L'Egypte frappe en Libye après l'attentat contre des coptes Déjà, en 2014, l'Egypte avait riposté à l'exécution mise en scène d'un groupe de coptes par Daesh, mais le GNA de Fayez al Serraj ne l'entend pas de la même oreille que les dirigeants de l'Est et parle d'une «violation flagrante de la souveraineté» du pays. Des chasseurs bombardiers ont encore attaqué hier dans l'est du pays la ville côtière de Derna, dans sa partie ouest et dans le quartier de Dahr al Hamar, ciblant les positions des groupes terroristes. Aucun communiqué n'a été publié pour confirmer cette frappe, aussi bien de la part des autorités égyptiennes que des responsables libyens basés à Tobrouk. Après les bombardements de vendredi dernier, lorsque des chasseurs de l'armée de l'air égyptienne ont frappé des camps près de Derna, quelques heures après l'attaque revendiquée par l'Etat islamique contre la minorité copte chrétienne, qui a fait 29 morts et 24 blessés, dans la province de Minya, en Moyenne-Egypte, il semble que les représailles se poursuivent en étroite coordination avec le maréchal Haftar, l'homme fort de l'Est libyen. Des sources proches de la présidence égyptienne ont révélé qu'une soixantaine d'appareils ont été mobilisés pour ces attaques qui ont détruit 15 cibles aux alentours de Derna et Jafra, vendredi dernier, puis trois autres le lendemain. Ce n'est pas la première fois que l'aviation égyptienne intervient en Libye, où l'Etat islamique s'est implanté dès 2011 en profitant du chaos dans lequel était plongé ce pays. Le Caire a choisi de s'appuyer sur le maréchal Haftar et son armée nationale libyenne autoproclamée dont une partie des équipements provient des stocks du puissant voisin. Déjà, l'Egypte avait riposté à l'exécution mise en scène d'un groupe de coptes par Daesh en bombardant le Sud libyen mais le GNA de Fayez al Serraj ne l'entend pas de la même oreille que les dirigeants de l'Est et parle d'une «violation flagrante de la souveraineté» du pays. Une protestation dont Le Caire n'a cure puisque le maréchal Al Sissi a déclaré voici quelques jours que son pays s'accorde un droit de riposte hors des frontières chaque fois que des groupes terroristes attaqueront des ressortissants égyptiens. D'où le soutien accordé au maréchal Haftar qui combat à la fois l'Etat islamique et les milices islamistes diverses, depuis plus de deux ans, sans réellement parvenir à imposer sa loi. On l'a vu au cours des dernières semaines lorsque ses troupes et les milices rivales se sont livrées à des affrontements meurtriers, occupant tour à tour certains terminaux et aéroports dans le croissant pétrolier. Selon le porte-parole de l'ANL, le colonel Ahmed Messmari, dans une conférence de presse à Benghazi, les forces de Khalifa Haftar sont en relation permanente avec l'armée égyptienne durant les frappes aériennes, l'objectif des dernières opérations étant de détruire des stocks d'armes et des camps d'entraînement opérationnels. On sait que ces frappes coïncident avec la vaste offensive du maréchal Haftar, lancée voici près d'un mois et renforcée depuis la tuerie d'une centaine de soldats de l'ANL par la 3è Force, une des milices de Misrata. Une offensive contestée par le GNA de Fayez al Serraj, ce qui n'est pas de nature à favoriser les efforts de rapprochement entre les deux hommes et les instances qu'ils représentent, Tripoli et Tobrouk. Le risque d'une aggravation du conflit n'est donc pas à écarter et c'est pour y parer que la diplomatie algérienne a programmé une réunion les 5 et 6 juin prochain à Alger entre les MAE algérien, égyptien et tunisien pour «procéder à une évaluation de la situation, à la lumière des récents développements sur le double plan politique et sécuritaire». A Derna, l'EI n'est pratiquement plus maître des lieux depuis son expulsion en juin 2015 après des affrontements sanglants avec d'autres groupes djihadistes regroupés sous le label de majlis choura Al-Moudjahidine Derna («Assemblée consultative des moudjahidines de Derna»), proches d'Al Qaïda. Mais les germes doctrinaux sont les mêmes et face aux vélléités de l'ANL de Haftar qui compte s'emparer de la seule ville qui échappe à son contrôle sur l'ensemble de la Cyrénaïque les milices sont elles aussi prêtes à transcender leurs différends et à faire cause commune. Un argument volontiers brandi par le maréchal auprès de ses interlocuteurs arabes et russes auxquels il se présente comme le seul vrai rempart contre un basculement de la Libye dans le giron des Frères musulmans ou pire d'al Qaïda et de Daesh. Les récents évènements lui apportent de l'eau au moulin et laissent penser que les assauts répétés depuis plus d'un an contre la ville de Djoufra pour en chasser les Brigades de défense de Benghazi (BDB) pourraient se révéler fructueux. Contrairement à l'Egypte où Daesh compte encore quelque 1000 combattants, pour la plupart actifs dans la péninsule du Sinaï, la Libye est loin d'être un sanctuaire pour ce groupe terroriste, depuis sa lourde défaite à Syrte. Par contre, sa présence est impérative si l'EI, qui profite du chaos et des multiples activités de contrebande, veut conserver ses sources d'approvisionnement en armes et en djihadistes dont l'entraînement est assuré sur place. Ce qui l'amène à maintenir de petites escouades dispersées dans le sud et à la frontière sahélienne, pour le cas où...