Le plan d'action, les enjeux économiques et la qualité de leur adversaire, donneront aux leaders de l'opposition la possibilité de se faire entendre du public. Pour l'opposition, Ahmed Ouyahia est quelque part du pain bénit. Excellent orateur et rompu aux répliques politiques, dont certaines ont fait date dans l'histoire récente du pays, le Premier ministre garantit donc des joutes oratoires de haut niveau. L'opposition, qui a également ses ténors, en les personnes de Louisa Hanoune, Abderrezak Makri, Mohcen Belabbès ou encore Chaffa Bouaiche, marquera le moment politique par des interventions certainement remarquables. Lesquelles appelleront des réponses tout aussi bien confectionnées par le Premier ministre. C'est dire que l'exercice des partis de l'opposition vaudra la peine d'être mené. Les Algériens auront l'opportunité, à travers la télévision publique qui diffusera en direct les débats, d'évaluer objectivement les propositions de Ahmed Ouyahia et les critiques de ses contradicteurs. Ces derniers ont intérêt à construire leurs interventions sur des bases solides et vérifiables, car le Premier ministre ne les ratera pas en cas d'usage d'approximation ou de fausses informations à l'appui de leurs discours. Cela pour le «spectacle politique». Sur le fond il convient de souligner que l'ensemble des partis de l'opposition qualifie le recours au financement non conventionnel de mesure dévastatrice pour l'économie du pays. Le MSP a déjà pris sa décision. Ses députés voteront contre le texte que présentera Ahmed Ouyahia. Le président de cette formation islamiste, Abdelmadjid Menasra est formel et a annoncé la couleur à de nombreuses occasions. C'est dire que les élus du MSP ont reçu la consigne. L'argument de Menasra qui, soit dit en passant, a déjà été ministre du gouvernement, ne repose pas sur un argumentaire objectif. Il n'avance aucune alternative au plan d'action du gouvernement et se contente d'accuser l'Exécutif de manquer de courage, dans sa gestion du commerce extérieur. Estimant que le gouvernement peut aller plus loin dans la baisse de la facture des importations, l'ancien ministre qui n'a pas un mot pour les subventions, s'attaque au financement non conventionnel, en affirmant que cette option fera «augmenter l'inflation et baisser le pouvoir d'achat» des Algériens. Le Parti des travailleurs refuse de croire le Premier ministre sur la politique sociale du gouvernement. Le député Ramdane Taâzibt affirme que la menace sur les transferts sociaux «est à peine voilée». Il critique le recours au financement non conventionnel, estimant que cette démarche induira une inflation à deux chiffres. Il insiste sur l'absence d'un plan d'urgence pour récupérer les impôts non recouvrés qu'il évalue à 120 milliards de dollars. Pour le député du PT, la politique du gouvernement profite prioritairement aux patrons. Taâzibt préconise de revenir sur les décisions prise à partir de 2015 qui ont valu au gouvernement une manifestation de l'opposition au sein de l'hémicycle. Il estime que ce qui arrive au pays est simplement une marche vers le chaos. Beaucoup de formations de l'opposition sont dans cette posture oppositionniste et ne semblent pas avoir lu le plan d'action du gouvernement, puisqu'en matière de commentaires, les uns et les autres restent dans les généralités et les «petites phrases». Le RCD néanmoins, sort du lot, et propose la mobilisation des «partis politiques soucieux de l'avenir du pays». Mohcen Belabès qui, soulignons-le, n'a pas sa langue dans sa poche, ne fait pas référence au pouvoir ou à l'opposition, mais évoque les forces vives de la nation, dont «les syndicats autonomes (qui) doivent, eux aussi, dépasser l'éparpillement pour se rassembler sur les points qui les unissent». Le propos est loin d'être conciliant, mais il se rapproche de l'appel du président de la République pour une mobilisation de tous les acteurs sociaux et politiques pour affronter la crise. Verrons-nous une évolution du RCD à l'occasion du débat parlementaire sur le plan d'action du gouvernement? Rien n'est moins sûr, bien qu'en politique, il ne faut jurer de rien. En tout état de cause, quelles que soient les déclarations des uns et des autres. Il y a lieu de relever que le plan d'action, les enjeux économiques et la qualité de leur adversaire, donneront aux leaders de l'opposition la possibilité de se faire entendre du public.