Les droits à l'opposition, à l'appel et/ou au pourvoi «ne sont plus évidents». A la cour d'Alger, la situation est sur le fil du rasoir. La colère des avocats qui s'insurgent contre «les atteintes aux droits de la défense et leurs graves implications sur l'exercice de la profession», risque de prendre une mauvaise tournure. Cela dépendra de ce que décidera le Conseil de l'ordre des avocats de la cour d'Alger, mais aussi de ce que sera la position des autorités et des organes concernés par rapport aux réclamations énoncées par la famille de la défense. En tous les cas, cette sentence a été clamée, hier, haut et fort par M.Silini, bâtonnier de l'ordre des avocats d'Alger et ce, lors d'un point de presse tenu dans l'enceinte du Palais de justice. Le ton était loin d'être conciliant en parlant des obstacles «persistants» rencontrés par l'avocat dans l'exercice de son métier et de leurs «conséquences néfastes sur la préservation de droits de la défense». Pour l'heure, aucune action n'a été décidée même si le recours à la grève et/ou à la protestation n'a pas été exclu. «C'est le ras-le-bol général et l'exercice de la profession devient des plus difficiles vu les violations répétitives des lois régissant l'exercice de notre métier», explique M.Silini d'une voix de stentor. Il ira encore plus loin dans son réquisitoire. Il dira, sur un ton colérique, que «l'institution de la défense et la robe de l'avocat ne sont plus reconnues au sein de la cour d'Alger», soulignant au passage le «mépris affiché à l'égard de la famille de la défense par les hautes instances de la justice». Pour étayer ses dires, le conférencier fera savoir que depuis «quatre ans le Conseil de l'ordre des avocats d'Alger n'a pas cessé de demander audience au parquet». Ce dernier, a-t-il ajouté, «accusait une fin de non-recevoir à la plupart des demandes formulées». Pis encore, «des prérogatives attribuées aux avocats ne sont plus reconnues dans l'enceinte du tribunal», a-t-il renchéri d'une voix plus sonore. En guise d'illustration, l'orateur, soutenu par plusieurs de ses confrères et consoeurs, laissa entendre que les droits à l'opposition, à l'appel et/ou au pourvoi «ne sont plus évidents». Le comble, poursuit-il, «l'on programme des sessions extraordinaires et l'on procède à des condamnations par défaut». La phrase retient immédiatement notre attention et le débat n'a pas été tout de suite lancé. «On veut tromper qui?», s'interrogea-t-il, avant de renchérir, sur un ton sec, «on en a marre de ces pratiques et de ces intimidations. On dirait que nous sommes dans un désert où toutes les lois régissant la profession sont violées». Puis il y eut un court hiatus dans la salle du fait des ovations. Sans se lasser, M.Silini prend, cette fois-ci, carrément le taureau par les cornes en disant qu'il existe même «une volonté d'opposer les magistrats aux avocats». «C'est une atteinte grave et une dérive impardonnable», a-t-il qualifié. Sa voix se fit grave et solennelle. Il dira aussi que «la réforme de la justice ne peut se faire avec une gestion à l'importe-pièce et la profession de la défense ne peut être également exercée avec des règles de jeu étrangères à l'institution». Le comble, a-t-il tenu à souligner, «non seulement nos demandes d'audience sont restées lettre morte, mais on nous refuse également de rencontrer le bâtonnier de Paris, à la suite d'une sollicitation formulée par ce dernier». Avant de quitter la salle, on apprend qu'une réunion est programmée pour le 25 du mois en cours avec le procureur général près de la cour d'Alger. Notre source a précisé, en marge de la conférence, que le principe d'une telle rencontre a été décidé par le procureur général à la suite de la colère qui animait, depuis quelque temps, la famille de la défense. Ce pourrait être même «la case départ pour un processus de concertation devant juguler la crise», a-t-on indiqué aussi. Faute de quoi, l'organisation de journées de protestation n'a pas été un recours exclu par le conférencier.