Les Italiens étaient appelés, hier, à désigner un nouveau Parlement, députés et sénateurs, dans une ambiance morose Les Italiens ont commencé à voter, hier, pour des élections qui devraient voir une poussée de la droite de Silvio Berlusconi et des populistes, mais risquent de ne déboucher sur aucune majorité stable. Plus de 46 millions d'électeurs devaient se rendre, hier, aux bureaux de vote afin d'élire 630 députés via un bulletin rose et ceux âgés de plus de 25 ans reçoivent aussi un bulletin jaune pour choisir les 315 sénateurs. Compte tenu de la complexité du nouveau système électoral, qui combine scrutin proportionnel et majoritaire, les premières indications sur la composition réelle du futur Parlement sont attendues très tard dans la nuit. A la sortie des bureaux de vote, nombre d'électeurs se montraient amers, au terme d'une campagne aux accents parfois violents, dominée par les questions liées à l'immigration, l'insécurité ou la faiblesse de la reprise économique en Italie. «Cette campagne a été complexe et assez sordide, y compris de la part du parti pour lequel j'ai voté», a résumé Mirko Canali, coiffeur de 24 ans, électeur du Parti démocrate (PD, centre gauche) du gouvernement sortant. Mais si la coalition de droite/extrême droite est donnée en tête de ce scrutin, elle est loin d'être certaine de pouvoir gouverner. Selon les experts, le seuil pour obtenir la majorité des sièges est de 40 à 45%. Or, les derniers sondages disponibles, datant d'il y a deux semaines, plaçaient la coalition en tête avec 37% des intentions de vote, dont 17% pour Forza Italia, le parti de M. Berlusconi, et 13% pour la Ligue de Matteo Salvini (extrême droite), devant le Mouvement 5 étoiles (M5S, populiste, 28%) et la coalition de centre gauche (27%). Hier matin, la presse italienne semblait déjà résignée à ce qu'aucune majorité ne se dessine. «Le verdict contre l'Italie est toujours le même: le pays vit une instabilité permanente. L'ingouvernabilité est désormais une maladie endémique», se désolait Claudio Tito dans un éditorial dans La Repubblica. Silvio Berlusconi, âgé de 81 ans et inéligible depuis une condamnation pour fraude fiscale, a choisi Antonio Tajani, un fidèle de la première heure aujourd'hui président du Parlement européen, pour diriger le gouvernement en cas de victoire, mais M. Salvini, fort d'une campagne tonitruante axée contre Bruxelles et les migrants, entend bien porter la Ligue devant FI et prendre lui-même les commandes. Leur alliance est une première dans l'Union européenne, a dénoncé vendredi soir le chef du PD, Matteo Renzi. «Je le dis aux électeurs de la gauche radicale et aussi aux modérés: seul le vote en faveur du PD garantit de ne pas laisser ce pays aux mains de Matteo Salvini», a-t-il averti vendredi, brandissant aussi la menace d'une alliance post-électorale entre la Ligue et le M5S, qui officiellement s'en défendent. Vendredi, le mouvement fondé par le comique Beppe Grillo en 2009 et qui avait créé la surprise en raflant 25% des voix aux dernières législatives de 2013 a clôturé sa campagne en se disant certain cette fois de l'emporter. «Ce soir, c'est la fin de la période d'opposition et c'est le début de la période gouvernementale» du M5S, a assuré Luigi Di Maio, le jeune candidat du Mouvement au poste de chef du gouvernement. Le M5S pourrait en effet devenir le premier parti du pays, mais il lui faudra probablement se résoudre à des alliances pour gouverner. Dans le cadre de cette campagne, les forces en présence ont multiplié les promesses: baisses massives des impôts, expulsions massives de clandestins, revenu garanti pour les plus pauvres... Chacun pouvait y trouver son compte, sans forcément y croire. «Le principal problème dans ce pays, c'est la corruption de la classe politique et sa connivence avec les puissants lobbies, les banques, le monde des affaires, un mal commun au monde entier mais particulièrement profond en Italie», a expliqué Massimiliano, gemmologue de 48 ans, après avoir voté M5S à Rome. A l'issue d'une campagne marquée aussi par la montée en puissance de mouvements néofascistes et des heurts récurrents entre forces de l'ordre et militants d'extrême gauche, des autocollants menaçants sont apparus samedi devant des dizaines d'appartements à Pavie, au sud de Milan: «Ici réside un antifasciste.»