Le 17 octobre 1961 fut le jour d'une répression violente de manifestants algériens Les dirigeants français, dont Emmanuel Macron, ne parviennent toujours pas à mettre les mots justes sur des faits historiques. Attendu sur sa réaction à la commémoration du massacre du 17 octobre 1961, le président français s'est contenté d'un tweet pour marquer cet événement historique. Il a fait bien moins que son prédécesseur, François Hollande, en ce sens qu'il a eu l'expression assez «soft» pour qualifier le massacre des Algériens à Paris. «Le 17 octobre 1961 fut le jour d'une répression violente de manifestants algériens», a écrit Emmanuel Macron sur son compte Tweeter. Le mot «violente» lorsqu'on comptabilise des centaines de morts, n'est pas vraiment à la hauteur de l'horreur coloniale au beau milieu du XXe siècle. Le président français qui a admis la sauvagerie du système colonial en Algérie même où la torture a été érigée en système et fait des milliers de victimes dans la seule Zone autonome d'Alger, veut certes, voir la réalité historique en face, mais derrière un confortable «voile lexical» où le poids des mots a toute son importance. Emmanuel Macron affirme à l'occasion des 57 ans des massacres de centaines d'Algériens dans la ville où il vit et travaille que «la République doit regarder en face ce passé récent et encore brûlant». L'homme semble donc prendre conscience de l'héritage que lui ont légué ses prédécesseurs, eux-mêmes, incapables de lever le voile sur un épisode cruel de l'Histoire de la France. Faut-il lui reconnaître un courage que Hollande, Sarkozy et Chirac n'avaient pas? Certainement, sauf qu'il semble découvrir le complexe profond que traîne la République française sur les questions mémorielles. Les dirigeants de ce pays ne parviennent toujours pas à mettre les mots justes sur des faits historiques. Macron qui ne déroge pas à cette tradition, toute française, veut regarder le passé en face. «C'est la condition d'avenir apaisé avec l'Algérie et avec nos compatriotes d'origine algérienne», dit-il dans son tweet. Mais cet «avenir apaisé» a besoin d'un engagement qui répond au mal causé par la colonisation. Le concept de «répression violente» évoqué par l'actuel locataire de l'Elysée, n'est pas ce qu'on pourrait qualifier de «adéquat» pour résumer ce qui s'est produit à Paris le 17 octobre 1961. Le propos de Macron peut même être considéré comme une reculade par rapport à ce qu'avait déclaré François Hollande. Ce dernier avait reconnu en 2012 «avec lucidité», au nom de la République, la «sanglante répression» au cours de laquelle ont été tués «des Algériens qui manifestaient pour le droit à l'indépendance». La réaction quelque peu timide du président français, pourrait s'expliquer par la force de nuisance encore forte du lobby colonialiste français. En fait, la guerre d'Algérie continue à être un sujet de politique intérieure en France. Si Emmanuel Macron avait les coudées franches, on aurait avancé plus rapidement sur le dossier de la mémoire, disent de nombreux historiens. Cela est une évidence qu'un groupe d'intellectuels voudrait voir se concrétiser. Ces personnalités, composées d'historiens et de membres du mouvement associatif, ont écrit au président de la République française, lui demandant d'aller dans le sens de sa déclaration d'Alger qualifiant la colonisation de «crimes contre l'humanité». Ils ont estimé important de reconnaître officiellement la responsabilité de l'Etat français dans le massacre d'Algériens à Paris. Mais Macron le candidat n'est visiblement pas Macron le président. Et pour cause, la requête est restée lettre morte et aucune réponse ne leur a été fournie. Ceci expliquant cela, on comprend l'absence du mot «massacre» dans le tweet.