«Une très grande partie des jeunes entre 15 et 30 ans ne savent ni lire ni écrire». L'information, pour dramatique qu'elle soit, a été révélée, hier, par la présidente de l'association Iqraâ citant, lors d'une conférence-débat au Centre de presse Mohamed-Abderrahmani d'El Moudjahid, les statistiques d'une «étude» faite en 2000 sur le taux d'analphabétisme dans la société. Celui-ci avait alors atteint 26,50% et marque néanmoins, de l'avis d'Aïcha Barki, une nette baisse par rapport à 1998 où les très officiels chiffres de l'Office national des statistiques (ONS) avaient mentionné une moyenne de 31,10%. Les , bien entendu, sont les plus touchées par ce fléau et sont loin devant les hommes ave aux de 40,27%. Ces derniers, ne dépassent pas les 23,65% d'après les mêmes chiffres. Baisse ou pas. Le drame est là. Il continue à faire tache d'huile au moment même où l'on continue, non sans zèle et souvent avec des desseins politiciens, à louer les mérites d'une réforme éducative -celle du président de la République - encore au stade du balbutiement et dont il est très difficile, actuellement, d'en tirer ne serait-ce qu'un bilan préliminaire. L'autre drame: l'analphabétisme touche de plus en plus de jeunes et rompt par conséquent avec l'ancien slogan «analphabétisme, maladie des vieux». Mme Barki tire la sonnette d'alarme: «Une très grande partie des jeunes entre 15 et 30 ans ne savent ni lire ni écrire». Les chiffres de l'ONS ont par ailleurs le mérite de soulever un autre point non moins important. Les taux varient d'une wilaya à une autre et atteignent leur summum à Djelfa avec une moyenne de 53%. Dans la capitale, les analphabètes constituent 17,44%, soit la moyenne la plus réduite sur tout le territoire national. Face aux grands maux, les grands mots. Le diagnostic établi, Mme Barki formule ses propositions et fait valoir par là même «le plan de sauvetage» piloté par le ministère de l'Education. «C'est un projet, explique celle-ci, qui aura dès sa mise en oeuvre en septembre prochain, à prendre en charge plus de 3 millions d'analphabètes.» Le dossier est actuellement au niveau de la chefferie du gouvernement et bénéficie, selon les termes à peines voilés de Mme Barki, d'une attention particulière. Seulement «nous souhaitons que le budget [du projet] soit conséquent» fait-elle savoir. La mise en pratique de cette «nouvelle stratégie» a été confiée à l'Office national de l'alphabétisation (ONA) dont les relations avec Iqraâ ne sont pas, semble-t-il, au beau fixe. D'ailleurs, l'oratrice a glissé, subtilement, quelques phrases écorchant son «frère ennemi» l'ONA. Ce dernier, d'après elle, s'est d'ores et déjà approprié le processus d'alphabétisation en s'efforçant de mettre hors jeu l'association de Mme Barki qui a toutefois le mérite d'avoir «alphabétisé» quelque 400.000 personnes à travers plusieurs régions, notamment les plus reculées et a prévu, d'ici à 2012, la réduction de moitié du taux national. Sur un autre «front», Mme Barki, regrette que les pouvoirs publics, signataires pourtant de plusieurs conventions internationales sur la lutte contre l'analphabétisme, n'aient pas fait montre du même engagement sur le plan interne, notamment face aux familles réticentes à la scolarité de leurs enfants. Car «hormis la loi sur l'obligation scolaire, aucun autre texte juridique ne les oblige à aller dans ce sens», observe-t-elle en rappelant que la même idée avait fait l'objet dans les années 1990 d'une réflexion entre les différents protagonistes.