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"Les Rifains se sont soulevés contre la répression du Makhzen"
JAMEL EL KHATABI, UNIVERSITAIRE ET CHERCHEUR, EN HISTOIRE À L'EXPRESSION

Descendant de la famille du légendaire Abdelkrim El Khatabi, fréquemment appelé Moulay Mohand par les Rifains, Jamel El Khatabi est universitaire et chercheur en histoire du Rif notamment. Il est également membre de l'Institut Abdelkrim El Khatabi pour la recherche et la publication. Etabli aux Pays-Bas Jamel El Khatabi est également militant des droits de la diaspora rifaine. Dans cet entretien, il dissèque les raisons intrinsèques qui ont poussé les Rifains à la révolte.
L'Expression: Depuis plusieurs mois, le Rif s'enflamme. Où s'arrêteront les manifestations du Hirak et celles qui s'allument dans d'autres régions du Maroc?
Jamel El-Khatabi: Les manifestations du mouvement de contestation Hirak qui refuse de s'incliner avant que ses revendications ne soient satisfaites, en l'occurrence la libération de tous les détenus politiques, ne peuvent aujourd'hui s'arrêter à mi-chemin de sa lutte. Jour et nuit, les Rifains sont dans les rues à crier leur colère et braver la mort et les geôles du Royaume. C'est dire que cette région est frondeuse et hostile aux autorités qui lui ont imposé un statut spécial «zone militarisée», depuis la chute de la République de Abdelkrim El Khatabi comparativement aux autres régions du Maroc. Par conséquent, elle ne compte pas rester insensible aux frémissements des vents de liberté qui soufflent sur ses terres. Aujourd'hui, des revendications ont été présentées aux autorités lors d'une grande manifestation qui a eu lieu le 9 mars dernier à Al Hoceïma. La liste des revendications comprend 21 points, parmi lesquels on y trouve entre autres la construction d'un hôpital qui répond aux besoins de la population du Rif et celle d'une université qui pourra réduire les souffrances des étudiants qui sont maintenant obligés de se déplacer pour suivre leurs études loin du Rif, la création de postes d'emploi parce que le taux de chômage au Rif est trop élevé. Néanmoins, la revendication principale demeure celle de l'abolition du décret considérant la région du Rif comme une région militaire depuis le 24 novembre 1958.
Cependant, depuis les vagues d'arrestations et d'enlèvements visant de nombreux leaders et des activistes, le mouvement pose comme priorité la libération de ces derniers sans conditions. Il faut signaler enfin que les détenus ont été gravement torturés pendant les périodes d'arrestation d'après leurs avocats. Quant aux manifestations dans d'autres régions du Maroc, qui étaient tout au début solidaires avec le Hirak du Rif, aujourd'hui, ces régions réclament, à leur tour, leurs propres revendications leur permettant de préserver leur dignité.
A votre avis, ce mouvement de contestation rifain s'essoufflera-t-il si le Makhzen s'entête dans sa répression et ignore le cri de colère des Rifains?
Le Makhzen, au lieu de répondre aux besoins de la population rifaine a préféré la langue du fer et du feu. Ainsi, a-t-il arrêté des dizaines d'activistes et de manifestants dont le nombre avoisine 200 personnes et parmi lesquelles on trouve les leaders de la contestation, en l'occurrence Nasser Zafzafi et l'artiste Silya Ziyani. Malgré ces arrestations et le renforcement par des forces militaires dans la région, la contestation ne cesse de se propager partout dans le Rif et les autres régions du Maroc. Nous souhaitons que ces manifestations organisées au Maroc et en Europe ainsi que des pétitions signées aboutissent à la libération des détenus du Hirak et à l'instauration d'un dialogue pour résoudre le conflit.
Le Rif est désespérément pauvre et totalement ignoré par le royaume. Le haschisch, source de richesse mafieuse, se vend à la régulière et la prostitution se pratique également. Une situation sans cesse dénoncée par les mouvements rifains en particulier et marocains en général. Ne pensez-vous pas que cette situation est voulue par le Makhzen?
La production de cannabis occupe une place importante dans l'économie du Maroc. Un rapport de l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime estime cette production à 700 tonnes pour les deux dernières années (2015 et 2016). Le revenu de cette culture selon un rapport du département d'Etat américain est de 23 milliards de dollars. Le Nord est devenu la deuxième région la plus riche du Maroc alors qu'elle est extrêmement marginalisée. Malgré les revenus élevés de la drogue et les revenus des travailleurs émigrés (6,2 milliards de dollars? en 2016), la région du Rif reste pauvre et marginalisée à tous les niveaux par le pouvoir central. En plus de ça et d'après des chiffres officiels, il y a environ 35.000 cultivateurs de cannabis recherchés par les autorités marocaines. Cette situation dure maintenant depuis plus de 60 ans. La plupart des gens pensent toujours à quitter le pays pour l'Europe. Le Makhzen ne fait pas beaucoup d'efforts pour que la région soit développée et équipée. Les investissements sont aussi presque nuls, ce qui fait que le chômage est deux fois plus élevé que dans les autres régions du Maroc.
Répression, marginalisation du Rif, laisser-aller des autorités, revendications socio-économiques et culturelles du mouvement Hirak étouffées et ignorées par le royaume.... Quelle issue entrevoyez-vous pour cette situation explosive?
Depuis sept mois, une formidable mobilisation populaire (Hirak) a embrasé toutes les régions du Rif, pour exiger le jugement et le châtiment des responsables de la mort du jeune vendeur de poisson Mohsin Fikri, broyé par une benne à ordures le 28 octobre 2016. C'est pourquoi le mouvement populaire a pris une ampleur sans précédent en se basant sur des comités créés dans l'ensemble des régions du Rif. Ce soulèvement est contre la répression et la militarisation de la région du Rif d'une part, d'autre part pour le développement de la santé, de l'éducation et des infrastructures. Face à la résistance du mouvement (Hirak) et la perspective de son extension dans d'autres régions du Maroc, les autorités ont enclenché depuis le 26 mai 2017 une répression policière de grande ampleur et une vague d'arrestations des principaux dirigeants du mouvement dont le leader du Hirak Nasser Zafzafi. Jusqu'à maintenant, il y a eu plus de 186 arrestations et des dizaines de convocations de la part des gendarmes ou de la police. Les observateurs des organisations internationales constatent des violations graves des droits de l'homme lors des arrestations et des périodes de garde à vue. Selon les avocats, les accusations sont très lourdes. Le pire est que le Makhzen veut impliquer ses ressortissants solidaires avec le Hirak dans cette affaire.
Le mouvement rifain ne risque-t-il pas d'être récupéré par les islamistes comme cela a été le cas dans la quasi-totalité des pays arabes touchés par les vents du printemps arabe?
Le leader du Hirak, Nasser Zafzafi, divise toujours la société marocaine entre ceux qui le considèrent comme le meilleur porte-parole des masses et de leurs revendications socio-économiques, et ceux qui le considèrent comme une personne inspirée par les islamistes. Mais Zafzafi se présente lui-même comme un simple citoyen très sensible à ce qui se passe dans sa région natale. Comme tous les jeunes, il a des occupations diverses, notamment le sport et le basket-ball. Sa principale caractéristique, dit-il, est qu'il exprime ce qu'il pense sans détour et ça peut être aussi son point faible. Zafzafi a vu le jour dans une famille de militants, son grand-père cheikh el Jazid était ministre de l'Intérieur sous Abdelkrim El Khattabi. Son père était un militant de l'Usfp dont il a démissionné quand le parti est entré au gouvernement. Zafzafi et les autres activistes du Hirak se sont inspirés du héros historique des Rifains Abdelkrim. C'est pourquoi ils portent son drapeau et ses photos pendant les manifestations organisées dans le Rif. D'un autre côté, on n'a jamais vu de symboles des islamistes dans ces manifestations.
Le Rif rêve-t-il toujours de sa République et de se séparer du Maroc?
Je ne le pense pas, les revendications du Hirak sont socio-économiques et culturelles. Vu sa spécificité historique, la région du Rif mérite sans doute une autonomie, mais sous la royauté du Maroc. Les gens estiment réalisés les droits fondamentaux comme le travail, l'éducation et la santé pour tout le monde. Pour les Rifains, la question n'est pas d'avoir une monarchie ou un système républicain. L'important, c'est d'avoir la liberté, la justice et la dignité.


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