Le Conseil de l'Europe, réuni à Laeken, près de Bruxelles, va harmoniser son dispositif antiterroriste. De nombreux points, qui seront décidés, intéressent notamment des pays comme l'Algérie, qui s'est montrée critique à l'égard des ambiguïtés juridiques des Quinze de l'UE. L'adoption des nouvelles résolutions par le Conseil de l'Europe va porter sur trois volets d'importance: le volet concernant le mandat d'arrêt européen, celui relatif à la définition des crimes terroristes et sur les peines de prison minimales pour les terroristes. Le Conseil de Laeken adoptera ainsi des mesures décidées par les ministres de la Justice et de l'Intérieur de l'UE, le 7 décembre dernier. Hasard du calendrier ou ironie de l'Histoire, le président Bouteflika sera, lundi, à Bruxelles, afin d'assister à la cérémonie de signature des accords Algérie-UE qui ont mis des mois à se concrétiser après avoir buté, ces dernières semaines, sur le volet consacré au... terrorisme. De l'avis des diplomates au fait du dossier des négociations, Alger a arraché, face à Bruxelles, ce qu'elle a toujours revendiqué en matière de lutte antiterroriste. Après avoir patienté plus de cinq années par rapport à ses voisins maghrébins (Tunisie, Maroc), l'Algérie a réussi à négocier un accord-cadre de coopération antiterroriste assez avantageux pour le considérer comme un acquis diplomatique. Le Président Bouteflika l'avait dit à un Romano Prodi, venu en juin dernier à Alger afin d'aplanir les divergences de vue et demander aux Algériens de mettre du lest dans une position jugée trop ferme, voire «dogmatique» vis-à-vis du terrorisme. Le «séisme» du 11 septembre aux Etats-Unis a complètement inversé cette donne, puisque Alger avait, dès lors, «négocié sur du velours» sur la question sécuritaire malgré quelques réticences européennes. Il s'en est suivi un branle-bas de combat politique au sein de l'UE qui s'est manifesté par une accélération des mesures à adopter face au terrorisme. Le fait que les attentats antiaméricains aient été, dans leurs aspects technique et logistique, préparés dans certains Etats de l'Union (Allemagne, Espagne, France, Grande-Bretagne...) a, sous la pression américaine de traquer les bases avant d'Al-Qaîda, modifié la perception européenne. Les Quinze voulaient uniformiser leurs actions contre le terrorisme, ce que le sommet de Laeken s'apprête à réaliser. Reste à savoir en quoi ces mesures peuvent améliorer la coopération antiterroriste entre Européens et Algériens. Le mandat d'extradition européen va certainement permettre aux Européens d'accélérer la livraison de terroristes, détenus dans leurs pays respectifs. Les cas sont nombreux, notamment entre Bonn, Paris, Londres et Madrid. Mais sur le volet des extraditions vers les pays hors Union, dont l'Algérie, la Tunisie, l'Egypte ou le Liban, qui réclament des ressortissants accusés de terrorisme, les mesures européennes sont discrètes. Pourtant, l'Espagnol Josep Pique ou le Français Jacques Chirac ont affirmé, à Alger, que le dossier des extraditions sera réglé avec l'Algérie, dès l'entrée en vigueur des nouvelles mesures issues de Laeken. Reste le proche avenir pour tester la bonne volonté européenne. Sur l'aspect des peines minimales pour les terroristes, l'adoption d'un délai préventif pour des crimes terroristes est importante dans la mesure où les tribunaux européens se montrent généralement cléments à l'égard des membres des réseaux de soutien islamiste. Les terroristes, arguant le fait de «la liberté d'expression et de manoeuvre» garantie en Europe, participent de par la logistique, le financement et la propagande au développement des réseaux terroristes en Europe et au soutien des réseaux terroristes locaux. Même s'ils sont appréhendés, ces terroristes ne risquent qu'un maximum de cinq ans qui se transforment, par le jeu des remises de peine, à quelques mois de prison (deux années maximum). Ils sont ainsi rapidement réinjectés dans le circuit et continuent à faire activement partie des réseaux terroristes. Le cas des réseaux du GIA est la parfaite illustration du laxisme juridique sur la question des peines de prison. L'Europe harmonise ainsi son dispositif et veut montrer patte blanche quant à sa détermination à lutter contre les réseaux terroristes. Alger ne peut que s'en féliciter en attendant, évidemment, que les résolutions de Laeken ne rejoignent pas le placard poussiéreux des textes jamais appliqués.