Alors que la date butoir du 15 août approche, les Irakiens négocient toujours la composition de la commission de rédaction de la Constitution La guérilla a encore frappé lors des dernières quarante-huit heures faisant une dizaine de morts et de nombreux blessés en Irak. De fait, la violence et la précarité de la situation ont quelque peu relégué au second plan un élément pourtant primordial au retour à la normalité en Irak: la rédaction de la future Constitution permanente du pays. Or, cette rédaction commence à prendre un retard préjudiciable à la mise en application du programme permettant un retour progressif à un Irak institutionnel. Avant même qu'elle commence la rédaction de la future Constitution, la commission est confrontée à un sérieux problème de représentativité. De fait, le début des travaux de rédaction bute sur la composante de ladite commission, monopolisée par les chiites, (avec 55 membres) au détriment notamment des sunnites auxquels a été concédées, dans un premier temps, deux places dans la commission, avant qu'il ne leur soit proposé treize postes estimés insuffisants et peu représentatifs de la réalité démographique en Irak (les sunnites représentant quelque 25% de la population). Il est vrai, cependant, que les sunnites, qui ont massivement boycotté le scrutin législatif du 30 janvier dernier, récoltent les fruits de leur inconséquence politique en étant sous-représentés au Parlement élu. Maintenant le problème qui se pose aux autorités irakiennes est qu'une loi fondamentale rédigée en l'absence des sunnites risque fort de reproduire un système inégalitaire qui a été reproché naguère au régime baasiste, lequel a ignoré les chiites et les minorités ethniques irakiennes. La reproduction d'un tel déni de droit augurerait mal de la construction d'un Irak démocratique et prêterait le flanc à la suspicion. De fait, les sunnites exigent au moins 25 représentants à la commission de rédaction, contestant le nombre (13 représentants) qui lui est proposé par les autres membres (chiites et kurdes) de la commission. Dans une déclaration hier à la presse, le chef des Bien Habous (Wakfs), Adnane Doulaimi, a affirmé, en marge du congrès consacré à la participation sunnite: «Il ne faut pas que le nombre de nos représentants soit inférieur à 25». Cette participation, appelée de ses voeux par le gouvernement dominé par les chiites et les Kurdes, se heurte cependant au nombre inadéquat de la représentation sunnite dans la composante de la commission de rédaction. M.Doulaimi a indiqué d'autre part: «Nous allons proposer demain (aujourd'hui) 40 noms parmi lesquels nous souhaitons voir 25 sélectionnés et, en cas de litige, nous proposerons un arbitrage». Ainsi, la commission de rédaction est toujours à la recherche d'une composante appropriée et représentative de la communauté irakienne alors que le temps presse, et que le 15 août, date butoir de remise du texte constitutionnel, se rapproche inexorablement. Notons aussi, que la réunion d'hier s'est faite en l'absence du Comité des Oulémas d'Irak (influente association religieuse sunnite) qui refuse de cautionner un processus politique qui se met en place sous la tutelle étrangère. Revenant sur la rédaction du texte constitutionnel irakien, l'ONG internationale, International Crisis Group (ICG, animée par d'anciens hauts responsables américains) a indiqué dans un rapport publié hier à Bruxelles, que «les Irakiens font face à un dilemme: accélérer le processus constitutionnel pour respecter la date butoir du 15 août (...) ou encourager un processus qui serait transparent et garantirait un plus grand soutien populaire». Tout en estimant délicate une décision sur ce contexte, l'ICG indique toutefois qu'un texte «basé sur un consensus populaire» aurait le plus de chance de démobiliser la rébellion irakienne, et même de «gagner son soutien», au processus en cours, qui serait propice, selon ICG, à favoriser «la stabilité» du pays. Notons, par ailleurs, que le président Bush a réitéré mardi, lors d'une conférence de presse commune avec la Premier ministre britannique, Tony Blair, que les Etats-Unis ne «retireront pas leur armée dans l'immédiat» indiquant «les Etats-Unis et la Grande-Bretagne se tiendront aux côtés du peuple irakien alors qu'il continue son voyage vers la liberté et la démocratie», ajoutant: «Notre stratégie est claire. Nous entraînons les forces irakiennes afin qu'elles puissent combattre l'ennemi et soient capables de défendre leur pays. Alors nos troupes reviendront à la maison».