Ce n'est certainement pas par hasard ou à cause d'une simple coïncidence de calendrier qu'Abdelaziz Bouteflika a décidé de mettre fin à toutes les spéculations au sujet de «tamazight», à Constantine, après des mois de rumeurs et de «faux scoops». Le chef de l'Etat a tranché: «Tamazight ne sera pas langue officielle. Il n'y a aucun pays au monde qui possède deux langues officielles, et l'Algérie ne va pas constituer un cas exceptionnel. La langue officielle de l'Algérie est l'arabe», a affirmé, jeudi dernier, le président de la République dans un meeting plein et qui suscitera certainement beaucoup de commentaires. Ainsi, c'est à partir de l'antique Cirta que Abdelaziz Bouteflika a tenu à «mettre les points sur les ‘'i''», en affirmant que «dans l'intérêt de l'Algérie, l'arabe restera la seule langue officielle» Et ce n'est certainement pas par souci de rhétorique qu'il a insisté sur l'aspect arabo-islamique de la ville de Constantine. En évoquant Ben Badis, le chef de l'Etat s'est reconnu officiellement dans la fameuse phrase, prononcée par le fondateur de l'Association des ouléma algériens. «Nous sommes des Amazighs arabisés par l'islam». Il a néanmoins mis en garde tous ceux qui seront tentés de faire l'amalgame entre la pensée d'Ibn Badis et un certain courant politique. L'allusion concernait l'ex-FIS. Il n'y a pas l'ombre d'un doute. A propos de ce parti et tous ceux qui continuent de s'en revendiquer, Bouteflika a été tout aussi clair qu'il l'a été dans ses précédents discours. Il a évacué toute idée de retour aux années 90. Pour le chef de l'Etat, il n'est pas question «d'amnistie générale». «Même si vous me chargez de cette mission, je ne l'accepterai pas», a-t-il déclaré. en évoquant Zighoud Youcef, Ali Mendjeli, Rabah Bitat, Boumediene et les chouhada de la guerre de Libération nationale, le président de la République a surtout voulu lancer un message aux partisans de la «laïcisation» et «l'islamisation». L'Algérie de demain ne se construira que sur les principes de la proclamation du 1er Novembre 54. C'est aussi la première fois qu'un chef de l'Etat parle en termes élogieux de l'étape «ottomane». Pour le président, la résistance d'Ahmed Bey face à l'armée coloniale fait date; «Le bey des beys» comme il l'a nommé, fait partie de notre histoire à l'instar de Massinissa et Youghurta. «Le projet de la charte pour la paix et la réconciliation nationale n'est pas le Coran. Il s'agit d'un «idjtihad» (effort). Dieu m'en soit témoin, ce projet ne m'a pas été imposé d'en haut», a-t-il souligné. S'agit-il d'une réponse aux appréhensions d'Abdelhamid Mehri, exprimées dans un quotidien national? Probable. S'adressant aux quelque 30.000 ou 40.000 personnes qui ont assisté à son meeting, il a appelé le peuple algérien à aller voter massivement et à dire oui à la paix et la réconciliation nationale. Conscient de la place qu'occupe Constantine dans «l'échiquier politique» et «électoral», et en homme politique avisé, Bouteflika a employé les mots qu'il fallait, comme en 1955 lorsque le chahid Zighoud Youcef déclencha son offensive contre l'armée coloniale afin de briser l'étau dans les Aurès, la population de Constantine est apparemment appelée, aujourd'hui, à assumer les mêmes responsabilités.