Les pays membres de la Ligue arabe ne se sont pas empressés à répondre à l'invitation lancée, la semaine dernière, par le président égyptien Hosni Moubarak, portant sur la tenue, le 3 août prochain, d'un sommet extraordinaire de l'organisation panarabe à Charm El Cheikh. Hier encore, le gros des capitales arabes n'avait pas encore confirmé sa participation à ce rendez-vous destiné à faire le point sur la lutte antiterroriste, la situation en Irak et dans les territoires palestiniens, à la lumière du retrait israélien de Ghaza, à partir du 15 août. L'Irak, la Jordanie, Bahreïn, le Yémen et le Liban sont, pour le moment, les seuls membres de la Ligue arabe à annoncer leur présence au sommet. Le peu d'engouement suscité par l'appel du Président égyptien résulte du fait que la majorité des pays considère inopportune la tenue d'un tel sommet. A ce propos, les observateurs n'écartent pas l'hypothèse que la convocation, par Hosni Moubarak, d'une réunion extraordinaire de l'organisation panarabe répond davantage à un souci de gérer une situation politique interne que de se pencher sérieusement sur les problèmes du monde arabe. Confronté depuis plus d'une année à une forte pression de l'opposition, Hosni Moubarak chercherait ainsi à détourner les regards pour faire oublier la « problématique » soulevée par sa candidature à la présidentielle de septembre prochain. Les derniers attentats de Charm El Cheikh, qui ont fait 67 morts le 23 juillet dernier, semblent ainsi avoir fourni un argument en béton à Moubarak pour tenter de focaliser l'attention des Egyptiens sur le dossier du terrorisme. Et en jouant sur la corde sensible du terrorisme, Moubarak est ainsi sûr d'avoir du répit et, surtout, de requérir le consensus qui fait encore grandement défaut à son projet de se faire réélire pour la cinquième fois. Cette lecture est partagée par une majorité d'analystes dans le monde arabe. La plupart des médias moyen-orientaux, irakiens y compris, qui reprochaient hier au président égyptien d'instrumentaliser la Ligue arabe. L'initiative solitaire de Moubarak, qui tend à donner raison à Abdelaziz Belkhadem qui a dénoncé, en février dernier, les velléités du Caire de faire de la Ligue arabe une « annexe » de son ministère des Affaires étrangères, prouve que le Président égyptien est prêt à piétiner les règlements de l'organisation pour parvenir à ses fins. Moubarak, qui n'a pas jugé utile d'informer la présidence de la Ligue arabe, actuellement assurée par l'Algérie, de son projet, a pour conséquence, dans l'immédiat, de décrédibiliser davantage l'organisation et son action. L'Algérie n'a pas manqué d'attirer, jeudi, l'attention sur l'impair diplomatique commis par Hosni Moubarak. Une source autorisée a fait savoir, à l'occasion, que « les seules consultations sur ce sujet ont eu lieu entre l'Algérie, l'Egypte et le secrétaire général de la Ligue des Etats arabes où il n'était question que d'un mini-sommet regroupant les seuls pays voisins de l'Irak et de la Palestine ». Et si la Ligue arabe n'est déjà pas prise au sérieux, il est à parier que les résultats, si résultats il y aura, de son sommet extraordinaire de la semaine prochaine seront enterrés aussitôt adoptés. Cela d'autant que la plupart des pays membres de l'organisation, qui doutent de l'importance de ce sommet, ont décidé de se faire représenter à par leur ministre des Affaires étrangères. Au plan du factuel, la réunion préparatoire du sommet doit se tenir demain au niveau des ministres des Affaires étrangères dans la station balnéaire de Charm El Cheikh.