L'Algérie refuse de servir de faire-valoir et de cautionner une décision à laquelle elle n'a pas été associée. Le prochain sommet extraordinaire de la Ligue arabe n'aura pas finalement lieu les 2 et 3 octobre prochain à Charm El Cheikh, sur la mer Rouge, tel qu'avancé par certaines sources diplomatiques arabes. En effet, les ministres arabes des Affaires étrangères, réunis, jeudi au Caire, au quartier général de la Ligue arabe pour examiner les problèmes régionaux pressants, ne sont pas parvenus à fixer une date précise lors de la réunion des travaux de la 124e session du Conseil de la Ligue arabe. Les ministres arabes des Affaires étrangères ont achevé au Caire leur réunion, sans pour autant parvenir à un accord sur la tenue d´un sommet arabe extraordinaire, proposé fin juillet par le président égyptien Hosni Moubarak à la suite des attentats meurtriers qui avaient frappé le 23 juillet la station balnéaire de la mer Rouge. Le chef de la diplomatie égyptienne, Ahmed Aboul Gheit, a indiqué, à l´issue de la réunion, que les ministres des Affaires étrangères avaient pourtant accepté de poursuivre leurs discussions sur cette question. Décidément l'adage « les Arabes se sont entendus à ne plus se mettre d'accord » est toujours d'actualité. En effet, selon les déclarations du ministre soudanais des Affaires étrangères, Mustapha Othman Ismaïl, «la date du sommet arabe extraordinaire ne sera fixée qu'après le mois de Ramadan» avant de souligner que les ministres se sont mis d'accord sur la création d'une commission devant bien préparer le prochain sommet extraordinaire de la Ligue arabe. Un avis partagé par Abdelaziz Belkhadem, ministre d'Etat, représentant personnel du président de la République, qui précisait «si la tenue de ce sommet s´avère nécessaire, des concertations doivent avoir lieu entre le président en exercice du sommet, M.Abdelaziz Bouteflika et le président Hosni Moubarak qui a appelé à sa tenue. Ces concertations concerneront la mise en application de l´initiative après consultation des dirigeants des autres pays». En effet, ce qui devait être une initiative heureuse n'est en fin de compte qu'un fait du prince comme les responsables arabes nous y ont habitués de longue date. Certes, les derniers événements sanglants vécus par certains pays arabes appelaient sans doute à des prises de décisions fermes et rigoureuses contre le fléau terroriste, mais il n'en demeure pas moins, que cela doit se faire dans la clarté en dehors de toute surenchère ou amalgame politiciens et en consultation de tous les pays de la Ligue arabe. De fait, un tel sommet ne devait se décider à la hussarde, ni faire l'objet d'ambiguïté, comme cela avait été le cas par l'annonce simultanée faite par le président égyptien de sa candidature à un nouveau mandat présidentiel et de la «convocation» d'un sommet arabe à Charm El Cheikh prévu la première fois pour le 3 août. Or, tout cela n'est pas sérieux et éclaire sur l'inconsistance et l'incohérence dont font montre les responsables. Aujourd'hui réélu pour un cinquième mandat consécutif, Hosni Moubarek peut se passer aisément de ce sommet d'autant que l'Algérie, présidente en exercice, avait refusé de présider le sommet autoproclamé de Charm El Cheikh. Pour rappel, le communiqué du ministère des Affaires étrangères a été clair sur le sujet. «L'Algérie ne participerait au sommet de Charm El Cheikh qu'à titre de simple pays membre et non en tant que président en exercice de la Ligue.» Aussi, l'Algérie ne servira jamais de faire-valoir et surtout ne cautionnera pas une décision à laquelle elle n'a pas été associée. Cette dernière précision renvoie au malaise réel prévalant jusque-là au sein de la Ligue arabe. Sous l´apparente querelle de procédure se cache un problème de fond: des pays membres de la Ligue arabe, à leur tête l´Algérie, n´ont pas cessé de reprocher la “mainmise” de l´Egypte sur l´organisation panarabe, dont le secrétaire général est traditionnellement un diplomate égyptien. Cette situation a d'ailleurs poussé Alger à réclamer une réforme des structures de l´organisation pour instituer un secrétariat général tournant entre ses différents membres. Aussi, maintenant que la question palestinienne et la lutte antiterroriste sont prises en charge par la Ligue arabe, il ne restera plus qu'à débattre de la question récurrente des réformes. Des réformes qui devraient changer la nature des pouvoirs autoritaires ayant fait beaucoup de mal aux peuples arabes. Aussi, pour le monde arabe, l'urgence est ailleurs, mais ses dirigeants l'ignorent ostensiblement.