Mardi soir a été le rendez-vous de la bonne humeur et de l'espoir retrouvés pour des centaines de personnes venues assister à la première représentation dans une salle El-Mouggar enfin rénovée et ouverte au public. Un sentiment perceptible sur tous les visages se bousculant dans le hall de réception. Un moment d'attente a été requis pour s'assurer de la présence de tout le monde, en particulier de ces acteurs incontournables sans lesquels une cérémonie de cette taille perdrait de sa portée. Le ministre de la Communication et de la Culture, Mohamed Abbou, fera enfin son entrée en compagnie de Hamraoui Habib Chawki, directeur général de l'Entv, et c'est à cet instant que s'ouvrent les portes de la salle de spectacle laissant échapper le mystère. La salle Mouggar est...bleue. Il paraît que c'est tendance. En 1995, ce mythique théâtre, qui a vu défiler sur ses planches des noms phares de notre culture tels que les regrettés Alloula, Kaki, Medjoubi, Mohamed Wahbi, El Anka et bien d'autres encore, tombait en ruines sous la furie des flammes. Les travaux de réfection, entamés officiellement en 1997 avec le ministère de la Communication et de la Culture en tant que maître d'ouvrage, ont dû changer de main et être confiés à l'Office national de la culture et de l'information en mai 2000. Le théâtre n'aurait, selon quelques indiscrétions, subi aucun changement sous le règne du ministère. L'Onci est désormais propriétaire de cette structure d'une capacité d'accueil de 634 sièges. Le montant des travaux, affiché dans le hall de réception au milieu d'autres informations et de photographies de l'intérieur du théâtre endommagé par l'incendie, est de près de 150 millions de dinars. L'implication de 19 entreprises, entre la réalisation et l'équipement, a été nécessaire pour mener à bien les travaux qui ont duré, tout compte fait, pas plus de deux ans. Sonia, la lauréate du Tanite d'interprétation à Carthage cette année avec sa pièce Les Saltimbanques, est montée la première sur scène pour traduire la joie de la caste artistique, toutes disciplines confondues, à l'occasion de ce nouvel acquis, un espace de production qui, soulignera-t-elle, n'est pas la propriété de l'Onci, mais qui revient à tous les artistes. Le représentant de l'Onci, Nazih Benramdan, fera, quant à lui, une courte rétrospective sur ce monument en espérant le voir redevenir le centre d'activité qu'il fut autrefois. La politique de l'Office national de la culture et de l'information est quelque peu clarifiée dans un document d'offres de service où il propose de mettre à la disposition de toute partie désireuse de l'acquérir, un ensemble de moyens humains et matériel comprenant des équipes artistiques et techniques, ainsi que les infrastructures dont dispose l'Office, à savoir la salle Mouggar flambant neuve et celle de l'Atlas. Mais si le public était là, c'était en grande partie pour le spectacle. Nous allons enfin savoir ce que le nouveau Mouggar a dans le ventre. Avec Houb oua djounoun fi zaman el mahboub, une comédie musicale mise en scène par Fouzia Aït El-Hadj, le théâtre devait passer l'épreuve de l'acoustique, un volet qui a, comme bon nombre d'autres éléments, bénéficié d'une attention particulière. La pièce a transporté le public, le temps d'une Mazghana, sous le charme d'une Andalousie en pleine effervescence. Né entre l'Espagne et le Maghreb, cet hybride, est devenu, en grandissant, la source d'une culture exceptionnelle. Elle a donné vie à une littérature, une musique, une architecture, un mode de vie qui ont traversé le temps et les frontières. Yasmina, qui écrit, compose et pratique la musique, a vent de l'arrivée à Mazghana, sa ville, du maître des vers Djamil Mezghana établi en Andalousie. El-Hadj Mahmoud, le père de Yasmina, féru de verbe venait de l'inviter à l'une de ses prestigieuses joutes poétiques qu'il avait l'habitude d'offrir à un cercle de privilégiés. La visite de Djamil va poser la première pierre d'un récit dramatique qui déroulera passions, violence et amertume. La troupe comptant des membres du ballet de l'Onci a offert, au grand bonheur du public plusieurs tableaux chorégraphiques, entre l'antique cité de Mezghana et une ambiance bien plus contemporaine, chaque fois applaudie. L'ouverture de la salle Mouggar coïncide avec la visite de la troupe égyptienne en tournée en Algérie. Hier, la formation devait y donner une représentation. Les deux dernières soirées du ramadan vivront grâce à l'inépuisable Sonia. Aujourd'hui, avec Les saltimbanques et demain, en compagnie de Rachid Farès pour Nuit de divorce.