Les présents secouaient la tête en signe d'acquiescement motivant l'artiste à faire preuve d'amples épreuves à franchir en passant à la phase suivante. C'est parti. Les soirées ramadhanesques d'Oran sont ouvertes. Tel que voulu par les responsables de tels spectacles, l'andalou et le hawzi berceront les habitants d'Oran tout en détrônant le raï dans sa ville natale, Oran. C'est donc là que la sulfureuse perle de Tlemcen a ouvert le bal en faisant valoir un tel chant en proposant, dans la soirée de vendredi dernier, son récital, riche et varié, dans la salle de cinéma Le Maghreb, ex-Régent. La chanteuse, dont le chant et la musique coulent dans ses veines, un art à perfectionner en le composant, ne s'est pas fait trop désirer pour rallier le public l'attendant calmement dans les somptueux strapontins veloutés et exquis de la salle dont la scène a été investie, avec brio, par les plus grands chanteurs du monde dont entre autres Johnny Halliday dans les années 1970. La hargne de réussir et d'évoluer davantage hante l'esprit de cette artiste dont les capacités vocales constituent l'un des premiers atouts à prendre en compte. D'autant plus que la majorité de l'assistance est originaire de la perle de l'Ouest (Tlemcen, ndlr) et apprécie de façon savoureuse le chant recommandé par Rym Hakiki. Celle-ci ne s'offre aucunement le droit d'une quelconque déroute en affrontant une telle assistance connaissant par coeur les deux genres de chants soigneusement préservés par l'école tlemcénienne, l'andalou et le hawzi. La chanteuse ne se retrouve pas dans une quelconque situation d'embarras en honorant, comme à chaque année, son passage dans la ville des Deux Lions, où les fans de son chant sont nombreux. Elle joint donc l'utile à l'agréable en ne ratant pas l'occasion pour réitérer sa hargne quant à la place qu'elle occupe sur la scène artistique algérienne. Le spectacle de vendredi soir a servi à la chanteuse de jauge pour tâter sa force quant à vaincre et convaincre dans une salle fréquentée par des consommateurs d'un chant tant demandé. Rym Hakiki, vêtue de son habituel habit tlemcénien, n'a pas fait dans le détail ni lâché son beau sourire en ralliant le podium de la salle de l'ex-Régent. Ayant à peine rapproché sa voix du petit micro, la chanteuse, ayant scindé son spectacle en deux parties, s'est mise à fredonner son chant lyrique en immortalisant ses oeuvres comme la célèbre coupe intitulée «Ya Ouassaâ El Makhazen». De l'autre côté de la salle, le silence parfait dominait, l'assistance ne faisait que secouer partiellement la tête en signe d'acquiescement motivant l'artiste à hausser le ton, à faire preuve d'amples épreuves à franchir en passant, sans avertir le public, à la phase suivante de son show dans laquelle la chanteuse, faisant les éloges du Prophète (Qsssl), a investi toutes ses forces vocales pour ne pas déplaire en fredonnant le long chant de «Koul menour nour El Hachemi kmal». Une telle oeuvre est connue par tous les fans du hawzi de l'ouest du pays, notamment par les habitants de la ville de Tlemcen ayant pour habitude de le suivre même proposé sur la place publique, le «Bassin». Celui-ci, situé en plein coeur de la capitale des Zianides, constitue le giratoire menant vers le succès. Aucun des disciples du chant tlemcénien n'ignore une telle évidence. Rym Hakiki n'est pas inconnue dans le paysage artistique, aussi bien en Algérie qu'à l'étranger. Elle n'est pas non plus mystérieuse. Son long parcours a fait d'elle une artiste dont la notoriété dépasse toutes les frontières. Elle est la star de la jeunesse algérienne, nouvelle princesse de la musique arabo-andalouse et du hawzi. Son abnégation lui a valu un tel titre. A 8 ans, elle rejoint l'école musicale Nassim El Andalous d'Oran. Chanson populaire, musique andalouse et hawzi, c'est avec un répertoire étendu qu'elle fait paraître dès l'âge de 16 ans son premier album de «Ya Ould Nass» ainsi que «Mal hbibi malou» et «Khayef chemissa». Ces succès ont fait renaître la musique algérienne et ont démontré les talents d'une artiste prodigieuse. Désormais connue et reconnue par son charisme et son talent de vocaliste, elle enchaîne l'enregistrement de plus d'une dizaine d'albums. Le plus célèbre est sans doute celui de la consécration, «Sabra» vendu à plus d'un million d'exemplaires. Elle est, aujourd'hui, surnommée la nouvelle merveille de la chanson andalouse. Rym Hakiki restera-t-elle la pionnière d'un nouvel air musical et d'un tel héritage traditionnel, avec sa voix? L'artiste dégage chaleur et douceur à la fois, elle incarne la culture algérienne à travers le monde, et de son souffle contemporain, attise passionnément les braises de la tradition. A la faveur de cette nouvelle génération de jeunes chanteurs faisant des percées fulgurantes dans le chant andalou, le champ artistique risque-t-il de se rétrécir autour de Rym Hakiki en perdant du terrain notamment en ce qui concerne l'audimat? Rien ne s'est encore dessiné malgré l'émergence rapide d'autres artistes dont les qualités vocales ne sont pas à mettre de côté. Il s'agit entre autres de Meriem Benallal et Lila Borsali qui, elles aussi, se sont imposées en tant que force montante à ne pas sous-estimer. Pour les connaisseurs, Lila Borsali ayant imposé une forte personnalité artistique en plus de la sienne, est devenue, ces dernières années, une véritable machine de productions innovantes malgré le passage à vide qu'elle a traversé en ayant vécu, pendant plusieurs années, une situation plus ou moins critique après avoir perdu son époux. Remise de ses émotions, Lila Borsali est revenue en force. Son spectacle prévu, à l'occasion des soirées de Ramadhan de cette année, sera pour elle, sans aucun doute, un autre challenge pour «revendiquer» la place chère lui revenant de droit dans le paysage artistique aussi bien local qu'international. L'ex-Régent et son onde de fréquence l'attendent. Lila Borsali remplira-t-elle la salle cette fois-ci comme elle l'a fait l'année dernière malgré l'entrée payante appliquée?