Les Italiens ont voté, mais ils ne savent pas qui gouvernera leur pays pour le prochain quinquennat. Rome (Italie) De notre correspondante Dès la fermeture des urnes, lundi à 15h, les prévisions de vote se sont succédé créant la stupeur parmi les observateurs. Car si au tout début, la gauche semblait la favorite de ce scrutin, au fil des heures, la marge entre la coalition de Pier Luigi Bersani et les autres partis s'est réduite considérablement. S'en est suivi une interminable nuit de suspense, pour qu'enfin les Italiens se réveillent en se demandant, perplexes : «Mais qui a emporté les élections ?» Contrairement à ce que les sondages avaient annoncé jusque-là, la coalition de centre gauche, menée par Pier Luigi Bersani, n'a pas fait l'unanimité parmi les électeurs italiens, avec 29,5% des voix, talonnée par l'Alliance de Silvio Berlusconi, qui revient en force, avec 29,1% soit 124 sièges. Le Parti de gauche (PD) allié avec le Sel (gauche, écologie et liberté) obtient automatiquement la majorité des sièges, soit 340 sur 630, selon la loi électorale en vigueur. Au Sénat, cette coalition obtient 119 sièges, contre 117 pour l'alliance de droite. La grande surprise de ce scrutin est représentée par le Mouvement Cinq Etoiles (M5S) de l'humoriste Beppe Grillo, qui arrache 25,5% des voix, soit 108 sièges à la Chambre des députés et 54 sièges au Sénat, devenant le premier parti voté. Cette formation politique active, depuis à peine cinq ans, a séduit des millions d'électeurs déçus par la droite comme par la gauche. Son leader, une espèce de Coluche italien, a su tirer avantage du ras-le-bol des Italiens. Promettant de lutter contre la corruption et de «balayer l'ancienne classe politique», Grillo a rempli les places durant sa campagne électorale, grâce notamment aux forums sociaux, comme Twitter. Critiquant la politique d'austérité du Premier ministre Mario Monti, qu'il considère «le servilismo pro-européen», le leader du M5S s'est révélé être un véritable «tsunami électoral». Le populisme l'a donc emporté sur les discours réalistes. Les Italiens ont préféré se mettre la tête dans le sable et voter soit pour un Berlusconi bis, soit pour le parti populiste de l'humoriste Beppe Grillo. «Je ne comprends pas que nos concitoyens aient choisi de faire un saut dans l'inconnu, en ces temps de crise», se lamente Riccardo, un entrepreneur. Il faut dire que beaucoup s'attendaient à ce que le Mouvement Cinq Etoiles (M5S) du comique Grillo brasse des millions de voix, mais peu envisageaient ce raz-de-marée qui en a fait le premier parti d'Italie. Un autre leader a surpris les analystes. Les Italiens avaient donné pour mort, fin 2011, Silvio Berlusconi, lorsque son gouvernement est tombé et a été remplacé par l'exécutif technique de Mario Monti. Mais, il semble que ses promesses démagogiques pour «diminuer les impôts» et lever celles introduites par son adversaire aient obtenu l'effet escompté. Le grand perdant de ce scrutin est Monti, qui remporte seulement 10% des votes exprimés. Sa politique de rigueur, qui a frappé les classes moyennes, a été sanctionnée par les urnes. Le président de la République, Giorgio Napolitano, à quelques semaines de la fin de son mandat, se serait bien passé de cette responsabilité écrasante. Car c'est à lui que revient le devoir de résoudre cette situation inextricable et d'indiquer aux partis politiques la voie à prendre pour donner au pays un gouvernement stable. En cas d'échec, le chef de l'Etat, qui a déjà fait savoir qu'il ne comptait pas briguer un second septennat, devra convoquer de nouvelles élections législatives, bien que la Constitution italienne ne prévoie pas un tel scénario.