, «chakhchoukha», «maketfa» et bien sûr l'incontournable couscous, que les ménagères roulent, sèchent et stockent dans des sacs en toile. Les maisons annabies sont, telle une classe d'école où rouscailler est autorisé. Dès le mois de «chaâbane», l'égalité s'installe d'elle-même entre les familles. Qu'elles soient riches ou moins aisées, les familles s'arrangent comme elles peuvent, mais surtout comme il se doit, à préparer le mois de Ramadhan. Car, jouissant depuis de nombreuses générations d'une haute considération, l'accueil, la célébration et la glorification du mois de Ramadhan ont de tous temps fait partie des traditions permanentes au sein des familles annabies. Ces dernières, après avoir accompli avec brio la toilette de leurs maisons, à savoir le lavage des vitres, literies et astiquage des meubles et d'objets en cuivre, passent à l'approvisionnement en denrées alimentaires, pruneaux et abricots séchés, pour préparer «tadjine lahlou». Cet incontournable plat avec le «bourek» sur la table ou la «meïda» du premier jour de Ramadhan. Le «frik», «borghol» et toutes sortes d'épices sont soigneusement ficelés pour la préparation de divers plats ramadhanesques. La femme annabie fervente et courageuse a, en dépit du modernisme envahissant le quotidien du commun, est parvenue à conserver jalousement les traditions de ses aïeux. La situation est la même dans les rues commerçantes de Annaba, où, la même agitation a, depuis quelques semaines, atteint son apogée. Depuis les grandes surfaces jusqu'aux espaces commerciaux traditionnels, marchés couverts, El Hattab entre autres, ainsi que les magasins d'alimentation générale, le grouillement se fait de plus en plus. Qui le nez dans les sacs d'épices et qui à la recherche d'une denrée rare et coûteuse comme le safran. D'autres s'approvisionnent en ail et oignons, appréhendant la spéculation, comme ce fut le cas, l'année écoulée, où, le kg d'ail avait dépassé les 1500 DA. Si les Annabis ont su conserver les traditionnels préparatifs pour le mois sacré, ils ont tenu aussi à préserver l'élan de la solidarité dans toutes ses dimensions. La générosité est depuis des lustres devenue un «label» annabi. Généreux de nature, les Annabis le deviennent un peu plus en ce mois sacré. Telles sont les significations particulières du mois de jeûne, nous dira un opérateur économique, sous couvert de l'anonymat. Ce dernier, chaque année, ouvre un «resto du coeur», pour venir en aide à son prochain. «Le plaisir et le bonheur de faire du bien en ce mois sacré, mais surtout l'opportunité de repentance et de prière qui nous maintiennent sur le droit chemin, et ne pas oublier ceux qui ont besoin de nous», nous dira notre aimable interlocuteur. Les Annabis s'accrochent toujours aux traditions et coutumes ramadhanesques, que même les vents de la modernité n'ont pu effacer.