Les Européens sont irrités par les décisions de Trump Au lendemain du périple du ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, en Chine, en Russie puis à Bruxelles, il semble bien que l'Iran soit parvenu à marquer des points, surtout que Pékin comme Moscou ont tenu à exprimer leur soutien total à l'accord nucléaire. Ulcérés par le retrait unilatéral de l'accord sur le nucléaire iranien décidé par le président américain Donald Trump qui a non seulement rétabli et durci les sanctions contre l'Iran, mais a prévu des conséquences extra-territoriales à l'encontre des entreprises étrangères, principalement européennes qui poursuivraient leur coopération avec Téhéran, les pays européens se sont mobilisés pour tenter de trouver la parade. Hier, la Commission européenne a annoncé, dans la dynamique ouverte par le sommet de l'Union mercredi dernier, le lancement de la procédure décidée à Sofia pour bloquer les sanctions américaines qui ne pourront être appliquées que dans deux mois environ. C'est au moment où la porte-parole de la diplomatie américaine fait état de la volonté des Etats-Unis de constituer une «coalition» contre l'Iran, sans préciser s'il s'agit d'une coalition militaire, que cette annonce est effectuée par Bruxelles. Elle résonne comme un cinglant démenti à l'assertion du département d'Etat selon lequel les Européens seraient, malgré leur déception quant à la politique de Washington vis-à-vis de l'accord sur le nucléaire, enthousiasmés par cette initiative. La porte-parole de la diplomatie américaine a assuré que beaucoup de partenaires des Etats-Unis «comprennent totalement» les inquiétudes américaines et «ne ferment pas les yeux» devant la «menace» iranienne. Washington n'avait pas besoin, du reste, de préciser de quelle menace il s'agit et quels sont les pays qui se sentent «menacés» par l'Iran. Au lendemain même du périple du ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, en Chine, en Russie puis à Bruxelles, il semble bien que l'Iran soit parvenu à marquer des points, surtout que Pékin comme Moscou ont tenu à exprimer leur soutien total à l'accord nucléaire et leur rejet de toute tentative d'en modifier les termes. Ce faisant, les deux puissances expriment implicitement, voire même clairement, leur refus d'un quelconque blocus infligé à Téhéran. Parallèlement à cela, le sommet de l'Organisation de la Conférence islamique, convoqué à Istanbul par le président turc Recep Tayyip Erdogan, a dressé un réquisitoire sans concession contre Israël dont les massacres de lundi dernier ont été qualifiés de crimes de guerre à l'encontre d'un peuple manifestant pacifiquement pour la défense de ses droits reconnus par la communauté internationale mais aussi contre le transfert irresponsable de l'ambassade américaine à El Qods, au mépris du droit international. Cette démarche du président américain qui a choisi sciemment la date anniversaire de la création de l'Etat hébreu vise à consacrer la prétendue souveraineté d'Israël sur El Qods occupé et c'est ce qu'ont clairement rejeté à la fois le sommet de l'OCI hier à Istanbul et la réunion ministérielle de la Ligue arabe, jeudi dernier, au Caire. Mais pas seulement, puisque la majorité des pays européens, exception faite de quelques pays de l'Europe de l'Est tributaires de l'aide américaine dont le président Trump avait fait savoir qu'elle servirait d'épée de Damoclès, ont également condamné ce transfert qui enfreint les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU. A leur tête, là encore, on trouve les principaux alliés des Etats-Unis que sont le Royaume Uni et la France, ainsi que l'Allemagne et plusieurs autres puissances européennes telles que l'Italie dont le rôle a été déterminant à Sofia pour décider d'une riposte aux prétentions hégémoniques de Washington sur les transactions économiques avec l'Iran. Ainsi, il apparaît que le président Trump, une année après son arrivée à la Maison-Blanche, a réussi le tour de force d'irriter et de se mettre à dos à peu près tout le monde et son père, hier la Russie visée par une foule de sanctions économiques et un bras de fer politique notamment en Syrie, puis la Chine avec les nouvelles taxes sur l'acier et maintenant l'Europe occidentale et le Japon mise en demeure dans le dossier iranien. Il ne compte pas s'arrêter là puisque, déjà, le sommet «historique» avec le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un pourrait tomber à l'eau selon Pyongyang qui n'a pas digéré les manoeuvres militaires américano-sud-coréennes et les multiples déclarations des dirigeants américains sur l'exigence d'une dénucléarisation immédiate de la Corée du Nord devenue une condition préalable à la tenue de la rencontre. Bref, le bilan du chef de file des conservateurs américains ne prête pas, quoiqu'en pensent ses partisans, à un quelconque optimisme car l'histoire retiendra qu'il aura replongé le monde dans une ambiance de Guerre froide.