Cette instruction sert à rappeler que le processus d'ouverture du capital des entreprises publiques ne se fera pas de manière anarchique et encore moins sans contrôle final. Un site Internet annonçait, il y a quelques jours, une note présidentielle suspendant les opérations de privatisation des entreprises publiques. Les spéculations allaient bon train et les informations les plus invraisemblables ont circulé sur les circonstances et surtout les motivations de l'instruction présidentielle. Un premier éclaircissement apporté par le ministre de l'Industrie et des Mines, est venu, hier, remettre les choses à l'endroit. Youcef Yousfi qui était en visite de travail à Relizane a confirmé l'existence de ladite instruction, non sans rappeler au passage que «l'ouverture du capital des entreprises publiques relève des prérogatives du président de la République». En réalité, le chef de l'Etat n'a rien suspendu du tout. Et pour cause, voici, l'intégralité du texte émanant de la présidence de la République et adressé aux membres du gouvernement: «Dans le cadre des projets de partenariat public/privé, nonobstant les dispositions de l'ordonnance n° 01-04 du Aouel Joumada Ethani 1422, correspondant au 20 août 2001, relative à l'organisation, la gestion et la privatisation des entreprises publiques économiques, modifiée et complétée, notamment ses articles 20, 21, et 22, j'ai l'honneur de vous faire part de l'instruction présidentielle qui subordonne désormais tout projet d'ouverture de capital ou de cession d'actifs de l'entreprise publique économique à l'accord, préalable, de Monsieur le Président de la République. La décision finale conclue reste également de la seule prérogative décisionnelle de Monsieur le Président de la République. Veuillez agréer, Mesdames et Messieurs les ministres, l'expression de ma haute considération.» Le président de la République ne fait, ni plus ni moins, qu'exercer ses prérogatives de premier magistrat du pays, sur une question, tout de même sensible. Il va de soi qu'une opération de privatisation ne peut se faire de manière aléatoire ou dans l'opacité. Il faut donc que l'objectif soit clairement identifié et les moyens d'y parvenir également. Le chef de l'Etat qui, faut-il le rappeler, représente les Algériens du fait de son élection au suffrage universel, est à ce titre, le seul véritable garant de l'intérêt collectif. Cette instruction sert donc à rappeler aux acteurs économiques que le processus d'ouverture du capital des entreprises publiques ne se fera pas de manière anarchique et encore moins sans contrôle final. On retiendra, à ce propos, dans le courrier de la présidence de la République que «la décision finale conclue reste également de la seule prérogative décisionnelle de Monsieur le Président de la République.» C'est dire que le contrôle en question ne sera pas une simple formalité, mais engagera la signature du chef de l'Etat lui-même. L'une des raisons susceptibles de justifier la mesure du président pourrait être le souci d'éviter une «oligarchisation» effective de l'Algérie. Il est clair, en effet, qu'une opération de privatisation massive et incontrôlée est de nature à dévier de son objectif premier. Même si dans la Charte pour le partenariat public-privé, les grandes entreprises ne sont pas comprises dans l'opération de privatisation, le risque de voir naître de grandes entités «oligarchiques» n'est pas à écarter. Aussi, l'obligation désormais faite au gouvernement de soumettre tous les dossiers au contrôle présidentiel aura pour effet de refroidir certaines ambitions mal placées. La comparaison est peut-être malvenue, mais tout le monde connaît l'aventureuse privatisation qu'a vécue la Russie, fabriquant d'«impressionnants» oligarques qui avaient fait la pluie et le beau temps dans ce pays, jusqu'à être responsables d'une grave récession économique de la Russie. Ceci n'arrivera certainement pas en Algérie. Et pour cause, l'instruction présidentielle ne semble pas gêner outre mesure les partenaires du gouvernement, à l'image de l'Ugta, dont le secrétaire général a réagi quelques minutes après l'annonce de Youcef Yousfi. Abdelmadjid Sidi Saïd s'est dit simplement «fier» que les décisions économiques soient le fait du président de la République.