La réunion s'ouvre aujourd'hui à Syrte avec un ordre du jour chargé. Syrte accueille, aujourd'hui et demain, le 5e sommet de l'Union africaine, qui aura à plancher sur un ordre du jour chargé avec en point de mire la réforme de l'ONU, la représentation africaine au Conseil de sécurité, outre la problématique du financement de l'UA et les conflits qui continuent à pénaliser le développement du continent. Plusieurs chefs d'Etat et de gouvernement, dont le président Abdelaziz Bouteflika, prendront part à un sommet qui s'annonce vital pour l'Afrique. En effet, plusieurs points de l'ordre du jour adopté par le Conseil exécutif de l'UA lors de la réunion préparatoire de vendredi et samedi sont considérés comme présentant une importance cruciale pour le continent. Il s'agit en l'occurrence de la réforme de l'ONU et de la représentativité de l'Afrique au Conseil de sécurité, du choix des candidats membres permanents du Conseil de sécurité. Les deux autres points, considérés comme essentiels de l'ordre du jour, concernent l'OMD (les objectifs du Millénaire pour le développement) et les contributions au financement de l'UA, en sus de la question récurrente des conflits, des pandémies, de la pauvreté, points quasi traditionnels des rencontres africaines au sommet. Mais c'est la réforme de l'ONU et principalement l'élargissement du Conseil de sécurité, et la possibilité pour l'Afrique de bénéficier de deux sièges permanents qui vont faire l'objet de discussions qui s'annoncent difficiles. Or, l'élargissement du Conseil de sécurité divise déjà la communauté internationale, tant au sujet de l'importance de cet élargissement, que par la qualité des pays qui y seront admis. Alors que cinq pays africains, (Afrique du Sud, Egypte, Kenya, Nigeria et Sénégal) suivis depuis peu par trois autres (Angola, Gambie, Libye), sont individuellement candidats aux sièges africains, l'Union africaine avait, lors d'un Conseil qui eut lieu en mars dernier en Tanzanie, réaffirmé le souhait de choisir elle- même ses représentants. La question qui va se poser est de savoir - si l'on exclu les cinq Etats actuellement détenteurs de sièges permanents (Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne et Russie) qui y sont à titre individuel - si les futurs «permanents» le seront individuellement, comme en a émis le voeu le G4 (Allemagne, Brésil, Inde et Japon candidats à un tel siège) - position que ne partage pas le groupe dit «Unis pour le Consensus», mené par l'Italie et le Pakistan - ou seront-ils, comme le souhaite l'Afrique, des délégués de leur continent prévoyant une rotation entre les Etats. De fait, l'UA, qui regroupe 53 Etats donc 53 voix sur 192 aux Nations unies, pourrait y jouer un rôle intéressant, notamment d'arbitre, au sein du Conseil de sécurité et de l'Assemblée générale de l'ONU. Un responsable libyen, dont le pays accueille le sommet de l'UA, rappelle à ce propos «la nécessité historique de rendre justice à l'Afrique, seul continent qui n'est pas représenté au Conseil de sécurité». Aussi, à Syrte, la bataille risque d'être rude entre les tenants de la représentation individuelle et ceux préconisant une représentation continentale. Mais dans l'un comme dans l'autre cas de figure, selon quels critères en fait, vont être désignés les postulants africains? Le sommet de Syrte aura donc à trancher sur ce point important, d'autant qu'il aura aussi à prendre en charge, dans la déclaration finale, du «consensus d'Ezulwini». La déclaration finale doit en effet réaffirmer la position adoptée le 22 février dernier par le groupe de 15 pays africains chargés d'étudier le dossier à Ezulwini, au Swaziland, de demander deux sièges permanents pour l'Afrique avec droit de veto et cinq sièges non permanents. Le «consensus d'Ezulwini» a été adopté, rappelle-t-on, à l'unanimité début mars par les 53 Etats membres de l'UA. De fait, les ministres africains des Affaires étrangères réunis en séance plénière ont réaffirmé leur «attachement» à ce consensus se disant convaincus de l'exigence d'une réforme globale du système des Nations unies, «prenant en compte les principes, objectifs et idéaux de la charte, en vue de l'avènement d'un monde plus juste, fondé sur l'universalisme, l'équité et l'équilibre régional». Dans l'ordre des priorités, le second point qui sera examiné par le sommet concerne les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) auquel l'Afrique marque un attachement particulier car entrant de plain-pied avec les efforts fournis, par ailleurs, pour remettre le continent à niveau. Dans ce contexte, l'UA prévoit la mise en place d'un «cadre stratégique approprié» en mesure de permettre aux pays africains «d'atteindre leurs objectifs de développement». Pour ce faire, les ministres africains des Affaires étrangères ont réaffirmé leur engagement «en faveur de l'accélération de la réforme politique, sociale et économique conformément aux principes de l'UA et au programme socio-économique du Nepad». Toutefois, le développement de l'Afrique est handicapé par le lourd fardeau de la dette, aussi, les ministres africains ont-ils appelé à l'annulation à 100% de la dette des pays du continent les plus pauvres en vue de la réalisation des OMD. L'autre point sensible abordé par la commission préparatoire du sommet, concerne les contributions africaines au budget de fonctionnement de l'UA dont les finances sont en crise. Ce qui empêche l'UA de mener à bien les nombreuses missions, notamment de paix, qu'elle a projetées dans les régions minées par les conflits. Aussi, le comité des représentants permanents (Corep) de l'UA, qui s'est réuni durant trois jours à Syrte fait part de ses inquiétudes dans son rapport final qui sera soumis aux chefs d'Etat. Le président de la Commission africaine, Alpha Oumar Konaré, a indiqué lors de l'ouverture de cette réunion que «les Etats membres doivent honorer leurs engagements financiers vis-à-vis de l'organisation à laquelle des arriérés sont actuellement dus pour un montant total de 35 millions de dollars». Selon le rapport du Corep, «le président du sous-comité des contributions a fait le constat de la situation financière critique de la Commission (de l'UA), due au fait que la plupart des Etats ne s'acquittaient pas à temps de leurs contributions statutaires au budget de la Commission». De fait, selon le document du Corep, seulement sept Etats sont à jour de leur contribution au titre du budget (Algérie, Afrique du Sud, Angola, Botswana, Comores, Ethiopie et Sénégal). Un porte-parole de l'UA précise pour sa part que «cinq pays assurent 65% du budget de l'UA, (il s'agit de l'Algérie, de l'Afrique du Sud, de l'Egypte, de la Libye et du Nigeria) les autres 35%». La question du financement de l'UA va constituer avec la désignation de la représentation africaine au Conseil de sécurité les deux points chauds d'un sommet africain qui s'annonce à tout point de vue difficile.