Le chef de l'état Cela fait plus de 55 ans que la guerre est terminée. L'idéal est de faire du tandem algéro-français le moteur de la paix et la stabilité en Afrique. Le président Emmanuel Macron fera aujourd'hui sa première visite à Alger en sa qualité de président de la République française. On ne peut pas préjuger de ce qu'espère le jeune chef d'Etat français, mais au vu des préalables qui ont précédé ce déplacement, on est en droit de penser que l'homme a un rêve de puissance pour son pays. Aux dires de l'ensemble des observateurs, il a redonné de la stature à la fonction présidentielle et incarné le personnage si parfaitement que les commentateurs politiques y voient une posture gaullienne assumée. Emmanuel Macron a donné les signaux qu'il faut à l'opinion française sur des questions qui agitent le microcosme sociopolitique. Il ne recule pas devant l'adversité, préférant prendre le risque d'un «lynchage» médiatique que d'une capitulation, dont il sera de toute façon, comptable devant l'opinion. Sur la liste des «adversités», il y a eu le fameux épisode sur le passé colonial de la France en Algérie. Candidat à la présidentielle, il a pris le risque d'une «levée de boucliers» des ultras, brisant ainsi le cercle vicieux qui emprisonnait tous les présidents français, depuis que la puissance des médias et des sondages règle le baromètre politique en France. Il a prouvé qu'on peut déplaire à quelques individus très introduits dans la médiasphère, sans y laisser une part de popularité. Cela pour dire que le nouveau président des Français veut se soustraire aux codes et exercer son mandat en dehors des influences politico-médiatiques. Cela fait de lui un personnage à part dans l'Histoire de son pays. Un seul autre président peut se prévaloir d'un pareil profil. C'est Charles de Gaulle. La comparaison peut s'arrêter là, sauf que le locataire de l'Elysée entend lui aussi marquer son époque. Si le fondateur de la Ve République française a réussi, moins de 5 ans après son oeuvre politique, fonder, le 22 janvier 1963, le traité d'amitié franco-allemand, pourquoi son «héritier», à plus de 55 ans de distance, ne ferait-il pas la même chose entre la France et l'Algérie? La France et l'Allemagne se sont fait trois atroces guerres entre 1870 et 1945. Mais 18 ans de paix ont suffi aux deux peuples pour recréer des liens forts qui les unissent à ce jour et font du couple franco-allemand le moteur de la stabilité politique et économique dans le Vieux Continent. L'Algérie et la France partagent 132 ans de colonisation dans un rapport dominant-dominé. Il y a eu 7 ans de guerre de libération héroïque du peuple algérien. Cela fait plus de 55 ans que cette guerre est terminée. L'idéal est de reproduire la réconciliation franco-allemande pour faire du tandem algéro-français le moteur de la paix et la stabilité en Afrique. Beaucoup d'hommes politiques s'y sont essayés, sans succès. Mais l'actuel président français a les bonnes cartes en main pour jouer un coup gagnant, à condition, bien entendu, qu'il intègre le caractère souverain, indépendant et totalement dissociable de toute approche paternaliste, de la République algérienne. Emmanuel Macron donne l'impression d'avoir très bien saisi les enjeux et semble disponible à adopter une position «gaullienne» sur des questions de souveraineté. L'important reste l'intérêt de son pays, et présentement, ce dernier gagnera fortement à changer d'attitude vis- à-vis de son ancienne colonie, pour construire un avenir commun profitable aux peuples algérien et français. Avec cette visite, on n'en est qu'aux premiers balbutiements de la nouvelle approche qu'on pourrait un jour qualifier de «macronienne», dans le cas où le président français parvient à mettre en minorité les ultras de l'Algérie française dans son pays. Emmanuel Macron sait que du côté algérien, le président de la République a déjà formulé les attentes de l'Algérie, tracé les lignes rouges et affiché clairement sa détermination de refonder les relations entre les deux pays. Il reste qu'il ne suffit pas de le dire pour le faire, le travail de mémoire, la densification du partenariat politique, économique et culturel doit être repensée à l'aune d'une nouvelle relation empreinte de respect mutuel et basée sur le principe de gagnant-gagnant. On ne sait, encore une fois, pas ce qui anime véritablement le président français, mais si son voeu est de rentrer dans l'Histoire de son pays et du monde, c'est à Alger qu'il trouvera la clé. Le président Macron en visite d'amitié et de travail Le président français, Emmanuel Macron, effectuera aujourd'hui une visite d'amitié et de travail en Algérie, à l'invitation du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a indiqué, hier, un communiqué de la présidence de la République. «A l'invitation de Son Excellence Monsieur Abdelaziz Bouteflika, président de la République, Son Excellence Monsieur Emmanuel Macron, président de la République française, effectuera demain 6 décembre 2017, une visite d'amitié et de travail en Algérie», précise la même source. «Cette visite qui s'inscrit dans le cadre du partenariat d'exception que l'Algérie et la France sont attelées à bâtir et à conforter, sera une occasion pour les deux pays, notamment durant les entretiens entre les deux chefs d'Etat, d'explorer de nouvelles voies pour renforcer la coopération et le partenariat entre l'Algérie et la France et de procéder à une concertation sur les questions régionales et internationales d'intérêt commun», souligne la présidence de la République.