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L'Afrique face à son destin
BERCEAU DE L'HUMANITE, TOMBEAU DES RÊVES AFRICAINS
Publié dans L'Expression le 29 - 05 - 2018

Mme Zuma et Barack Obama lors du sommet Etats-Unis - Afrique en août 2014
Le continent est condamné à s'affranchir de ses pesanteurs internes et de mettre un terme aux ingérences étrangères.
L'Afrique est à la croisée des chemins en raison de son ambition immense et de la réalité de sa situation politique, sociale et économique.
La paix s'impose ainsi comme le défi majeur du continent avant de pouvoir mettre le cap sur le développement et l'intégration économique et sociale, l'harmonisation de ses régimes budgétaires et fiscaux. Quant à l'unité politique, elle reste un objectif stratégique mais lointain.
L'Union européenne avec son expérience unitaire de soixante ans, troisième puissance économique mondiale avec une démocratie ancrée dans les moeurs politiques et culturelles, et des degrés d'intégration importants, n'arrive toujours pas à se doter d'une politique étrangère commune, encore moins d'une armée unique. Si en Europe, où le souverainisme est en net recul, notamment chez les citoyens européens, les résistances nationalistes ont sapé le projet de la Constitution européenne, qu'en est-il en Afrique où l'Etat-nation, la démocratie, la justice et le développement restent à construire et à consolider dans la quasi-totalité du continent? C'est à ce titre que l'idée des «Etats-Unis d'Afrique» demeure sinon une chimère à court et moyen terme, du moins un rêve qui nécessite des fondements solides à édifier sur des bases objectives de convergence d'intérêts communautaires sérieux qui transcendent les lubies personnelles, pour intégrer tous les paramètres sociopolitiques, économiques, culturels, linguistiques, ethniques qui font de l'Afrique une mosaïque d'une diversité aussi enrichissante qu'antagonique. Il s'agit donc de se donner les moyens de faire converger toutes ces variétés et toute cette diversité qui, pour l'heure, nourrissent des conflits dans différentes régions d'Afrique. Des Africains d'un même pays ne s'acceptent encore pas et n'arrivent pas à cohabiter dans le même espace politique et social parce qu'ils ne sont pas de la même ethnie, ou confession, ne parlent pas la même langue, ne bénéficient pas des mêmes avantages socio-économiques... Si l'Europe a dépassé ses contractions c'est parce qu'elle a décidé, avant de s'unir politiquement sous la même bannière, de se développer comme un seul pays. Certes, les circonstances historiques et les cheminements ayant conduit à l'Europe des six, puis des douze, puis des quinze puis des vingt-huit (Royaume-Uni inclus), sont totalement différents de ceux de l'Afrique. L'Afrique n'a jamais été colonialiste, n'a jamais pillé un autre continent pour réussir une accumulation primitive des richesses avant de la fructifier dans un processus de développement propre. Cependant, l'Afrique dispose d'immenses richesses et n'a nullement besoin de suivre le même cheminement que celui des ex-puissances coloniales.
La théorie du développement inégal et combiné est valable surtout pour l'Afrique dont le véritable butin des guerres d'indépendance demeure sa capacité d'adaptation aux mutations qui lui ont été imposées et dont elle peut tirer profit. L'homo sapiens est né en Afrique avant de conquérir le reste du monde. C'est à ce titre que la capacité d'adaptation de l'Africain est un fait avéré depuis l'aube de l'humanité.
L'Afrique dispose, au-delà de ses richesses naturelles incommensurables, d'un potentiel humain aussi important qui demeure l'atout majeur du continent pour réaliser ses objectifs de paix, de stabilité et pour engager un processus de développement économique et social pour une réelle renaissance. Le dernier sommet de l'Union africaine tenu fin janvier dernier à Addis-Abeba, s'est penché essentiellement sur les dossiers épineux qui freinent justement toute dynamique de développement et de décollage économique, en dépit d'un taux de croissance record. En premier lieu, la lutte contre la corruption qui coûte au continent plus de cinquante milliards de dollars par an. A ce propos, le journal panafricain, La Tribune Afrique rapportait les propos d'un expert africain, Moussa Faki Mahamat qui estime qu'avec une inégalité dans l'ancrage du phénomène entre les pays, «l'ampleur du fléau de la corruption sur le continent et (...) ses effets dévastateurs pour le développement économique, corrosifs pour la cohésion sociale et déstabilisateurs pour l'ordre politique», selon le commentaire de Moussa Faki Mahamat, reste une tache noire dans la réputation africaine. Un constat qui a motivé la désignation de l'année 2018, «année de la lutte contre la corruption». Le thème de cette année: «Remporter la lutte contre la corruption: une voie durable pour la transformation de l'Afrique». Cependant, ce discours anticorruption n'est pas nouveau. Tant que les peuples sont des spectateurs passifs de l'exercice du pouvoir par des élites méprisantes, liées à des intérêts étrangers ou de prédation, sans aucun contrôle des Parlements et des élus sur les actions des gouvernements, ce projet risque d'être un mort-né. Néanmoins, le développement économique du continent peut en réduire les effets néfastes. A ce titre, la mise en place d'une Zone de libre-échange continentale, «de Dakar à Djibouti, de Tanger à Johannesburg. Un marché commun qui permettrait théoriquement à tous les pays africains d'avoir accès, sans barrière douanière ou tarifaire, à un marché de 1,2 milliard de consommateurs potentiels et qui devrait doper la concurrence et la compétitivité africaines.
Le projet a beaucoup avancé en négociation en 2016, mais a un peu stagné en 2017. Cette année sera peut-être la bonne», selon La Tribune Afrique. D'autres défis tout aussi déterminants attendent l'Afrique. Il s'agit essentiellement des conflits ethniques, confessionnels, du terrorisme notamment en Afrique subsaharienne, des épidémies comme le retour d'Ebola, de la famine qui provoque des exodes massifs et un mouvement migratoire extra et intra africain. Mais le défi majeur de l'Afrique est de réussir à s'affranchir des ingérences étrangères et des séquelles du colonialisme, notamment l'allégeance à des puissances étrangères qui sucent le potentiel et les richesses de l'Afrique.


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