Les malades n'ont pas fini de souffrir Prenant conscience de l'impasse dans laquelle il se trouve, le Camra espérait une nouvelle invitation de la tutelle pour éviter de perdre la face. Or, le ministère de la Santé, conséquent avec lui-même, n'a pas jugé utile de se mettre à nouveau autour d'une table de négociations après avoir formulé toutes les propositions qu'il peut actuellement offrir. Dans son dernier communiqué, le Collectif autonome des médecins résidents algériens (Camra) a qualifié le mouvement de grève qu'il observe depuis plus de six mois d'«exemplaire». En fait, ça aurait été plus juste de dire que ce mouvement est à prendre en «exemple» par l'ensemble des autres mouvements syndicaux afin d'éviter la bérézina! Car, malgré une grande mobilisation de milliers de résidents, l'échec est cuisant! Avec son entêtement, le Camra a grillé toutes ses cartes et avec la tutelle et avec l'ensemble de la société. Il cherche aujourd'hui désespérément une sortie de crise honorable. D'ailleurs, lors de ses dernières réunions, le Camra a insisté, dans ses communiqués, sur sa disponibilité au dialogue incitant même le ministère de la Santé à l'inviter à des négociations. Le 26 mai dernier et en se rendant compte de l'impasse dans laquelle ils se trouvent, les médecins résidents ont proposé de revêtir leur blouse et de reprendre le chemin des hôpitaux pour assurer à nouveau les gardes à l'unique condition d'«avoir des négociations fructueuses» avant la date de reprise, fixé au 3 juin. Il est clair que le Camra ne cherchait que la forme et non pas le fond en formulant une telle proposition. Le syndicat des résidents se serait suffi d'une invitation publique de la tutelle pour qualifier les négociations de «fructueuses». Tout ce qu'il cherchait c'était d'éviter de perdre la face. Mais c'était compter sans le département du professeur Mokhtar Hasbellaoui. Ce dernier qui garde, certes, les portes du dialogue ouvertes, n'a cependant pas convié le Camra. Il ne l'invitera probablement plus. Non pas que la tutelle rejette les négociations, mais plutôt parce qu'elle est conséquente avec elle-même. Le ministère de tutelle, et dès le début de la grève des médecins résidents, a appelé les représentants syndicaux de ce mouvement de protestation, à plusieurs reprises, autour d'une table de négociation. Il a aussi répété, sans cesse, que les portes du dialogue restent ouvertes. Le ministère a enfin, formulé plusieurs propositions de sorties de crise en donnant des réponses favorables à la majorité des problèmes soulevés et en proposant un remodelage de l'énoncé à deux revendications qui sont à l'origine de la discorde, à savoir le service civil et le service militaire. Autrement dit, la tutelle n'a refusé aucune des revendications des résidents. Elle a tenté de satisfaire toutes celles jugées recevables et d'accorder des concessions dans la mesure de ses capacités actuelles. Le ministère a donc fait la moitié du chemin vers le syndicat des résidents et c'est ce dernier qui a refusé d'avancer. Il s'est obstiné croyant jouer au quitte ou double. Or le syndicalisme n'est pas un jeu. Ayant donc fait toutes les propositions qu'il peut actuellement offrir, pour quelle raison le ministère va-t-il se mettre à nouveau autour d'une table de négociations? En fait, que va-t-il négocier? Le Camra, faut-il le rappeler, a obtenu des réponses favorables concernant l'attribution d'un logement, l'aménagement et l'équipement des plateaux techniques, le droit au regroupement familial, le droit à un billet d'avion par année vers les wilayas de l'extrême Sud, outre l'autorisation d'exercer une activité complémentaire dans le secteur privé et le droit à la formation continue. En ce qui concerne le service civil et le service militaire, le ministère de tutelle a proposé à la place de l'annulation du caractère obligatoire du service civil et de la dispense du service militaire, la déduction de la durée du Service national de celle du service civil. Et la durée de ce dernier a été revue à la baisse selon les régions. Cela n'a pas été suffisant pour les résidents qui, en choisissant de corser le bras de fer avec le ministère de la Santé et d'arrêter toute activité, même les gardes, sont allés droit dans le mur. Ils se sont rendus compte de cette erreur en voyant leur mouvement s'essouffler et se fracturer avec le retour de centaines de grévistes à leurs postes de travail. Voulant sauver les meubles, le Camra a tenté, sans succès, l'approche avec le ministère de la Santé. Hier en décidant de maintenir le boycott des gardes, le Camra a grillé sa dernière carte. Car après celle-ci, que pourra-t-il bien faire à quelques semaines des vacances d'été?