Le Home Office détient un sérieux argument face aux réticents dans le dossier des extraditions. Le gouvernement britannique compte user à fond la carte de la réconciliation nationale, projet proposé à référendum en Algérie, pour arracher des concessions à la justice du Royaume dans le contentieux des extraditions. Le projet de charte pour la paix et la réconciliation vient à point nommé pour le gouvernement Blair qui fait face à une résistance acharnée des magistrats et des ONG. En août dernier, la Grande-Bretagne a été sur le point de conclure un accord avec l'Algérie, lequel permettrait aux autorités britanniques de renvoyer les ressortissants algériens censés constituer une menace à la sécurité nationale. Le R-U est près d'obtenir une garantie du gouvernement algérien que les hommes ne seraient pas torturés à leur arrivée en Algérie. Annoncée à plusieurs reprises, la signature de l'accord d'extradition entre la Grande-Bretagne et l'Algérie, en vertu duquel plus de dix Algériens seraient expulsés vers Alger, piétine. L'écueil à cette démarche du gouvernement Blair a été dressé par les magistrats anglais et les organisations de la défense des droit de l'Homme. Les avocats des personnes concernées par les extraditions crient au scandale: «Le Home Office ne peut pas affirmer que la Jordanie et l'Algérie ont effectué en l'espace d'une nuit, une réforme». L'avocate des droits de l'homme, Gareth Peirce, estime que «cette politique ( des extraditions Ndlr) est insensée et dangereuse au plus haut point» et que «tout le monde ne croit pas aux assurances venant de régimes irrespectueux des droits de l'homme», alors qu' «aucune sanction n'est prévue contre les Etats contrevenant à leurs accords». Amnesty International, Human Rights Watch et Liberty, ainsi que le rapporteur de l'ONU sur la torture, Manfred Nowak, ont dénoncé la signature de l'accord d'extradition avec l'Algérie, estimant qu'«il ne vaut pas le papier sur lequel il sera signé». Pris en étau entre le souci de sécurité nationale et les droits de l'homme, le Home Office a douté un moment du fondement de sa démarche, notamment des garanties que les expulsés ne seront pas torturés à leur retour à Alger. Seulement voilà, le projet de charte pour la paix et la réconciliation nationale vient comme une bouée de sauvetage au profit de Premier ministre britannique. Le projet de charte comprend notamment «l'abandon des poursuites judiciaires contre les personnes recherchées en Algérie ou à l'étranger ou condamnées par contumace» qui se rendraient aux autorités, à condition qu'elle ne soient pas impliquées dans des crimes de sang ou des viols. «Les personnes impliquées dans des activités de soutien au terrorisme et qui se déclareront aux autorités compétentes» seront également exonérées de poursuites judiciaires, a encore précisé M.Bouteflika. Le projet prévoit aussi «la grâce pour les personnes condamnées ou détenues pour des actes de terrorisme autres que les massacres collectifs, les viols et les attentats à l'explosif dans des lieux publics». «Les autres individus condamnés définitivement, détenus ou recherchés pour actes terroristes, qui ne sont pas concernés par les mesures de grâce et d'extinction de poursuites pourront bénéficier de commutations ou de remise de peines». Hier, la présidence britannique de l'UE a appelé hier, le Parlement européen à soutenir son programme controversé de mesures antiterroristes, et plaidé à mots couverts pour une refonte des lois sur les droits de l'homme qui empêchent l'expulsion de suspects étrangers. Dans un discours devant les eurodéputés réunis à Strasbourg, deux mois jour pour jour après les attentats de Londres, le ministre de l'Intérieur britannique Charles Clarke a mis en avant la nécessité pour les Européens de travailler main dans la main pour contrer la menace. M.Clarke a émis l'espoir de pouvoir bénéficier «du large soutien du Parlement». Ainsi, les responsables du Home Office détiennent à travers le projet de charte pour la réconciliation en Algérie un sérieux argument face aux réticents dans le dossier des extraditions.