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De l'intérêt des uns et des autres
FLAMBEE DES PRIX DU PETROLE
Publié dans L'Expression le 23 - 05 - 2005

Le puissant lobby pétrolier américain a soutenu le président George W. Bush lors des deux élections présidentielles.
Le prix du pétrole a toujours été d´une importance capitale pour l´économie algérienne. Cet article consacre une analyse sur l´évolution du prix du baril durant les dernières années et des prévisions pour l´avenir. La première question qui a toujours préoccupé les Algériens est de savoir pourquoi les Saoudiens, premiers producteurs du pétrole au monde avec une capacité de production atteignant les 10 millions de barils par jour, militent pour un prix du baril bas. L'on pourrait penser que l'Arabie Saoudite veut un prix bas pour faire plaisir aux Américains. La véritable raison tient du fait que les Saoudiens ont investi la colossale somme de 700 milliards de dollars dans les marchés boursiers obligataires, monétaires et immobiliers occidentaux. Ils redoutent la flambée du prix du baril pour la simple raison qu'un pareil scénario donne un coup sérieux à tous ces investissements. Partant de cette logique strictement économique, les Saoudiens augmentent leur production pétrolière et exercent des pressions sur les pays de l'Opep pour faire de même.
La guerre d´Irak a été un facteur déterminant dans la hausse des prix du pétrole, défiant par là même la prophétie des experts, qui, eux, tablaient sur une chute du brut avec un prix variant entre 15-20 dollars. Mais cela n'est pas la seule raison. Il ne faut pas oublier, en effet, que le puissant lobby pétrolier américain a soutenu le président George W. Bush lors des deux élections présidentielles. Des représentants de ce lobby occupent d'importants postes dans l'administration Bush et ne veulent pas revivre la situation de 1986 où les cours du prix de pétrole s´étaient effondrés, passant de 40 à 10 dollars. En effet, alors que pour les pays industrialisés, en général cette chute des cours avait donné une bonne stimulation de croissance et un recul de l´inflation, pour les USA et plus particulièrement les Etats pétroliers, à leur tête le Texas, cela a provoqué une catastrophe économique. L´effondrement des prix de l´immobilier (maisons et immobilier commercial) et les faillites des teneurs d'emprunts obligataires, en ont été parmi les conséquences. De plus, de grandes banques américaines ont été affectées. Le Texas à lui seul représentait le quart des pertes, le autres Etats, touchés par la récession sont l'Arizona, la Californie, New York, New Jersey et la Pennsylvanie. La question qui se pose aujourd´hui est de savoir si le président Bush et son entourage de pétroliers acceptent un scénario catastrophe semblable à celui de 1986.
Théorie du complot
Pour l'heure, des arguments justifiant un prix du baril atteignant les 100 dollars existent. Et pour cause, en 1980 le pétrole valait 30 dollars, et si on calcule ce prix en tenant compte de l´inflation annuelle jusqu'en 2005, on ne s´étonnerait pas de voir ce prix dépassant les 100 dollars, une analyse tout à fait logique. Le prix d´une voiture ou d´un avion aujourd´hui est 4 à 5 fois celui de 1980. Il existe même une volonté délibérée des compagnies pétrolières américaines (théorie du complot) de ne pas construire de nouvelles raffineries afin que le prix du pétrole d´essence soit maintenu à un haut niveau. A ce propos, il est utile de suivre un certain nombre d'indicateurs à même de donner une vision assez claire de la situation : Pour avoir une idée sur l´évolution du prix du brut, il est très important de surveiller l´inflation américaine de très près. La hausse du prix du baril est liée à celle de l´inflation. Or, on remarque aujourd´hui aux USA une situation économique inhabituelle. Une inflation faible et un prix du brut élevé. Cette relation contre-nature est due à un phénomène économique nouveau, appelé la nouvelle économie. Telle que définie par Alan Greenspan, la nouvelle économie consiste en une croissance sans inflation. Et dans ce contexte, on remarque les premiers effets de ce phénomène sur les indicateurs macroéconomiques américains qui se distinguent par un caractère contradictoire. Un jour on publie un indicateur économique qui signale une chute d´inflation et le jour d´après un autre indicateur qui signale un mouvement vers le haut du taux d´inflation.. En conclusion, je dirais ceci : l´économie américaine actuelle supporte le prix élevé du pétrole et cela est bien pour l´Algérie.
L´inflation américaine de base, exceptée les prix des produits énergétiques et à un degré moindre les prix des produits alimentaires, est en général saine (faible ou moyenne). Le directeur de la Banque centrale américaine (FED) M. Alan Greenspan surveille de très près le mouvement du taux d´inflation et pour mater ce «démon financier», il utilise l´arme des taux d´intérêt, le moindre mouvement haussier confirmé de l´inflation, M. Greenspan procède à une élévation des taux d´inserts. Mais si cette inflation causée par la hausse des prix des produits énergétiques et des prix des produits de base devient insupportable, on pourra envisager deux scénarios possibles. Le premier est d'ordre politique et le second, d´ordre financier.
Tout est dans l'inflation
Lorsque l´inflation devient un danger réel pour l´économie US et mondiale, le gouvernement américain entreprend des mesures conventionnelles et non conventionnelles pour ramener le prix du brut à un niveau raisonnable en créant des pressions sur les pays de l´Opep les incitant à augmenter leurs productions pétrolières. L'ouverture de l´Etat de l´Alaska à l´exploitation pétrolière et l'encouragement des nouvelles énergies devant prendre le relais du brut en accordant des réductions fiscales pour les exploitants et les consommateurs de ces nouvelles énergies, constituent autant de moyens probables pour réduire les prix du pétrole. Il est entendu également que l´inflation freine la croissance mondiale et conduit à la baisse de la demande du pétrole sur le marché entraînant avec elle le prix du pétrole.
Il est devenu clair maintenant que le prix du baril se fixe dans la Bourse de Nymex et non pas pendant les réunions des pays de L´Opep comme ce fut le cas avant. Le marché pétrolier de Nymex est orienté généralement vers le spot market (le marché à terme). Ici on retrouve toute une communauté financière américaine et internationale et des poids lourds comme les mégafonds américains. Tout ce monde spécule sur la hausse et la baisse du prix du baril.
Comment peut-on connaître l´orientation du marché et faire des prévisions sur l´évolution du prix? Il faut observer d'abord attentivement le volume des échanges des contrats à terme (les livraisons futures) achat et vente. Si le volume d´échanges des contrats à terme achat est largement supérieur à celui de vente, alors le prix du brut est dans une tendance haussière. A l'inverse, par contre, c'est la tendance baissière qui se réalise. Un autre marché moins important que celui à terme, est le marché des dérivés (les options et warrants).
Le principe est le même pour les options et les warrants où le CAL=Achat et le PUT=Vente .
Le plus important à retenir, ce sont les déclarations des dirigeants de grandes compagnies américaines et internationales sur les perspectives d´avenir de leurs entreprises, les bénéfices futurs et surtout les investissements futurs car cela nous donne une idée sur l´état de santé de la branche pétrolière et par conséquent, une visibilité sur l´évolution du cours du brut. Une augmentation des bénéfices ou un accroissement des investissements est positif pour le cours du pétrole. Par contre, une révision à la baisse des résultats signale un ralentissement des investissements ce qui en résulte par une baisse du cours du brut.
Les plus grandes agences de notation financière sont au nombre de trois : Moody, Standard And Poor et Fitch. Ces agences jouissent d´un grand respect de crédibilité auprès du monde financier. L´expérience du krash des valeurs technologiques en 2000 nous a appris que ce sont les agences de notations qui essaient les premières de tirer la sonnette d´alarme. Pour ce qui nous concerne, si nous voyons que ces agences commencent à dégrader d´un cran ou plusieurs crans les grandes compagnies pétrolières américaines, cela voudra dire avec une grande probabilité que la branche du pétrole est en début de crise.
Méfions-nous par contre des grandes banques d´affaires américaines et internationales, telles la Morgan Stanley, Goldman Sasch, Merril Lynch, Deutch Bank, la Société Generale et UBS. Ils ne sont pas fiables. 80% des conseils et des recommandations de ces banques se sont avérés faux. La théorie de complot, d'ailleurs, n´est pas exclue.
La Chine est devenue un grand acteur sur l´échiquier international pétrolier, avec une consommation boulimique du pétrole due à sa croissance économique élevée, avoisinant les 9% par an. Ce pays commence à sentir la surchauffe de son économie. Pour cela et comme l´a insinué le directeur de la Banque centrale chinoise, ce pays pourrait avoir recours à une révision à la hausse des taux d´inserts pour «refroidir» son économie. Nous assistons ces derniers temps à des menaces protectionnistes de la part des USA et de l'EU à l´égard des exportations chinoises de textile. Mais ce que veulent réellement les Américains et les Européens, c´est que la Chine réévalue sa monnaie, le Yuan, pour diminuer le déficit de la balance commerciale extérieure des USA et EU vis-à-vis de la Chine et de rendre les produits américains et européens concurrentiels avec ceux de la Chine.
À mon avis la Chine finira par réévaluer le Yuan. La réévaluation de la monnaie est aussi un moyen de refroidir l´économie surchauffée à court terme et en même temps une stimulation de cette même économie à long terme. Certes, ce refroidissement va ralentir la croissance chinoise et par conséquent une diminution de la consommation pétrolière qui aura un impact négatif sur le cours du brut. Mais ce scénario est à court terme. Personnellement, je me demande si ce scénario négatif n´est pas déjà inclus dans les prix du brut.
Une vieille nouvelle relation s´est établie ces derniers temps sur le marché financier. Le prix des cours des actions va dans le sens inverse avec celui du prix du cours du pétrole. Quand la Bourse grimpe, le pétrole chute et l´inverse.


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